Miscellanees.net - blog prolixe pub, marketing & conso, high tech, innovations - Mot-clé - The handsmaid s tale2023-11-09T22:14:23+00:00urn:md5:e7ec1fbd7729b619d22bab365af406cbDotclearCe que la série "The handmaid's tale" dit de l'Amérique de Trumpurn:md5:1259ed62e33802a0f43b047b779bc1e62017-08-24T22:27:00+02:002017-08-24T22:59:10+02:00Capucine CousinEcransDystopieFéminismeHuluOCSScience fictionSérieThe handsmaid s tale <p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/.maxresdefault_m.jpg" alt="maxresdefault.jpg" title="maxresdefault.jpg, août 2017" /></p>
<p>Une fuite éperdue en voiture, les sirènes de flics retentissant derrière. La
femme et sa fille en fuite sont rattrapées par de mystérieux hommes casqués, en
noir. Plan suivant, le changement de décor est radical. dans un élégant
contrejour, la même femme étrangement accoutrée, à la manière d'une servante,
longue tunique rouge et casaque blanche. Elle est enfermée dans une chambre
nous dit-elle, "mais ils n'ont pas prévu que je m'échappe. Une servante n'irait
pas loin. Ils craignent les autres évasions. Celles qu'on peut ouvrir en soi
avec un objet tranchant". Au fil des épisodes, cette plongée en continu dans un
enfer du futur nous est narrée, en voix off, par Offred (incroyable Elisabeth
Moss, révélée dans la série vintage <em>Mad Men</em>, ces élégants pubards),
avec une ironie - et une rébellion - constante. "J'avais un autre nom, mais il
est interdit à présent". Beaucoup de choses sont interdites à présent".</p>
<p>Bienvenue à Gilead, dictature patriarcale et ses extrémistes chrétiens. Dans
un futur (très) proche, ceux-ci ont pris le pouvoir aux États-Unis, et en
profitent au passage pour le soustraire totalement aux femmes, reléguées dans
ce monde en grave crise de natalité au rang de vulgaires pondeuses. Cette
dystopie terrifiante est une adaptation du roman de Margaret Atwood, méconnu en
France jusque là, en une série lancée sur la plateforme Hulu (une des
concurrentes US de Netflix), et diffusée en France cet été sur OCS (Orange) à
partir du 27 juin. C'est une des séries les plus commentées ces derniers mois
en France, et une des meilleures que j'aie vues ces dernières années dans les
perles de science-fiction (que j'adore et vante ici depuis plusieurs années ;)
depuis, mettons, Real Humans, et plus récemment Westworld, où Anthony Hopkins
imagine des parc d'attraction peuplés de robots aux faux airs de cow-boys.</p>
<p>Depuis son élection en novembre dernier, l'Amérique de Trump trouve
décidément un miroir dans les séries, films et livres. Sorti en début d'année,
l'horrifique film <strong><em>Get out</em></strong> reflète une Amérique qui
n'en n'a pas fini avec le racisme, ou l'étrange accueil de Chris, beau jeune
homme noir, par sa très WASP belle-famille, avant que le tout ne vire façon
Tarantino (nos spoils !). Le film, budget de 7 millions de dollars, a raflé
175,4 millions de dollars de recette aux Etats-Unis. Au même moment, Netflix
diffusait une série quelque peu borderline, Dear White People dans l'université
imaginaire de Winchester, où une soirée "blackface" révélait les tensions
raciales…</p>
<p>Il était une fois, donc, le royaume de Gilead, monde futuriste étouffant que
n'aurait pas renié René Barjavel. Nous sommes dans un monde futur, où on semble
pourtant avoir fait un retour des siècles en arrière. Ici, pas de smartphones,
ni machines. On fait le pain soi-même. Chaque foyer est dirigé par un homme
omnipotent, et composé de son épouse (privée de tout droit, du droit de vote au
droit de travailler, ou encore de détenir son propre compte bancaire,) et d'une
servante. Sa robe rouge signifie qu'elle est reconnue, certifiée fertile dans
une société où la natalité a chuté en raison d'une grave crise écologique. Elle
est violée à échéances régulières par le maître de maison dans une étrange
"cérémonie" en présence de l'épouse, dans l'espoir qu'elle donnera un enfant au
couple.</p>
<p>Ces servantes sont au centre du récit de cette dystopie, <em>The handmaid's
tale</em> ("La servante écarlate"), qui multiplie les symboles parlants. Leur
tenue déjà, cette robe rouge qui symbolise leur rôle principal, l'enfantement.
Exactement comme dans '<strong>'Ravage''</strong> de René Barjavel, roman
fondateur de la SF, qui imaginait déjà, en 1943, une société
ultra-technologique qui s'effondrait au profit du retour à un traditionnalisme
aliénant. Je vous glisse au passage cet extrait révélateur...</p>
<p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/.-1_m.jpg" alt="-1.jpg" title="-1.jpg, août 2017" /></p>
<p>Dans ce monde de Gilead, cette société étouffante a donc créé des rituels,
des codes, avec ces étranges phrases pseudo-religieuses devenues banales
formules de salutations. "Béni soit le fruit". "Que le Seigneur ouvre". "Gloire
à Vous. Que Dieu me rende digne".</p>
<p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/.IMG_0967_1__m.jpg" alt="IMG_0967_1_.jpg" title="IMG_0967_1_.jpg, août 2017" /></p>
<p>L'image soignée, l'éclairage nuancé, qui donne à de nombreuses scènes des
airs de tableaux de Vermeer, traduit ce retour à un passé oublié. Et signifie
une hiérarchisation stricte de la société, organisée autour de la vie
domestique, du foyer.</p>
<p>Comme toute dystopie, le scénario prend appui sur des fragilités de la
société actuelle pour alerter sur dérives totalitaires possibles. Il met en
scène nos craintes, il dit l’inquiétude d’un monde qui court à sa perte:
anxiété de l’excès matériel, des dérèglements climatiques, montée des
inégalités et des violences populistes… Les retours en arrière réguliers
montrent avec cruauté la vie passée agréable qu'on a connue, jusqu'il y a peu.
Ces personnages, c'est nous, dans un passé proche, comme nous, elles furent des
bobos qui prenaient leur caffè latte dans un bar branché. Une manière d'avertir
que, si l'on y prend garde, c'est un risque.</p>
<p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/.IMG_0987_m.jpg" alt="IMG_0987.jpg" title="IMG_0987.jpg, août 2017" /></p>
<p>Plus qu'un récit rétro-futuriste flippant, la série est une terrible fable
féministe. Elle prend bien sûr un relief particulier dans l'Amérique de Trump.
"Quand ils ont massacré le Congrès, on ne s'est pas réveillés, quand ils ont
mis ça sur le dos des terroristes et suspendu la Constitution, on ne s'est pas
réveillés non plus", avertit Offred.</p>
<p>Ces dernières semaines, cette série a semblé, parfois, être rattrapée par la
réalité. "Au moment de se lancer, on se demandait si cela serait plausible.
(...) et soudain, six mois plus tard, tout cela était devenu affreusement plus
crédible", soulignait Elisabeth Moss dans une interview au magazine Time. La
série met en scène le nouveau pouvoir, des réactionnaires ultra cathos mais
aussi écolos radicaux, qui prônent un retour au tout-naturel. Cela ne vous
rappelle rien? Troublant.</p>
<p>D'autant plus depuis l'élection de Donald Trump, la réalité semble rattraper
la fiction. Des exemples? La remise en cause régulière du droit à l'avortement,
des Etats-Unis à la Pologne, l'abrogation de l'Obamacare, qui menace le
financement du planning familial.</p>
<p>Dans un post sur Facebook, Emmanuel Vivier montre les troublants reflets de
l'actualité: des extrêmistes qui réclament l'exclusion de minorités et la fin
du droit de vote pour les femmes <a href="https://www.facebook.com/TheAtlantic/videos/10155734902553487/?fref=mentions&pnref=story">
selon The Atlantic</a>, ou encore quand une part de plus en plus importante de
la police américaine (coucou Palantir de Peter Thiel) connecté des données
personnelles d'individus sans supervision claire, <a href="https://www.wired.com/story/how-peter-thiels-secretive-data-company-pushed-into-policing/">
selon Wired</a>.</p>
<p>Et cet été, l'ultra-violence des manifestations racistes à Charlottesville,
qui ont révélé l'Amérique des supremacistes et le retour des cagoules blanches
du Ku Klux Klan, que l'on croyait d'un autre temps.</p>