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mardi 23 novembre 2010

Et si la jeunesse était éternelle ?

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Billet initialement publié [chez Nicolas Bordas - qu'il en soit remercié :]

Quand Nicolas Bordas m'a proposé de m'essayer à mon tour à la (visiblement fameuse) ascension du #cocotier, j'ai accepté bien volontiers, d'autant plus lorsqu'il m'a confié que les contributrices étaient trop minoritaires... Encore fallait-il trouver un sujet idoine, accrocheur, susceptible d'entraîner un maximum de lecteurs. J'aurais pu parler sexe en biaisant cela par un angle techno (dommage, c'est déjà fait), ou encore écrire un énième sujet sur telle marque tech en pleine ascension - ou en pleine descente aux enfers (sujets que je préfère réserver à mon employeur...).

Jeunesse éternelle sur pellicule argentique

En cette fin d'année, propice aux bilans et autres rétrospectives, j'ai préféré partager avec vous deux créations qui m'ont bluffée cette année, d'un point de vue culturel et "sociétal". Il y a eu cette expo photo de Larry Clark, qui donne à voir plusieurs générations d'ados, à la jeunesse éternellement saisie sur des pellicules argentiques. Alors oui, il y a eu cette polémique autour de leur côté (supposé) sulfureux, qui a valu une interdiction de cette expo aux mineurs... Un fait intéressant, on ne peut plus révélateur d'une certaine frilosité ambiante - les photos quelque peu plus complaisantes de Nan Goldin, exposées en 2006 http://icartiens.com/spip.php?article195 au Centre Pompidou n'ont guère suscité un tel émoi.

J'en ai parlé ici , cette expo est follement touchante parce que l'on y voit avant tout des portraits d'ados, parfois disparus depuis ces shootings, aufil des décennies - des punks des années 80 aux skateurs des années 90, ensuite filmés par Larry Clark dans Wassup rockers. Des ados nous renvoient à notre propre adolescence. Des portraits d'ados, miroirs (peut-être déformants) qui auraient dû avant tout être vus par les ados...

"Skins", série post-punk

Un autre miroir pour ados m'a bluffée ces dernières mois: la série britannique "Skins" (qui a bien sûr sa page officielle, son fil Twitter etc). Vous avez peut-être entendu parler de cette série créée par Jamie Brittain et Bryan Elsley, et diffusée depuis janvier 2007 sur la chaîne E4 (rediffusée par Canal + en France), qui a bien cartonné là-bas (1,4 millions de personnes ont suivi l'épisode pilote sur E4). On en a parlé en France pour les soirées d'ados quelque peu dévoyées qu'elle a suscitées (lesquels ados, "génération Facebook" oblige, exposent sans pudeur leurs photos, comme le montre cette simple Google search ).

A mille lieues de"Berverly Hills" et autres niaiseries, là, on y aborde l'homosexualité, l'abus de substances illicites, la pauvreté, la grossesse, l'anorexie, les familles monoparentales et à problèmes, les troubles de la personnalité, l'autisme et la mort. Parfois c'est un peu trash, ça nous secoue, nous émeut, ça nous retranche dans nos limites, mais c'est profondément réaliste. Là, c'est la jeunesse (parfois) dissolue de lower middle class british (la série se déroule à Bristol, dans le Sud-Ouest de l'Angleterre) qui est mise en scène, avec l'accent des quartiers popus (série à regarder absolument en VO).

"Somptueuse série sur les affres/atermoiements/Illusions/Désillusions de l'Adolescence" m'écrit @Co_SwEuphoria sur Twitter, la mise en scène y est soignée, hyper réaliste, alors que la série a pour marque de fabrique de recourir à de jeunes acteurs inconnus, et que le casting est intégralement changé toutes les deux saisons, créant ainsi une nouvelle génération de personnages, auxquels on s'attache durant quelques épisodes. Du beau gosse manipulateur Tony à Cassie, anorexique un peu fraca, en passant par Chris, fêtard invétéré et amoureux de sa prof (saisons 1 et 2), jusque le skater cool Freddie, et Cork, le post-punk provocateur.

De manière assez remarquable, elle comporte une série de références culturelles intemporelles, qui en font une série totalement post-punk: Cork (le personnage le plus touchant) est sapé en Levi's, Fred Perry (marque culte des mods Britisth dans les années 80, pour mémoire, qui commence à être portée par de jeunes bobos ;), Harrington Jacket...

Sans compter la bande-son musicale de folie (sur la version British en tous cas - pas sûre que l'on l'a retrouve dans les diffusions et DVD à l'étranger pour des raisons de droits d'auteur...), patiemment listée pour partie ici, entre autres blogs de fans: des Sex Pistols en passant par Blur, les Clash, Motorhead, The Drums, Sparklehorse, les Pixies... D'après ce même blog, pour la saison 4, la production a carrément nommé un superviseur musical, et signé un contrat avec un label/éditeur (Artists Without A Label), avec pour idée de faire appel à des groupes non-signés pour les faire connaître sur la bande originale des différents épisodes de la saison.

"Forever young"...

dimanche 10 octobre 2010

"Kiss the past hello", les ados éternels de Larry Clark

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C'est sans doute la photo qui illustre le mieux l'expo de Larry Clark, qui s'ouvrait hier au Musée d'Art Moderne à Paris. Ils sont jeunes, ils sont magnifiques, et il y a un discret érotisme qui émane de cette photo, pas loin d'un Botticelli, qui nous renvoie tous à nos premiers ébats.

J'ai vu l'expo Larry Clark, qui ouvrait ses portes vendredi au Musée d'art moderne de Paris. Et non, je ne vais pas vous parler ici de la polémique autour de son interdiction aux moins de 18 ans (que je trouve absurde çà titre perso... C'est une expo sur les ados et avant tout pour les ados, comme le dit très bien Larry Clark dans cette interview au Monde), mais retour ici à l'essentiel, l'art. Que valent ces photos ?

Kiss the past hello ("Dis bonjour au passé", détournement du dicton Kiss the past goodbye - "Fais table rase du passé", référence punk qui colle assez bien à Larry Clark...), avec 300 photos et 2 films inédits, montre plusieurs représentations de la jeunesse vue par Larry Clark, en 40 années de photo. La jeunesse plutôt rock, plutôt trash, qui cherche à tester les limites de la liberté, voire qui fraye avec les bas-fonds et la marginalité. Loin des polémiques un peu stériles sur une supposée complaisance (ou des photos qui revêtiraient un caractère "pornographique"), on y voit surtout des portraits d'ados que Larry Clark a suivis, succédanés des dernières décennies.

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Et cela nous touche follement, parce que cela nous renvoie à notre propre adolescence (censée être "le bel âge"), à nos excès, aux frontières que l'on a failli franchir. Un véritable uppercut, même si j'aurais sans doute été encore plus touchée si j'avais été un mec - Kiss the past hello est l'adolescence vue par un homme photographe, donc de manière avant tout masculine (nombreux portraits de jeunes mecs), avec une sensibilité bien plus personnelle des années 60 aux années 80. Lorsque Larry Clark était encore lui-même proche de l'adolescence...

Qu'est-ce que l'on y voit ? Des années 60 à Tulsa (Oklahoma) aux années 2000, on y voit son regard sur la jeunesse américaine. On y voit la drogue, le sexe, mais aussi des bandes de potes, au sein desquels Larry Clark a travaillé en immersion, en allant jusqu'à suivre certains ados durant des années, pour montrer leur évolution. Au-delà du cinéaste provoc' habitué aux scandales (cf la sortie de Kids en 1995), on découvre là un photographe qui a une p/ù^$* de sensibilité, dans les prises de vues, la lumière, ce qui ressort de ses très nombreux portraits d'ados.

Organisée de manière chronologique, l'expo donne à voir, en creux, les formes de contre-cultures portées par les ados au fil des décennies.

Premier uppercut, les quelques photos de sa mère, Frances Clark, reflets d'une Amérique idéalisée, qui tranchent avec la première partie de l'oeuvre de Larry Clark. Le portfolio Tulsa, qui couvre les années 60 (qui avait donné un livre éponyme) révèle la vie quotidienne du jeune artiste. Entre l'ennui et la violence dans les suburbs de Tulsa, il y photographie ses potes zonards.

Alors oui, là la pauvreté va de pair avec les premiers shoots, qu'il photographie dans son entourage, avec parfois des photos très crues: une femme enceinte qui se pique, un ado qui joue avec un revolver, le visage tordu de douleur de cet homme, le premier shoot de la girlfriend, des scènes qui mêlent piqouze et sexe... Il y a aussi les dates de décès de certains potes de Larry Clark partis bien trop tôt...

Mais aussi un film muet de 16 mm de 1964, où l'on voit un jeune mec qui se shoote - film touchant et d'une tristesse absolue, qui s'affiche progressivement sur le visage de sa copine, au fur et à mesure du shoot.

Lust for life

Les années 70 donnent à voir là encore des portraits en noir et blanc d'une jeunesse qui découvre le sexe, l'amitié, parfois la drogue... Mais déjà prédominent les portraits magnifiques de ces ados, des jeunes mecs dont on se dit juste qu'ils sont beaux et sereins. Et dont on devine qu'ils ont déjà beaucoup vécu. Il y a aussi ces photos de couples, s'adonnant à l'amour (voire au triolisme) ou à la drogue, ces scènes d'ados découvrant le sexe, entre fraîcheur et expériences déjà hard..

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Pour les années 80 (portfolio intitulé avec un certain sens de la provoc' Teenage Lust - "luxure d'ados") , Larry Clark a adopté ce qui constituera la sève de son travail: il réalise des portraits au sein de groupes de jeunes dont il parvient à se faire adopter, ou avec des prostitués de la 42e rue de New York. Là, ce sont les années punks: jeunes mecs au crâne rasé et aux jeans moulants.

A partir des années 90, il s'intéresse aux jeunes skaters. Ce seront les prémices de son film "Wassup Rockers". Là, ses photos changent, on voit une jeunesse presque plus sereine. Dans ces portraits grand format, aux couleurs saturées, on y voit des jeunes punks skaters latinos qui prennent la pose, avec fierté et provocation (superbe photo de cet ado qui porte un T-shirt avec pour slogan "Let's start a war" en 1992, en pleine guerre d'Irak...).

Mais aussi, en toile de le fond, là encore la pauvreté absolue: comme ce jeune mec de 12/13 ans qui pose à poil, la clope au bec, près de son père, qui a la bouteille et son dernier-né sur les genoux... Et là, on se demande : quel avenir pour ces ados ?

dimanche 3 octobre 2010

Larry Clark, Samsung mécène, Atlantico, neutralité du Net, Hadopi-Data, Mères & filles version trash, Carla...

journaux

Comme tous les dimanches (enfin depuis peu;), quelques liens en vrac, des infos glanées lors de mes revues de presse (et du web), quelques éléments prospectifs, médias et autres.

  • Cela promet d'être la polémique de la semaine: l'ouverture le 8 octobre (jour pas comme les autres pour moi...) au Musée d'art moderne de Paris de l'expo photo de Larry Clark, cinéaste doué, qui a su cerner la jeunesse trash (sex & drugs) dans Kids - et avec beaucoup de sensibilité dans Paranoid Park. Révélateur d'un air du temps frileux et conservateur, l'expo sera... interdite aux mineurs: "une attaque contre les ados" pour Larry Clark.
  • Côté culture toujours, autre expo du moment, celle au Petit-Palais, avec un mécène high-tech: allez lire mon papier sur Rue89, "Samsung, le mécène high-tech (très) omniprésent du Petit-Palais".
  • Le projet Atlantico prend forme : aperçu ici de la version beta du nouveau site d'info de droite, financé notamment par Arnaud Dassier. (
  • Fail pour Le Point, dont Jean-Michel Décugis (grand reporter reconnu pour ses enquêtes) s'est fait berner en beauté avec un faux témoin.
  • Le groupe de presse Wolters Kluwer groupe de presse spécialisé dans l'actu social-RH (Liaisons Sociales...) est - ironie terrible - confronté à une crise sociale majeure: 120 salariés (!) déclarés en arrêt-maladie. Son PDG France Xavier Gandillot a été "remercié", il sera remplacé par Michaël Koch.
  • Numérama lance Hadopi-Data pour tenter de fédérer les victimes de la commission Hadopi, etleur apporter une aide juridique. On a aussi appris qu'Hadopi aurait un budget annuel de 10 millions d’euros versés par l'Etat - presque autant que la Cnil. CQFD.
  • Dans Les Echos: Le mariage d'Internet et de la télé fait revenir les jeunes vers le petit écran et amène de nouveaux formats d'émissions: à lire là (tant que c'est en accès libres)
  • Marre des pubs gnan gnan "mères et filles" Comptoir des cotonniers ? Alors allez voir ça, ça dépote http://tinyurl.com/39q7yor