Scarlett Johansson vs Disney: comment Mickey compromet lourdement le cinéma en salles

b6410de835a63eeaaadc940698c03f9c.jpeg, août 2021

Scarlett Johansson voudrait-elle la peau de la firme aux grandes oreilles ? C'est bien une des stars les mieux payées d'Hollywood qui a annoncé la semaine dernière poursuivre Disney en justice, pour sa décision de sortir le film Black Widow sur sa plateforme de streaming Disney+ en même temps que dans les salles de cinéma. De fait, les abonnés - des Etats-Unis - à Disney+ peuvent visionner le blockbuster sur la plateforme moyennant un coût supplémentaire de 30 dollars, en plus des 8 dollars d'abonnement mensuels.

Rupture de contrat pour l'actrice

Selon l’actrice américaine, dans sa plainte déposée auprès de la Cour de Los Angeles, cette sortie simultanée constitue une rupture de son contrat avec Marvel et un manque à gagner de 50 millions de dollars. La somme qu'elle aurait gagné 50 millions de dollars si le film avait atteint le milliard de dollars de ventes. Car son contrat prévoyait un intéressement sur les seules ventes de tickets en salles - et non sur des connexions à un des principaux concurrents de Netflix. Son avocat n'a pas manqué de souligner que le patron de Disney, Bob Chapek, avait décroché des actions équivalent à 3,8 fois ses 2,8 millions de dollars annuels de salaire de base pour travailler sur de «nouvelles offres de programmes» pour la plateforme de streaming, relève Bloomberg.

Au passage, The Hollywood Reporter indique aujourd'hui que d’autres stars, telles Emma Stone et Emily Blunt, pourraient prendre la même décision que l’héroïne d'Avengers et poursuivre Disney. Car un autre blockbuster estival de la firme, Jungle Cruise, distribué sur le même mode, totalisait dernièrement 61,8 millions de dollars de chiffre d'affaires... Dont 30 millions sur la seule plateforme Disney+.

Le contrat daté de 2017, signé entre les studios Marvel et Pariwinkle Entertainment, prévoyait une sortie exclusivement en salles de Black Widow, pour 90 à 120 jours, selon la plainte. Un contrat «à l'ancienne» donc, qui avait été négocié bien avant le tsunami de la pandémie - avec celle-ci les confinements et la fermeture forcée de salles de cinéma partout dans le monde. Et le bouleversement qu'elle a introduit chez les principaux studios de cinéma, qui ont revu à l'arrache, fin 2020, le mode de distribution de leurs films. Comme je l'écrivais alors dans ce billet, la Warner et Disney notamment, ont alors décidé de sortir une bonne partie de leurs films simultanément sur plateformes et en salles - du moins sur le territoire américain.

Un brin désarçonné face à la prise de position de l'actrice, Disney a répliqué avec agressivité, jugeant «la plainte particulièrement triste et éprouvante parce qu'elle ignore l'impact mondial horrible et prolongé de la pandémie de Covid-19», dans un communiqué. Et précisant que l'actrice avait déjà gagné 20 millions de dollars du film. En fait, comme beaucoup de studios hollywoodiens, Disney privilégie de plus en plus le streaming comme source de revenus futurs.

Disney veut-il compromettre la sortie en salles ?

Avec cette affaire, on en voit un autre contrecoup de ce changement précipité de la chronologie des médias auquel s'essaient certains studios. Au risque, peut-être, de compromettre les salles de cinéma. Comme attendu, La veuve noire est un des succès de cet été. près le premier week-end d'exploitation de Black Widow, Disney avait publié un communiqué affirmant que le film avait récolté «plus de 60 millions de dollars» rien que sur Disney+. A ce jour, il a réalisé un chiffre d'affaires total de 167 millions de dollars aux Etats-Unis et au Canada, et 343,6 millions dans le monde, selon Box Office Mojo. A contrario, les experts du box-office considèrent que les chiffres décevants – selon les standards des films Marvel – sont en partie dus à la sortie simultanée du film en streaming. Le ver est peut-être déjà dans le fruit.