Miscellanees.net - blog prolixe pub, marketing & conso, high tech, innovations - Mot-clé - Agences photo2023-11-09T22:14:23+00:00urn:md5:e7ec1fbd7729b619d22bab365af406cbDotclear"Aujourd'hui, un Libé sans photo"...urn:md5:0fd11e8dfae2115875a2cb3d0a4ce9de2013-11-14T20:51:00+01:002013-11-16T17:28:52+01:00Capucine CousinPhotoAgences photoLibérationMagnumParis PhotoPhotojournalismePolka <p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/.IMG_2800_m.jpg" alt="IMG_2800.JPG" title="IMG_2800.JPG, nov. 2013" /></p>
<p><strong>D</strong>éjà, il y a ce surtitre de <em>Libération</em> de ce jour,
presque un épitaphe. Puis une longue explication en forme d'édito, qui trouve
sa suite avec deux pages dans le journal, mais aussi des tribunes signées par
les photographes Sébastien Calvet, Caroline Delmotte, et une interview de
Raymond Depardon.</p>
<p>Et surtout, en le feuilletant, il y a ces pages marquées de gros carrés
blancs, trous béants au milieu des articles, où apparaissent juste les légendes
et les crédits photos : quelques signatures de photographes et de
collectifs (Léa Crespi, Bruno Charoy, Sébastien Calvet, Mat Jacob / Tendance
Floue) et beaucoup d'agences (AFP, Joe Raedle / Getty, AFP, Marion Ruszniewski
/ AFP). Avec ces blancs, le quotidien semble étrangement muet. Aujourd'hui,
<em>Libération</em> a donc fait le choix de publier une édition amputée de ses
photos, néanmoins publiées sur une double page en fin de journal, un peu comme
un chemin de fer. Un coup éditorial, une grève de l'image en quelque sorte.</p>
<p>La veille, cet ultime chemin de fer, lors du bouclage, avec ces trous
béants, avait déjà filtré sur Twitter, via le compte de Jérôme Balazard.</p>
<p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/.BY-lPzMCEAAGDMT.jpg-large_m.jpg" alt="BY-lPzMCEAAGDMT.jpg-large.jpeg" title="BY-lPzMCEAAGDMT.jpg-large.jpeg, nov. 2013" /></p>
<p><em><strong>L</strong>ibération</em> a donc traité à sa manière l'actu photo
du moment, l'ouverture, ce matin, du salon Paris Photo au Grand Palais. A
contrepied. <em>"Choisir l'ouverture du salon Paris Photo pour "installer" des
images blanches dans toutes nos pages comporte, bien sûr, un engagement de
notre part"</em>, insiste l'édito. Car le contraste est saisissant : on a
rarement autant parlé de l'<strong>omniprésence de l'image dans nos vies
numériques</strong>, où l'on partage sur les réseaux sociaux, à longueur de
journée, des photos sur notre quotidien, comme j'en parlais dans <a href="https://blog.miscellanees.net/post/2012/12/11/Twitter-/-Instagram-/-Google%3A-la-guerre-photo-est-d%C3%A9clar%C3%A9e">
ce billet</a>. Comme le montrait le Salon de la photo en fin de semaine
dernière, les appareils photo numériques connectés à Internet, et la nouvelle
génération de smartphones intégrant des appareils photo perfectionnés accentue
aussi cette tendance.</p>
<p><strong>P</strong>aradoxe, dans les travées du très chic salon Paris Photo,
des galeries photo de Russie, de Chine, de New York, de Londres et de Paris,
exposent en ce moment des tirages photos à vendre - parfois très cher, sur un
marché de la collection de photos qui s'enflamme. La galerie français Polka,
lancée par Alain Genestar, vend ainsi une cinquantaine de tirages photo de
Sebastiao Salgado. Mise à prix: de 8 000 à 50 000 €. Un <em>"art bicentenaire
auréolé par le marché"</em>, avec des chiffres de vente fous ("<em>5,5 millions
d'euros pour des tirages de Richard Avedon"</em>), où il y a pourtant une large
zone de flou, entretenue par une <strong>bulle naissante</strong>:
"<em>Désormais, quand on ne trouve plus une œuvre, on la crée. Des descendants
multiplient les tirages"</em>, souligne <em>Libération</em>. Et cite, à ce
titre, Richard Avedon, qui a multiplié les tirages à la fin de ses jours...</p>
<p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/.IMG_2839_m.jpg" alt="IMG_2839.JPG" title="IMG_2839.JPG, nov. 2013" /></p>
<p><em>Libération</em> défend par ces blancs dans ses pages la liberté de la
presse, et dénonce la situation plus que préoccupante des photographes de
presse. Et de démontrer l'importance de la photo dans l'information -
<strong>la photo, plus qu'une simple illustration, est une info en
elle-même</strong>, avec un angle, elle <em>"a l'oeil sur les mœurs et usages
de notre monde". "C'est un Libération où la photo a été volontairement
escamotée. Du blanc en hauteur ou en largeur, comme le négatif d'images
invisibles et pourtant bel et bien là. (...) Nul n'ignore la situation
calamiteuse où se trouvent les photographes de presse, en particulier, les
reporters de guerre, qui mettent leur vie en danger pour à peine la
gagner"</em>, souligne le quotidien dans un édito au ton ferme. Une radicalité
qui s'affiche donc littéralement. De fait, une <a href="http://www.scam.fr/Portals/0/Contenus/documents/actu/2013/Bayeux2013.pdf">récente
enquête</a> de la Société civile des auteurs multimédias (Scam) soulignait
qu'un photographe de guerre sur deux perçoit des revenus inférieurs ou égaux au
Smic et n'est pas assuré.</p>
<p>Le lien paradoxal avec Paris Photo ? Dans la galerie Magnum, hier soir,
j'ai vu à vendre quelques tirages de Raymond Depardon - que l'on ne présente
plus - ainsi que de Jérôme Sessini, un des photojournalistes-stars français,
débauché par Magnum à l'AFP. Les reporters de guerre <em>"exposés pour quatre
jours au Grand Palais par des galeries avisés, leur sort apparemment plus
enviable est en réalité un miroir aux alouettes"</em>, tranche le
quotidien.</p>
<p><strong>C</strong>e qu'il faut restituer dans un contexte de <strong>crise
aggravée pour les agences photo</strong> : <a href="https://blog.miscellanees.net/post/2012/07/08/Magnum%2C-r%C3%A9sistante-de-65-ans%2C-Getty-%C3%A0-vendre...-Quel-avenir-pour-les-agences-photo">
disparition progressive</a> des agences photo historiques, telles Sygma et
Rapho, face aux défis du numérique, <a href="http://www.strategies.fr/emploi-formation/management/169185W/le-photojournalisme-un-metier-sans-visa.html">
raréfaction des photographes</a> salariés par les rédactions - <em>Le Monde,
L'Express, Libération</em> font partie des journaux qui ont peut-être encore
une poignée de photographes et correspondants salariés fixes (et non à la
pige)...</p>