Miscellanees.net - blog prolixe pub, marketing & conso, high tech, innovations - Mot-clé - Transhumanisme2023-11-09T22:14:23+00:00urn:md5:e7ec1fbd7729b619d22bab365af406cbDotclearLe "body hacking", les prémisses de l'humain "augmenté" ?urn:md5:f5e3671c69622423647086a1843b2bac2012-06-28T23:22:00+02:002012-06-29T14:18:02+02:00Capucine CousinR&D, innovationsBody hackingCyril FiévetLepht AnonymQuantified selfTranshumanisme <p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/.transhu_m.jpg" alt="transhu.jpeg" title="transhu.jpeg, juin 2012" /></p>
<p><strong>U</strong>ne étrange discipline, à la croisée du hacking et du
transhumanisme, qui consiste à transformer le corps humain en faisant appel à
la technologie, en implantant dans le corps des composants artificiels: puce
RFID, puce magnétique, caméra dans l'oeil... Bienvenue dans l'univers du "body
hacking", où une poignée d'individus poussent la logique de liberté
individuelle jusqu'à entreprendre sur leur corps des modifications physiques
parfois radicales. Passant outre, du même coup, l'intermédiaire classique,
l'autorité scientifique, qui cherche depuis quelques années à tirer parti du
numérique, de l'électronique et de la robotique pour améliorer le quotidien de
patients souffrant de pathologies sévères.</p>
<p>Le livre de Cyril Fiévet, journaliste et auteur (li fut entre autres de
l'aventure de l'éphémère revue <em>Pointblog</em> au début des années 2000,
pour ceux qui se souviennent...) , <strong><em>Body hacking</em></strong> (ed.
FYP, 20 €), qui tient en 158 pages, est un <strong>condensé de cette tendance
(culture?) naissante</strong>, où des individus <strong><em>"pirates du corps
humain"</em></strong> mènent des expérimentations radicales (parfois
dangereuses), dans une nouvelle forme de déclinaison du hacking et de
transhumanisme, sur lequel j'ai écrit à plusieurs reprises ici (comme <a href="https://blog.miscellanees.net/post/2011/02/27/%22Nous-sommes-tous-des-cannibales%22">dans ce billet</a>).
Les divers témoignages de "body hackers" recueillis par l'auteur à travers
leurs blogs et forums de discussion donnent un ensemble passionnant, sur
plusieurs types d'expérimentations menées.</p>
<p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/Couv-BodyHacking-201x300.gif" alt="Couv-BodyHacking-201x300.gif" title="Couv-BodyHacking-201x300.gif, juin 2012" /></p>
<p><strong>I</strong>l ne s'agit nullement, ici, de présenter un récit de
science-fiction : le livre nous laisse juste entrevoir des pratiques
futures, de manières dont des individus pourront "augmenter" leurs corps de
nouvelles fonctionnalités, avec des implants artificiels. Pour développer de
nouveaux sens, augmenter les capacités humaines, parer à des handicaps ou
déficiences (de la vue par exemple).... Et donc <strong>améliorer l'homme en en
dépassant les limites fixées par la nature</strong>. Avec le spectre, pour les
plus radicaux (ie les transhumanistes) de prolonger la durée de la vie.
Vertigineux.... Le tout à l'aide rarement de la recherche scientifique
traditionnelle ou des médecins, mais - c'est là une des ruptures induites par
Internet - souvent par des "bidouillages" par des individus ayant eux-mêmes une
expertise technologique plus ou moins importante, mais qui échangent avec
d'autres individus qui ont le même centre d'intérêt.</p>
<p>Bien vu, Cyril Fiévet commence son ouvrage en citant les formes les plus
répandues de "body hacking" - que beaucoup pratiquent ainsi déjà sans le savoir
- le tatouage, le piercing, les scarifications, voire la chirurgie esthétique,
qui ont pour point commun de s'être popularisées ces dernières années. Où l'on
apprend que 40% des Américains de 26 à 40 ans sont tatoués, et 20% des Français
sur la même tranche d'âge...Cette <em>"génération Y"</em> (l'auteur les
qualifie de "Millennials") qui a grandi avec les ordinateurs, les jeux vidéos,
les réseaux sociaux et Internet, où <em>"tatouages et piercings feraient partie
de leur culture décomplexée, où chacun affiche et revendique des signes
distinctifs"</em>. Précisément, une génération "fin de siècle" qui a baigné
dans les comics de super héros, la littérature cyberpunk et manga, les jeux
vidéos, les films de science-fiction peuplés de cyborgs... Et n'est donc pas
totalement insensible à cette idée d'"augmentation" par la technologie.</p>
<p>LA nouveauté, c'est donc que le <strong><em>hacking</em></strong> - cet art
du bidouillage et du partage d'expériences né chez des informaticiens
débrouillards et rebelles, comme évoqué <a href="https://blog.miscellanees.net/post/2011/03/25/Pirat%40ge%3A-du-hacking-%C3%A0-l-ouverture-des-fronti%C3%A8res-num%C3%A9riques-%28bof%29">
dans ce billet</a> - se transpose dans le domaine des sciences et de la
biologie. Avec les débuts du DIY Biology ou body hacking , avec ses premières
communautés, comme DIYbio.org, l'espace libre et non-lucratif Genspace, ou
encore Biocurious, un "hackerspace dédié aux biotechnologies".</p>
<p><strong>V</strong>oilà pour les initiatives "officielles". Mais l'auteur se
penche surtout sur des <strong>initiatives individuelles</strong>, nées de
chercheurs ou de particuliers (très) radicaux. Il revient ainsi sur les
premiers exemples - souvent assez connus - d'<strong>implants corporels de
puces RFID</strong>, comme par Kevin Warvick, professeur de cybernétique (avec
des visées scientifiques), ou encore un entrepreneur américain, Amal Graafstra,
avec des visées plus pratiques (ie être reconnu par la porte de son domicile,
sa moto ou sa voiture !).</p>
<p>Mais il y a des démarches de <em>body hacking</em> plus radicales. Comme les
<strong>implants magnétiques</strong>, ces pièces de métal introduites sous la
chair relayée par le magazine <a href="http://www.bme.com">BMEZine</a>, dont
l'implantation vise clairement à acquérir de nouvelles sensations, un "sixième
sens", du fait que l'implant magnétique (qui est un aimant) réagit aux ondes et
aux champs électromagnétiques, émises par divers objets (réveil, téléphone
portable, chargeur électrique...). Et permet donc de percevoir physiquement des
ondes invisibles, même au toucher, comme le montrent les témoignages assez
fascinants. Certains imaginent même des dispositifs permettant de faire
ressentir à celui qui le porte la direction du nord électromagnétique, comme
dans le projet North Paw.</p>
<p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/aimee.jpeg" alt="aimee.jpeg" title="aimee.jpeg, juin 2012" /></p>
<p><strong>O</strong>n est bien là dans cette perspective de l'<strong>humain
"augmenté"</strong>, qui acquiert de nouveaux sens, de nouvelles capacités, par
des composants artificiels. Ce qui passe aussi par des projets impliquant des
caméras ou webcams ajoutées au corps humain, parois avec des visées
scientifiques (comme dans le projet <a href="http://www.3rdi.com">3rdi</a>), ou
encore l'ajout de ^prothèses, souvent pour combler un handicap physique, mais
qui devient très bien assumé par son porteur (comme pour la top model / égérie
de L'Oréal / sportive <a href="https://blog.miscellanees.net/post/2011/06/09/Un-homme-presque-%28trop%29-parfait">Aimee Mullins</a>).</p>
<p>Pour les fans de <em>Terminator</em> et de <em>Mission impossible 3</em>
(avec la fameuse lentille de contact qui offre une vision "augmentée"...), la
société Innovega a dévoilé le prototype de iOptic, où un projecteur associé à
des lentilles de contact offre un effet de vision en "réalité augmentée" à son
porteur.</p>
<p><strong>E</strong>xpérimentations de quelques doux dingues? Oui, mais cette
idée d'interfaces hommes-machines, de <strong>produits destinés au grand
public</strong> qui visent à interagir étroitement avec le corps humain,
apparaissent déjà. Et l'auteur d'évoquer le casque audio MindWave de Neurosky,
qui lit les "états mentaux" de son porteur, un appareil commercialisé par la
société Emotiv, qui , porté sur la tête, permet de décoder les influx
électriques du cerveau,et même des applications qui permettent de déchiffrer
l'état émotionnel de l'utilisateur ! Ou encore iBrain de NeuroVirgil, qui
réalise un encéphalogramme complet durant le sommeil...</p>
<p>Ce sont là les prémisses du <strong><em>quantified self</em></strong> (voir
<a href="http://sante.lefigaro.fr/actualite/2012/06/26/18499-internet-nouveau-coach-pour-bien-etre-sante">
ce papier</a> du <em>Figaro</em>), un business naissant porté par des
<del>joujoux</del> appareils électroniques ((basés sur des capteurs) destinés à
mesurer et influer sur le fonctionnement du corps humain, couplés à des
applications mobiles ou services en ligne. Une forme de <em>body hacking</em>
donc, là encore sans les intermédiaires traditionnels (médecins, cliniques,
etc), même s'il n'y a pas l'idée ici de modification corporelle.</p>
<p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/.feature-81-Prsthetics-1_m.jpg" alt="feature-81-Prsthetics-1.jpg" title="feature-81-Prsthetics-1.jpg, juin 2012" /></p>
<p>Car pour les <em>body hackers</em>, l'idée-clé est bien celle de modifier
son corps pour dépasser les limites de l'humain, comme Cyril Fievet l'a relevé
à longueur de témoignages sur le forum <a href="http://discuss.biohack.me/">Biohack.me</a>, qui rassemble <em>"une bonne part
de la branche "dure" des body hackers"</em>, ou encore avec le témoignage de la
transhumaniste Lepht Anonym sur <a href="http://sapiensanonym.blogspot.fr/">son
blog</a>. Reste une question vertigineuse esquissée <a href="http://www.fastcompany.com/magazine/142/super-human.html">dans cet article</a>
de <em>Fast Company</em>, et à la fin de livre : et si, à l'avenir,
certains étaient tentés d’abandonner leurs membres et organes biologiques au
profit de machines sophistiquées, plus performantes ?</p>Cyborgs, eugénisme génétique... Un homme presque (trop) parfait ?urn:md5:02507ef07d1c0cf8203860559e06f9e42011-06-09T23:01:00+02:002011-06-11T09:30:42+02:00Capucine CousinR&D, innovationsCyborgectogenèsePatrimoine génétiqueTranshumanisme <p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/.aimee-mullins-dazed-plage_m.jpg" alt="aimee-mullins-dazed-plage.jpg" title="aimee-mullins-dazed-plage.jpg, juin 2011" /></p>
<p>Elle est grande et élancée, à l'élégance classique, actrice, ex-athlète hors
pair (demi-finaliste aux Jeux paralympiques d'Atlanta en 1996), mannequin pour
Alexander McQueen depuis 1999, et une des ambassadrice de L'Oréal Paris depuis
le dernier festival de Cannes, et thésarde. Au détour d'un <a href="http://abonnes.lemonde.fr/cgi-bin/ACHATS/ARCHIVES/archives.cgi?ID=10620813a8a088d05e4cc46d23ae00e2d2af97e7d7500948">
article du ''Monde''</a> du 21 mai, elle avoue être <em>"fan des
escarpins"</em>, elle en a une centaine <em>"pour aller avec mes quinze paires
de prothèses de jambes"</em>. Aimee Mullins, Américaine de 34 ans, née sans
péronés, revendique son port de prothèses.</p>
<p>Son discours est troublant, et militant. Il illustre ce passage étonnant du
handicap à la <em>"cosmétique augmentée"</em>, avec un discours radical. Après
tout, <em>"Nous avons déjà nos prothèses: nos portables, ordinateurs... Pamela
Anderson a sans doute plus de prothèses (des implants issus de la chirurgie
esthétique, ndcc) dans son corps que moi. Un jour, nous aurons des membres sous
garantie avec option ,des prothèses au choix dans nos armoires"</em>,
assure-t-elle. On sourit à l’évocation de la série <em>L’Homme qui valait 3
milliards</em> avec Lee Majors, où le héros se voyait poser des membres
bioniques décuplant ses forces. Sûr, les robots ne nous remplaceront pas.</p>
<p><em>"Un homme diminué devient un homme augmenté". "Bienvenue dans un monde
où votre corps sera réinventé"</em>... Malgré des assertions qui flirtaient
parfois avec les slogans accrocheurs, le docu diffusé jeudi soir sur France 2
était passionnant, nous poussant dans nos retranchements. <strong><em>"Un homme
presque parfait"</em></strong> esquissait l'<strong>homme augmenté du
futur</strong>, alors que la robotique, l'intelligence artificielle, la
sélection génétique et la bionique débarquent dans les labos. Et suscitent
nombre de fantasmes sur l'"humain augmenté" du futur, où le hasard n'aura plus
sa place. Ce documentaire de Cécile Denjean nous plonge progressivement dans le
<em>trash technologinique du futur</em>, ou comment améliorer les performances
du corps humain par la technologie. Au détail près que l'on n'est plus
seulement dans une univers à la George Orwell : le futur, c’est - presque
- déjà maintenant. En le voyant, mes vieux démons <a href="https://blog.miscellanees.net/post/2011/01/02/Et-si-la-science-fiction-%C3%A9tait-has-been">sur la
science-fiction</a> et l'homme bionique du futur auquel rêvent les <a href="https://blog.miscellanees.net/post/2011/02/11/jesuismort">transhumanistes les plus fous</a> m'ont
rattrapée.</p>
<p><strong>Hommes bioniques "implantés"</strong></p>
<p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/big_femmeaugmentee.jpg6.jpg" alt="big_femmeaugmentee.jpg6.jpg" title="big_femmeaugmentee.jpg6.jpg, juin 2011" /></p>
<p>Bienvenue donc dans un monde du futur où tous vos gènes sont sous contrôle
et soigneusement réinventés, et où le hasard n'a plus sa place. Dans cette
enquête très documentée, Cécile Denjean est allée dans plusieurs labos en
Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, pour voir des chercheurs passionnés de
cybernétique, ou qui flirtent avec l'euphorie eugéniste.</p>
<p>Premier exemple: cet Allemand, le <em>"premier homme bionique
d'Europe"</em> : amputé des deux bras suite à une décharge électrique de
20 000 volts, il a accepté de se faire greffer une prothèse inédite. Grâce à
une puce, son cerveau contrôle un bras artificiel avec des capteurs
ultra-sensibles. Le premier pas vers le cyborg... Il cite d'ailleurs
Schwarzenegger en mode <em>Terminator</em> comme modèle. De fait, il a
participé à un programme, Revolutionize prosthetics. Oh, étrangement, un
programme initié aux Etats-Unis par la DARPA( Defense Advanced Research
Projects Agency (DARPA) au début des années 2000: destiné aux militaires qui
rentraient amputés du front d'Irak, vante l'organisme <a href="http://www.darpa.mil/Our_Work/DSO/Programs/Revolutionizing_Prosthetics.aspx">sur
sa page d’accueil</a>. Mais cela esquisse aussi le soldat bionique du futur.
Flippant.</p>
<p>Au fil du documentaire, on nous égrène ces exemples de particuliers qui
acceptent de tester ces innovations scientifiques. Nathalie, qui <em>"a été
implantée il y a un an"</em> (notez le nouveau vocable qui émerge) : ses
électrodes à la clavicule et au cerveau sont destinées à mettre fin à des
troubles obsessionnels compulsifs sévères. Elle se sent "<em>normale, pas du
tout bionique"</em>. Aux Etats-Unis, à Huston, des chercheurs ont implanté 100
électrodes dans le cortex moteur d'un paraplégique. Il peut ainsi faire des
gestes virtuellement qui s'affichent sur un écran.</p>
<p><strong>Castes technologiques</strong></p>
<p>Mais par petites touches, la technologie réparatrice vire vers une
technologie de tri. "Une science de plus en plus invasive pénètre au coeur de
l'humain", avertit Cécile Denjean. La limite entre ceux qui soignent et ceux
qui augment , transforment, remodèlent, est de plus en plus floue. Dans un
univers où les publicités, affiches et icônes de papier glacé qui nous
susurrent à l'oreille la nécessité d'avoir un corps svelte, jeune, non-soumis
au vieillissement, parfait.</p>
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<p>Eh oui, <strong><em>Bienvenue à Gatacca</em></strong>: ce film de où l'on
distingue des "élus" à partir de leur patrimoine génétique, consciencieusement
trié, préfigure une réalité qui n'est déjà plus vraiment de la science-fiction.
Vous vous souvenez sans doute de cette séquence-culte où le généticien annonce
aux futurs parents qu'il s'est "permis" d'éliminer quelques "gènes"
supplémentaires. Promis, "c'est le meilleur de vous-même" qui a été
retenue...</p>
<p>A Los Angeles et à Hollywood, temple de la chirurgie esthétique, vous avez
déjà le choix : mères porteuses sur catalogue, incubateurs d'embryons, et
même possibilité de choisir le sexe - et plus - de son enfant. De fait,
quelques labos très privés proposent un diagnostic préimplantatoire à partir
d'une biopsie sur les embryons. Le circuit est parfaitement organisé pour les
couples en quête de l'enfant parfait, avec même... un service financier pour
monter un emprunt sur mesure, montre le documentaire. Car la "facture" est
salée: 18 490 dollars pour le diagnostic préimplantatoire pour choisir le sexe
de l'enfant, et jusque 30 000 dollars pour choisir la couleurs des yeux ou des
cheveux. <em>"C'est le bien de consommation ultime, que nous aurons pour
toujours"</em>, lâche un futur père dans le docu, avec une inconscience
absolue. Brrr. La brèche est déjà ouverte: en Angleterre, des médecins ont
accepté d'enlever des embryons qui auraient risqué de faire loucher
l'enfant.</p>
<p>Il faut voir là d'inquiétantes prémices à un <strong>eugénisme
génétique</strong>, qui posent de vertigineuses questions éthiques. Si on
élimine la fin et le hasard, on élimine le sens de la vie, et donc de la
mort.</p>
<p>Et cela est déjà en route: des chercheurs ont réussi à concevoir un
<strong>utérus artificiel</strong>, telle le professeur Hung-Ching Liu de
l’université Cornell à New-York, qui annonce en 2002 qu’elle a réussit à
implanter un embryon humain sur un utérus artificiel qu’elle avait
préalablement créé. Le chercheur Thomas H Shaffer a mis au point un liquide
amniotique artificiel permettant de sauver les bébés prématurés. Pour vérifier
la viabilité de cet utérus artificiel, la scientifique y a implanté des
embryons obtenus par Fécondation In Vitro (FIV). Ils ont bien accroché et ont
commencé à se développer. La législation actuelle n’autorisant pas
l’expérimentation sur l’embryon au delà de 6 jours, ceux-ci ont finalement été
détruits. La polémique a été énorme. Mais la boîte de Pandore est ouverte: elle
a ouvert la brèche à l’ectogenèse qu'avait imaginé Aldous Huxley: on sait que
cela est faisable. Même si Valérie Pécresse, dans un rapport pour l’
information sur la famille et les droits des enfants, a clairement montré
qu’elle était contre l’ectogenèse, la comparant au clonage.</p>
<p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/.20090814_kevin_warwick_002_m.jpg" alt="20090814_kevin_warwick_002.jpg" title="20090814_kevin_warwick_002.jpg, juin 2011" /></p>
<p>En Grande-Bretagne, Kevin Warwick, professeur de cybernétique à l'Université
de Reading près de Londres, est devenu le <strong>premier cyborg</strong> après
s’être implanté une puce dans le bras pour mieux comprendre les liens que
pourraient à l’avenir tisser l’homme et la machine. Il s'est fait implanter une
puce RFID dans son bras gauche pour s'identifier et commander la domotique de
son labo, puis une seconde puce dans son bras, doté d'une main artificielle,
qui est connectée à son système nerveux.</p>
<blockquote>
<p>Après 6 semaines d’entrainement, pour que son cerveau et ses muscles
apprennent à maîtriser le système, il a réussi à détecter des objets les yeux
fermés quand ceux-ci étaient capables d’envoyer des informations à son capteur,
à faire bouger une main robotique mimant les mouvements de la sienne à l’autre
bout du monde, via l’internet, et à développer de nouvelles manières de
communiquer, notamment avec sa femme, relate <a href="http://www.internetactu.net/2008/02/27/kevin-warwick-ou-commence-la-machine-ou-finit-lhomme/">
InternetActu</a>.</p>
</blockquote>
<p>Des dingues radicaux en rêvent déjà : les <a href="https://blog.miscellanees.net/post/2011/02/11/jesuismort">transhumanistes</a>, qui croient dur comme fer en
la capacité des technologies à améliorer l'être humain. Ils ont déjà leurs
"centres de recherches", comme à la <a href="http://en.wikipedia.org/wiki/Singularity_University">Singularity
university</a>, sur le campus de la Nasa dans la Silicon Valley. Alors qu'il y
a une longue frontière - à ne pas franchir - entre science-fiction et science
au service du business...</p>"Nous sommes tous des cannibales"urn:md5:39d6e187f98a52aae084a936ba4b77622011-02-28T19:10:00+01:002011-02-28T22:42:32+01:00Capucine CousinAnthropophagieCannibalismeCranachMaison RougeTranshumanisme <p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/.diable_m.jpg" alt="diable" title="diable, fév. 2011" /></p>
<p>Lady Gaga qui se présente aux MTV Video Music Awards vêtue d'une robe de
viande saignante, le succès auprès des ados de <em>Twilight</em> et des romans
de vampires, les 33 mineurs qui "auraient <a href="http://www.google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5iJxsqjaS9QlXaVK95ZaB7-iSfEMg?docId=CNG.dc40971e705c15d56d4aff2de625132f.611">
songé au cannibalisme</a>", sans compter de récents "faits divers" , telle la
pulsion cannibale de Nicolas Cocaign, sur laquelle @AbstraitConcret est revenu
récemment dans <a href="http://www.abstrait-concret.com/2011/01/25/sur-les-traces-sanglantes-du-cannibalisme-moderne/">
ce passionnant billet</a>... Pas de doute, <strong>cannibalisme</strong> (qui
"se pratique en groupe avec un rituel ou comporte tout du moins un tenant
culturel", rappelle @AbstraitConcret) et <strong>anthropophagie</strong> (acte
d’un individu isolé, dépourvu de cérémonie) sont plus que jamais omniprésents,
aussi bien dans la création artistique pointue que l'entertainment.</p>
<p><strong>Inhumanité et nihilisme</strong></p>
<p>J'en suis ressortie hier midi secouée. La Maison rouge (la bien-nommée...)
propose "<a href="http://www.lamaisonrouge.org/spip.php?article726">Tous
cannibales</a>", une étonnante exposition sur la chair et le cannibalisme dans
l'art. Des classiques comme Cranach aux artistes contemporains, 47 artistes
sont mis en avant dans cette expo sauvage et violente, qui vous prend aux
tripes - c'est parfaitement le but recherché. Qui montre que le cannibalisme
peut être trash, provocateur, mais aussi profondément nihiliste. Car ce
phénomène, particulièrement tabou en Occident, en dit long sur la nature
humaine - et fascine, étant une forme de crime ultime à la lisière de
l'inhumanité, de l'animalité.</p>
<p>Surtout, de tous temps, la représentation de la dévoration a permis aux
artistes de <strong>dénoncer la violence de la société</strong>. Le sujet est
d'autant plus omniprésent que l<em>'"on vit dans une époque aseptisée, où l'on
procède à la chirurgie esthétique, au clonage, on assiste au retour de
l'anorexie ; on quitte son cors pour un autre. Et, dans le même temps,
l'homme contamine son espace vital et ce dont il se nourrit (vache folle,
biosphère..)"</em>, expliquait très justement Jeanette Zwingenberger,
commissaire de l'exposition, dans une interview à <em>Télérama</em> cette
semaine. Bref, à ses yeux, la femme bionique <a href="https://blog.miscellanees.net/post/2011/02/12/%C2%ABElle%C2%BB%2C-ou-la-chirurgie-plastique-pour-les-nulles">
accro à la chirurgie esthétique</a>, la fascination pour les tatouages,
piercings et autres formes de <strong>scarification</strong>, voire le <a href="https://blog.miscellanees.net/post/2011/02/11/jesuismort">transhumanisme</a> relèvent du même
phénomène.</p>
<p><strong>Ingestion, injection, greffe, transplantation</strong></p>
<p>Y a-t-il une différence réelle entre ingérer le corps de l'autre et en
introduire volontairement des parties ou des substances dans son propre corps,
par injection, greffe ou transplantation ? Il existe peut-être d'autres
formes de cannibalisme, sous d'autres formes, parmi nous, voilà ce que veut
nous démontrer cette expo très provoc'. Et nous pousser dans nos
retranchements.</p>
<p><em>"Nous sommes tous des cannibales. Après tout, le moyen le plus simple
d'identifier autrui à soi-même, c'est encore de le manger"</em>. Voilà ce
qu'écrivait Claude Levi-Strauss dans <em>La Repubblica</em> en 1993, pour qui
l’anthropophagie des peuples indigènes d’Océanie ou d’Afrique était un
équivalent à l’eucharistie ou aux transferts d’organes pratiqués en
Occident.</p>
<p>Il y a d'abord, bien sûr, les <strong>mythologies</strong> les plus
anciennes de la dévoration: depuis la déesse Kali,Tantale et Polyphème qui font
acte d'anthropophagie, ou Saturne (Chronos dans la mythologie romaine) qui
dévore ses enfants à leur naissance, pour éviter que ne s'accomplisse la
prédilection selon laquelle il serait détrôné par l'un d'eux...</p>
<p>De ce masque rouge de Giovanni Battista Podesta, une représentation du
diable peu éloignée de celles du Moyen-Age, en passant par une gravure de Lucas
Cranach L'Ancien du loup-garou, où l'homme dévore ses semblables,en passant par
celle du sabbat des sorcières, où celles-ci se livrent à des rites et des
orgies et s'abreuvent de sang (Goya s'en inspirera) - jusqu'au XVème siècle,
l'anthropophagie est représentée comme une pulsion aux <strong>origines
maléfiques</strong>, qui menacent la société et l'Eglise.</p>
<p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/.gargantua_s.jpg" alt="gargantua.jpg" title="gargantua.jpg, fév. 2011" /></p>
<p>Même dans des gravures d'époque, le <em>Gargantua</em> de Rabelais est
représenté s'empiffrant joyeusement de bonshommes...</p>
<p>Sans compter le (faussement) univers des contes pour enfants, d'Hansel et
Gretel et l'ogre dévorant ses enfants, au Petit Chaperon Rouge...</p>
<p>Une autre vision du cannibalisme succède au XVème siècle, lors des grandes
explorations: des Antilles à l'Amérique, puis sur les premières photos du XXème
siècle: des photos de "sauvages" primitifs, où le cannibalisme est assimilé à
un instinct primitif, proche de l'état animal: une vision colonialiste que
véhiculent alors les photos "ethnographiques", dont celles prises par les
frères Dufty sur les îles Fidji.</p>
<p>Au XVIIIème siècle, la cannibale prend aussi la figure du <strong>buveur de
sang</strong>: vampire popularisé par les contes et légendes populaires, depuis
les contes pour enfants pour Grimm, et par Bram Stoker - repris à l'infini au
cinéma, depuis le puissant muet <em>Le Vampire</em> de Murnau au gothique
<em>Dracula</em> de Francis Ford Coppola.</p>
<p><strong>Société de consommation</strong></p>
<p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/.viande_m.jpg" alt="viande" title="viande, fév. 2011" /></p>
<p>Mais l'expo va bien plus loin qu'un passage en revue de l'art classique.
Elle montre l'omniprésence du cannibalisme dans l'art contemporain - les
artistes en font un relais destroy de messages non moins percutants. En 1987,
Jana Sperbak revêt cette robe de chair (concept récemment repompé par Lady
Gaga, comme je le disais plus haut), <strong>parure comestible et
périssabl</strong>e, à notre image.</p>
<p>Avec le moulage d'un corps obèse qui se vide sur le sol, "Fatman", John
Isaacs représente toute la cruauté de la société de consommation.</p>
<p>A coup sûr, le cannibalisme permet de remettre en cause des piliers sociaux
- dont l'Église, bien sûr. La commissaire de l'expo a ainsi choisi d'inclure la
tétée: le petit dévorant sa mère. Une manière de voir les choses... Côté
classique est ainsi exposée une <em>Vierge à l'Enfan</em>t d'un atelier de
l'Europe du Nord du XVème siècle, qui nourrit l'enfant Jésus.</p>
<p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/cannibales-artistes-passent-table-L-zYqj_R.jpeg" alt="cannibales-artistes-passent-table-L-zYqj_R.jpeg" title="cannibales-artistes-passent-table-L-zYqj_R.jpeg, fév. 2011" /></p>
<p>Œuvre côtoyée par des cousines plus trash: une photo de Cindy Sherman
représente une madone sans enfant qui tend un sein, étrange prothèse à
l'artificialité évidente. Quelques mètres plus loin, une photo (<em>"Lait
miraculeux</em>") de Bettina Rheims de sa série «Chambre close» de 1992, où
l'on voit une jeune femme coiffée d'un voile noir et habillée d'un
soutien-gorge d'allaitement, offrant au regard un sein volumineux dont coulent
quelques gouttes de sang...</p>«Elle», ou la chirurgie plastique pour les nullesurn:md5:3ce94651d307c0bb2d26e331daca9ab62011-02-13T11:08:00+01:002011-02-13T11:43:23+01:00Capucine CousinMédiasChirurgie esthétiqueDéontologieEllePubliTranshumanisme <p>Je vous parlais cette semaine de <a href="https://blog.miscellanees.net/post/2011/02/11/jesuismort">transhumanisme</a>, il y a une certaine
continuité avec le sujet ci-dessous. Prémisse possible à la <strong>femme
bionique du futur</strong>, dont la quête de la perfection physique passe par
le recours à la science - au bistouri donc.</p>
<p>Cela tombe bien, <em>Elle</em> de la semaine dernière y consacrait un
(effrayant) dossier. Avec pour point de départ un marronnier ("Spécial
rajeunir"), sur une vingtaine de pages, <em>Elle</em> nous laisse à penser que
le recours à la chirurgie esthétique est la norme - eh non, vous n'y échapperez
pas !</p>
<p>Étonnamment (enfin non...), dans ce numéro, les <strong>publicités pour les
crèmes et sérums anti-âge</strong> sont surreprésentées: une dizaine de pubs
(contre 3 dans le <em>Elle</em> suivant). Ah, et également, une pub pour la
solution d'acide hyaluronique Juvéderm (labo Allergan). Bien sûr, il n'y a pas
de pubs pour des labos ou les cliniques spécialisées en chirurgie esthétique -
le Code de Déontologie Médicale le leur interdit... On imagine d'autant mieux
la satisfaction des ((nombreux) médecins, chirurgiens et autres dermatos
spécialistes à être <strong>cités comme "experts"</strong> dans
<em>Elle</em> !</p>
<p>J'ai demandé à une de mes collègues, <strong>Delphine Le Goff</strong>,
journaliste médias à <em>Stratégies</em>, qui avait elle aussi quelque peu
halluciné en feuilletant <strong>Elle</strong>, d'analyser avec son regard la
<strong>ligne éditoriale</strong> adoptée par le féminin sur ce sujet. Cela
tombe bien, <em>"Magazine junkie"</em>, elle revendique <em>"une addiction au
papier glacé"</em>. La presse féminine, française ou anglo-saxonne, faisant
partie de ses plaisirs coupables. Je lui laisse la parole...</p>
<pre>
- -
</pre>
<p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/.Elle_m.jpg" alt="Elle" title="Elle, fév. 2011" /></p>
<p><strong>C</strong>’est un grand classique de la presse féminine, comme les
«Spécial Mode» et les «Spécial Maigrir». Mais cette année, <em>Elle</em> a
franchi un cap avec son numéro « Rajeunir », sorti le 4 février dernier.
Déjà, le discours a subtilement changé. Là où, jadis, on promettait aux
lectrices mille sortilèges afin de <em>«rester jeune»</em>, là, il s’agit
carrément de <em>«gagner au moins dix ans»</em>...</p>
<p><strong>D</strong>ès la couverture, on a du mal à s’empêcher de rire :
c’est Demi Moore qui a les honneurs de la «Une». <em>«Je vis les plus belles
années de ma vie»</em>, déclare l’actrice de 48 ans. On l'espère pour
elle : l’actrice est connue pour être refaite du sol au plafond avec,
paraît-il, 250 000 euros de chirurgie esthétique ! Le portrait consacré à
l’actrice reste extrêmement discret sur ce point : <em>« Si retouches
il y a (elle refuse d’en parler), elles sont nickel. Son front est lisse, mais
quelques petites rides, qui plissent joliment autour de ses yeux mordorés et
une microcicatrice sur la joue montrent qu’elle maîtrise les limites du genre
dans un milieu où la chirurgie et le Botox sont des drogues »</em>.</p>
<p>Un peu plus loin, Demi nous donne gentiment les secrets de sa jeunesse
éternelle : <em>« Je souris beaucoup : ça rehausse le visage et
l’être en général. Je me nourris bien, j’évite les sucreries, je bois
énormément de lait de coco et je fais du sport »</em>. Merci du tuyau,
Demi.</p>
<p><strong>«Réflexes esthétiques», ou comment faire de la chirurgie une
norme</strong></p>
<p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/.specialrajeunir_m.jpg" alt="specialrajeunir.JPG" title="specialrajeunir.JPG, fév. 2011" /></p>
<p><strong>M</strong>ais si on en croit les pages du dossier « Spécial
Rajeunir » qui suivent, le sourire et le lait de coco, ça ne va pas
suffire. Les sujets ont quasiment tous des relents de salles d’opération. A la
question «<em>Le "liquid lift" va-t-il tuer le lifting ?»</em>, la réponse
semble être non, avec cet argument savoureux: <em>«le lifting n’est pas si
cher. Il coûte 5 000 euros, mais les injections c’est non-stop !»</em>.</p>
<p>Plus loin, dans l’article « Crèmes, piqûres : ce que les médecins
choisissent pour elles », des dermatologues et des chirurgiennes esthétiques
exposent leur propre traitement anti-âge. Tiens donc ! Elles passent
quasiment toutes par la case <em>«lifting dans quinze ans»</em>, <em>«Toxine
botulique trois fois par an»</em> ou <em>«chirurgie des paupières»</em>.</p>
<p>Une série de portraits intitulée <em>« Elles ont tout compris
!</em> » montre des femmes de 36 à 66 ans et leurs <em>«réflexes
esthétiques »</em>. Là aussi, on est noyé sous la toxine botulique, la toxine
hyaluronique (à ne surtout pas confondre, semble-t-il) et les projets de
chirurgie. Dans ce numéro qui pourrait s’intituler « La chirurgie
plastique pour les nulles », on nous explique même comme lire un devis d’acte
esthétique avant ravalement, avec un glossaire «Spécial débutantes» pour bien
faire la différence entre laser antitâche, laser fractionné, peeling moyen,
méso-réjuvénation…</p>
<p><strong>Pacte faustien</strong></p>
<p><em>Elle</em> essaie bien de nuancer son propos, avec un papier sur les
ratés de la chirurgie («Ça devait me rajeunir, ça me vieillit», ah oui, c’est
fâcheux !) et cette question, aux accents quasi-métaphysiques : «Le Botox
rend-il heureuse ?». Soulagement pour l’accro aux injections : aux
Etats-Unis (grande patrie de la chirurgie et du Botox) certains médecins
affirment que la toxine botulique, qui a décidément tout pour plaire, est un
remède contre la dépression…</p>
<p>En attendant, ce qui est vraiment déprimant, c’est la lecture de ce numéro,
anxiogène au possible. Est-il possible de vieillir sans passer par le billard,
et sans débourser des milliers d’euros ? Etrange <strong>pacte
faustien</strong> que celui de <em>Elle</em>, qui en adoptant ces injonctions à
la jeunesse éternelle, semble avoir vendu son âme aux chirurgiens plastiques.
On ne peut s’empêcher de penser à la scène mythique du film <em>Brazil</em>, où
la mère du héros, obsédée par son apparence, se fait étirer exagérément le
visage. C’est peut-être cette femme, en fait, que <em>Elle</em> aurait du
mettre en couverture…</p>
<p><strong>Delphine Le Goff</strong></p>Même pas mort dans ma deuxième vie numérique !urn:md5:44d65cca213c021aa01a93ba169083d82011-02-11T14:07:00+01:002011-02-13T15:10:24+01:00Capucine CousinR&D, innovations23AndMeFacebookmind uploadingTotal RecallTranshumanisme <p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/IMAGE1.jpeg" alt="IMAGE1.jpeg" title="IMAGE1.jpeg, fév. 2011" /></p>
<p><strong>A</strong>vez-vous déjà songé à ce que pourront devenir vos mails,
vos tweets, votre page Facebook ou votre blog une fois passé à trépas ? Le
fantôme de votre double numérique continuera-t-il à hanter le cyberespace à
coup de posts automatiques et de <em>"c'est votre anniversaire"</em> sur le
"Social Network"? Votre compte Twitter continuera-t-il à vivre alimenté par des
posts en 140 signes robotisés ou sera-t-il usurpé par un proche ou un inconnu
entretenant l'illusion pour vos 4000 followers ? Sans y penser, vous semez
chaque jour, à chaque heure, parfois à chaque minute les traces de votre
existence et de vos pensées sur les dizaines de milliers de serveurs qui font
battre le cœur du Réseau. Et vous assurez ainsi une postérité numérique, une
forme d'immortalité sans précédent dans l'histoire de l'humanité. Demain, à
partir de cet ADN digital, vos descendants pourront peut-être recréer votre
personnalité sous la forme d'un avatar "3D" doté d'une intelligence
artificielle avec qui ils pourront conserver: <em>"C'était comment mon Aïeul au
début du XXIème siècle ? Et qui était cette femme que tu as tant aimé
?"</em>.</p>
<p>Encore plus fou, n'avez-vous jamais rêvé (ou cauchemardé) de renaître à la
vie par la grâce d'une manipulation de votre ADN biologique cette fois, cloné
par quelque savant fou qui donnerait naissance à un Golem de chair qui serait
un deuxième vous-même ? Et si d'aventure il était possible un jour de
"sauvegarder" votre conscience, ce pur esprit que les croyants appellent l'âme,
pour la télécharger sur un disque dur et ressusciter des morts tel Lazare sous
la forme d'un homme-machine que l'on appelle Cyborg ?</p>
<p>Le sujet est troublant, dérangeant. Pourtant, il faudra bien se pencher
dessus, alors qu’un business commence à émerger autour de la gestion de votre
vie numérique, de l’archivage de votre vie numérique, avec notamment le
<a href="http://monecranradar.blogspot.com/2011/01/total-recall-votre-vie-numerisee-pour.html">
projet Total Recall</a> ourdi par un Docteur de Mabuse de Microsoft. Votre vie
numérisée pour l'éternité, l’immortalité digitale, la transcendance de
l'humanité et son "augmentation" par la machine...Justement, il en était
question au cours de la soirée <a href="http://ownilive.com/2011/02/02/jesuismort-une-soiree-experience-a-la-cantine/">
#jesuismort</a> , organisée mardi à La Cantine par nos amis de L'Atelier des
Médias de RFI, Silicon Maniacs et Owni. Une soirée-débat particulière, avec des
invités étranges (entre autres un président de l'Association Française
Transhumaniste, un membre de la Singularity University...) où l’on a beaucoup
causé immortalité et <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Transhumanisme">transhumanisme</a>, cette
mouvance culturelle qui prône l'usage des sciences et des techniques pour
améliorer les caractéristiques physiques et mentales des êtres humains.</p>
<p>Un truc de doux dingues ? Pas si sûr quand Eric Schmidt <a href="http://monecranradar.blogspot.com/2010/10/lhomme-augmente-selon-googlevers-une.html">
de Google</a> s'y met: <strong><em>"Ce que nous essayons de faire c'est de
construire une humanité augmentée, nous construisons des machines pour aider
les gens à faire mieux les choses qu'ils n'arrivent pas à faire
bien"</em></strong>...</p>
<p>Cela faisait donc longtemps que nous voulions nous pencher sur ce sujet
existentiel et vertigineux avec mon confrère blogueur et journaliste <a href="http://monecranradar.blogspot.com/">Jean-Christophe Féraud</a>. A la faveur de
l'évènement #Jesuismort, nous avons donc décidé d'écrire ce billet en commun et
de l'accueillir sur nos blogs respectifs (vive les billets co-brandés ;)</p>
<p><strong>Cimetière post-mortem</strong></p>
<p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/IMAGE2.jpeg" alt="IMAGE2.jpeg" title="IMAGE2.jpeg, fév. 2011" /></p>
<p><strong>N</strong>os traces numériques esquissent déjà des prémices à notre
postérité digitale. Vous êtes peut-être déjà tombés, au gré de vos
pérégrinations sur Facebook, sur des pages de personnes décédées. J'ai déjà
atterri par hasard sur la page Facebook du frère d'un ami, disparu en mer. Son
wall était resté ouvert, en accès libre, ses amis et sa famille continuaient à
y déposer des messages d’hommage post-mortem. Jean-Christophe a connu la même
expérience suite à la mort soudaine d'un vieil ami
journaliste...Troublant : Facebook devient alors un cimetière, où les gens
développent des <strong>rituels funéraires</strong> virtuels.</p>
<p>Justement, mardi soir à #Jesuismort, Tristan-Mendès France, un temps
assistant parlementaire, maintenant blogueur, documentariste et chargé de cours
au Celsa, nous a longuement parlé de cela – ces rites funéraires qui commencent
à se développer dans des mondes virtuels. La première fois, que cela s’est
produit c'était dans le jeu en réseau "Word of Warcraft" en 2005 : suite
au décès d’une gameuse, un véritable rituel funéraire a été organisé dans le
monde de Warcraft pour lui rendre hommage…</p>
<p>Pour Tristan, c’est sûr, on est face à un véritable « cimetière
virtuel » sur Facebook, qui compterait 5 millions de morts (ou plutôt de
profils de personnes décédées), laissés ouverts, volontairement ou pas, par les
familles. Et de fait : c’est un peu affolant, mais rien n’a été prévu par
les Facebook, Twitter, LinkedIn et autres réseaux sociaux pour supprimer le
profil d’une personne décédée ! Idem pour les plateformes de blogs, les
moteurs de recherche… Au niveau juridique, c’est la jungle. Au point que
quelques sociétés imaginent sûrement des solutions de marchandisation
post-mortem. Imaginez : bientôt, à défaut d’être immortel physiquement,
vous pourrez sans doute vous acheter une immortalité digitale, garder une
présence en ligne, sous la forme d'une concession virtuelle éternelle ou
réduite à 20, 30 ou 50 ans...</p>
<p>Parallèlement, des futurologues, <strong>gourous du transhumanisme</strong>,
tels Raymond Kuzweil, Aubrey de Grey, et autres doux dingues le jurent: la mort
est un phénomène dont on peut guérir. Certains prédisent l’immortalité dans 15
ou 20 ans grâce au séquençage du génome humain, entre autres évolutions
technologiques. Lisez plutôt le Manifeste des Extropiens, une nouvelle religion
conceptualisée par le bon docteur <strong>Max More</strong> :</p>
<p><em>"Nous mettons en question le caractère inévitable du vieillissement de
la mort, nous cherchons à améliorer progressivement nos capacités
intellectuelles et physiques, et à nous développer émotionnellement. Nous
voyons l'humanité comme une phase de transition dans le développement
évolutionnaire de l'intelligence. Nous défendons l'usage de la science pour
accélérer notre passage d'une condition humaine à une condition transhumaine,
ou posthumaine. Comme l'a dit le physicien Freeman Dyson, 'l'humanité me semble
un magnifique commencement, mais pas le dernier mot"</em> (Introduction à
"Principes extropiens" 3.0).</p>
<p>Un délire de l’humain parfait flirtant dangereusement avec l'eugénisme et
l'homme nouveau national socialiste qui a été abondamment inspiré la
Science-Fiction d'avant et d'après guerre, du "Big Brother" d'Orwell au
<em>Meilleur des Mondes</em> d'Aldous Huxley. Et que l'on a vu recyclé dans
plusieurs films, notamment « Bienvenue à Gattaca » où des jeunes gens
au patrimoine génétique parfaits étaient programmés pour partir à la conquête
de l’espace…Pour mémoire, voyez plutôt ce petit extrait:</p>
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
<object type="application/x-shockwave-flash" data="http://www.youtube.com/v/qkcrJ63j-io?fs=1&hl=fr_FR&feature=player_embedded&version=3" width="425" height="350"><param name="movie" value="http://www.youtube.com/v/qkcrJ63j-io?fs=1&hl=fr_FR&feature=player_embedded&version=3" />
<param name="wmode" value="transparent" /></object></div>
<p><strong>Etranges concepts</strong></p>
<p><img src="https://blog.miscellanees.net/public/image3.jpeg" alt="image3.jpeg" title="image3.jpeg, fév. 2011" /></p>
<p>C’est là, que défilent d’étranges concepts survolés lors de la soirée
#Jesuismort. On a brièvement parlé de cryogénisation (vous savez, cette théorie
– très en vogue il y a une dizaine d’années – consiste à se faire congeler pour
ressusciter dans un futur proche ;) : déjà has been. Il fut aussi question
d’ <em>"uploading de l’esprit"</em> ou comment transférer le contenu d'un
cerveau sur disque dur, en l'ayant préalablement numérisé. Un ordinateur
pourrait alors reconstituer l’esprit par la simulation de son fonctionnement,
sans que l'on ne puisse distinguer un cerveau biologique « réél »
d'un cerveau simulé...Totalement naïf et délirant vous diront tous les
neurologues vu la Terra Incognita que reste notre cortex pour la science. Le
concept apparaît pourtant dans "Matrix" et ses suites, mais aussi dans <em>La
Possibilité d’une Ile</em> de Michel Houellebecq, où le "mind uploading" est
évoqué comme un composant de la technique permettant de vivre, jeune, plusieurs
vies successives avec un corps et un esprit identiques. De vaincre enfin
l'<a href="http://monecranradar.blogspot.com/2010/12/ce-que-nous-dit-houellebecq-lhumanite.html">obsolescence
de l'humanité</a>...</p>
<p>Les tenants du transhumanisme y croient dru comme fer: en plein débat sur la
réforme de la loi sur la bioéthique (le texte est en débat au Parlement en ce
moment), ils ne jurent que par les propositions « technoprogressistes ».
Comme par exemple, <em>« autoriser le libre choix de la gestion pour
autrui, notamment dans le cas des mères porteuses »</em>, expliquait mardi soir
Marc Roux, étrange président de l’Association Française Transhumaniste. Pour
lui, c’est simple, <em>« le législateur est très en retard sur ces sujets
»</em>.</p>
<p>Ces délires scientistes autour du transhumanisme connaissent déjà quelques
prémisses. Vous voulez savoir si d'aventure vous n’avez pas quelques
prédispositions pour avoir un cancer ou la maladie Alzheimer ? Une
kyrielle de start-ups pullulent sur le Net, et vous proposent déjà d’analyser
votre ADN, telle <a href="https://blog.miscellanees.net/post/2008/06/08/Google-Google-Health-23andMe">23AndMe</a> (oh tiens donc,
fondée par l’épouse de Sergey Brin, un des fondateurs de Google…on y
reviendra), d’explorer votre patrimoine génétique, ou plus prosaïquement de
faire un test de paternité. Quitte à conserver dans leurs bases de données ces
précieuses données très intimes vous concernant… au risque de les revendre dans
quelques années.</p>
<p><strong><em>"J'ai vu tant de choses que vous humains ne pourrez pas croire.
De grands navires en feu surgissant de l'épaule d'orion. J'ai vu des rayons
fabuleux, des rayons C, briller dans l'ombre de la porte de Tannahauser.Tous
ces moments se perdront dans l'oubli. comme les larmes dans la
pluie..."</em></strong>, déclamait Roy, le répliquant de "Blade Runner" qui,
comme nous pauvres humains, ne voulait pas mourir. Il s'est trompé
peut-être...</p>
<p>Pour conclure, voici un extrait de ce bouleversant monologue de Fin:</p>
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
<object type="application/x-shockwave-flash" data="http://www.youtube.com/v/i-XDaYPlCuE?fs=1&hl=fr_FR&feature=player_embedded&version=3" width="425" height="350"><param name="movie" value="http://www.youtube.com/v/i-XDaYPlCuE?fs=1&hl=fr_FR&feature=player_embedded&version=3" />
<param name="wmode" value="transparent" /></object></div>
<p><strong>Capucine Cousin et Jean-Christophe Féraud</strong></p>