A qui appartient une photo sur Twitter ?

HaitiOK.jpg

Une femme sortie des décombres dans la capitale haïtienne © AFP/DANIEL MOREL

Le droit d'auteur s'applique-t-il aussi sur une photo postée sur un réseau social tel que Twitter, ou via l'outil de publication Twitpic ? Ou appartient-elle à l'éditeur de ces réseaux ? L'affaire avait fait grand bruit en début d'année, comme j'en parlais alors, l'AFP estimant alors Tous les Twitpics nous appartiennent, après avoir gentiment piqué à un photographe indépendant une photo qu'il avait postée via Twitpic.

Tout était parti de photos postées via Twitpic par Daniel Morel, un photojournaliste qui couvrait alors les manifestations suite au séisme d'Haïti. Un autre utilisateur de Twitter, Lisandro Suero, les a alors mises à disposition. L'AFP les a alors utilisées, et carrément revendues via l'agence Getty Images. Les photos ont été créditées AFP et Lisandro Suero par un certain nombre d'autres agences.

L'affaire a tourné à la bataille juridique. Après avoir écrit à l’AFP en réclamant ses droits, l’agence s’est retournée contre Daniel Morel, en dénonçant une diffamation commerciale et demandant une déclaration d'absence de contrefaçon.

Ce que vous postez sur Twitter ne vous appartient plus (pour l'AFP)

Pour l'AFP, en mettant à disposition des photos sur Twitter ou Twitpic, un photographe accorde de facto une licence à toute personne qui voudrait utiliser ces photos, comme le spécifierait une mise à jour récente du règlement de Twitter. En clair, pour l'AFP, ce que vous postez sur les réseaux sociaux, en particulier sur Twitter, ne vous appartiendrait plus. C’est la position que soutient en tous cas l’agence devant un tribunal du district sud de New York.Cela signifierait-il donc que toute photo postée sur Twitter serait automatiquement réutilisable par n'importe qui ?

ReadWriteWeb US vient de revenir sur l'affaire : les règles d'utilisations de Twitter spécifient certes qu'il peut partager des contenus avec ses partenaires... Ce que l'AFP tente de réinterpréter, comme si tout utilisateur de Twitter était un partenaire - pouvant donc réutiliser les photos.

L'AFP étrangère à l'univers des médias sociaux

Comme le souligne le RWW, en creux, cela révèle une méconnaissance profonde mauvaise compréhension par l'AFP de l'univers des médias sociaux. C'est dans l'esprit même des médias sociaux : si je retweete une photo d'un utilisateur de Twitter, c'est pour la partager - implicitement, sans exploitation commerciale par-derrière par un autre "Twittos" indélicat. Bien loin d'une entreprise de media qui doit gagner de l'argent, qui pioche une photo dans un écosystème, pour ensuite prétendre en être propriétaire, souligne le RWW.

Au passage, l'AFP vient tout juste - en novembre 2010 - de se doter de sa page Fan de sur Facebook, quelques semaines après avoir nommé un journaliste en charge du secteur des médias sociaux. CQFD.

Commentaires

1. Le jeudi 11 novembre 2010, 23:55 par KlarAgira

"Tout était parti de photos postées via Twitpic par Daniel Morel, un photojournaliste qui couvrait alors les manifestations suite au séisme d'Haïti. Un autre utilisateur de Twitter, Lisandro Suero, les a alors mises à disposition. L'AFP les a alors utilisées, et carrément revendues via l'agence Getty Images. Les photos ont été créditées AFP et Lisandro Suero par un certain nombre d'autres agences."

Au-delà de la polémique juridique sur les termes du contrat d'utilisation et compagnie, je trouve cette démarche d'un culot et d'un manque de respect et d'une mauvaise foi ahurissant.

Je suis curieuse d'en connaître les suites. Merci pour cette informatin et ce billet en tout cas.

2. Le vendredi 12 novembre 2010, 00:08 par truffo

C'est quand même un bordel monstre le droit d'auteur sur le Web, il serait temps de faire table rase et de repartir sur un système qui tient la route et dans lequel chacun puisse y trouver son compte.

3. Le vendredi 12 novembre 2010, 00:54 par Florent V.

Le droit d’auteur n’est pas plus un bordel monstre sur Internet qu’ailleurs. Les législations nationales sont parfois complexes, mais elles sont largement harmonisées par des traités internationaux qui font que certains grands principes sont valables dans le monde entier ou presque.

Par ailleurs il y a peut-être une culture de l’accès gratuit sur Internet, qui fait que certains prennent le Web pour une grande marrade collective où on fait ce qu’on veut, mais ce problème existe aussi en dehors du Web (multiples exemples actuels et passés). La contrefaçon n’a pas été inventée avec ce médium.

Pour le reste, je vois mal comment l’AFP peut espérer gagner. Leur lecture des conditions d’utilisation de Twitter est aberrante.

4. Le vendredi 12 novembre 2010, 12:14 par michel v

Les droits d'auteurs c'est compliqué, soit.
On peut décider en interprétant comme on veut qu'on a le droit d'utiliser/diffuser une photo, soit.

Mais je ne vois pas comment on peut défendre le fait d'avoir vendu en son nom une photo d'un tiers trouvée sur internet.

On sort là des problématiques de « fair use » pour entrer dans celles, moins compliquées, du bon vieux vol.

5. Le dimanche 14 novembre 2010, 00:18 par truffo

Au delà de l’aspect gratuit ou plus exactement du financé autrement, il y a quand même un problème propre au média. Je prend l'exemple d'une photo sous droit d'auteurs, je fais un lien vers cette photo pas de soucis, je l'intègre via une iframe ou via URL externe pas de soucis, je l'intègre en faisant une copie problème de droit. 3 cas différents au regard du droit d'auteur mais accès au même contenu

6. Le mardi 16 novembre 2010, 14:43 par Christophe

Heu non pour le coup c'est très simple. Il suffit de lire le Term of Service de Twitter : http://twitter.com/tos

Le contenu appartient à l'utilisateur, mais ce dernier donne une autorisation a priori sur l'ensemble de ses contenus à Twitter (voir les détails de l'autorisation dans le ToS).

Donc les contenus publiés appartiennent à l'auteur. C'est pas plus compliqué que ça juridiquement.