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lundi 2 avril 2018

Prêts à quitter Facebook, vraiment ? (De notre dépendance numérique)

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#deletefacebook. En quinze jours, c'est devenu un des hashtags les plus populaires. Pour beaucoup d'internautes, ça y est, "il est temps de partir", en suivant le conseil d'une poignée de gourous de la Silicon Valley, tel Brian Acton, le co-fondateur de WhatsApp, qui publiait la semaine drnière sur Twitter "Il est temps. #deletefacebook."

Pourtant, l'automne dernier, la Silicon Valley bruissait de mille rumeurs quant à une possible candidature de Mark Zuckerberg à la présidence des Etats-Unis en 2020. Rien de moins. Aujourd'hui, le fondateur de Facebook bataille pour prouver qu'il est capable de diriger une des plus importantes sociétés cotées en Bourse - ou que ses 2,1 milliards d'utilisateurs dans le monde doivent continuer à faire confiance à son entreprise. Avec l'affaire Cambridge Analytica, selon laquelle une société britannique ayant activement participé à la campagne électorale de Donald Trump a tranquillement récupéré les données de 50 millions d'utilisateurs de Facebook (voire 87 millions, aux dernières nouvelles, à voir la fin de ce billet publié par Facebook)) par des moyens suspects, le réseau social est plongé dans une crise de confiance sans précédent. Y compris chez les investisseurs: en quelques jours, il a perdu près de 10% de sa valeur en bourse

Abandonnistes

Path

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Alors, ce n'est pas la première fois: il y a eu des précédents, comme en 2010, lorsque la création du service de géolocalisation par Facebook, Places, a fait polémique. Certes, il y avait eu un mouvement d'abandonnistes de Facebook qui avait émergé. et des sites alternatifs, tels Diaspora (ce site "anti-Facebook, "plus respectueux de la vie privée" lancé en 2010), Places (oui, il existe toujours), Ello, ou Mastodon, né l'an dernier), vite oubliés depuis.

Cette fois-ci, la flambée serait-elle assez importante pour en amener certains à quitter totalement Facebook ? Déjà ces derniers mois, il y a eu les débats sur la propagande et les fake news, face auxquels facebook semblait bien silencieux. Maintenant, les consommateurs prennent conscience des risques qu'il y a à livrer leurs données à un géant du numérique OU une controverse de plus qui montre que leur réseau social préféré laisse d'autres recueillir leurs données personnelles, et viole - peut-etre - leur vie privée.

Non non, bon nombre d'entre eux, d'entre nous se réconcilieront avec Facebook, et y retourneront, comme nous l'avons fait lors des flambées précédentes. Même si, c'est promis, il prendra toutes les précautions. En dix ans - une éternité - depuis la popularisation de Facebook dans l'Hexagone, à l'automne 2007 - nous avons développé une étrange relation avec ce réseau social, tiraillés entre une dépendance (affective) absolue et un rejet, qui nous rend accros. Tout en sachant que ce n'est pas bon pour nous, comme la clope, le chocolat ou d'autres sources d'addictions.

Comme d'autres médias, tels la télévision ou la radio, le média Facebook s'attache notre dépendance par les gratifications qu'il apporte - illusion d'une compagnie, multiplicité d'informations à picorer, relaxation.... Mais Facebook a été le premier média "social", à fournir des outils et méthodes clés en main d'une efficacité diabolique, pour développer notre "sociabilité" (ou popularité) numérique. Et donc nous rendre inéluctablement accros. En reproduisant des schémas psychologiques classiques.

Maintenir son réseau

De façon plus informelle que Linkedin, plus interactive que feu hi5, lorsqu'il est apparu en France en 2007, Facebook était une des premières plateformes qui permettait de se créer un réseau social informel, où des petits outils créaient des interactions, pour renforcer nos liens (virtuels) avec nos "amis" numériques. Le fait de cliquer sur le bouton "J'aime" (un pouce en l'air, comme dans les arènes de gladiateurs jadis), de commenter des photos d'amis (ah, l'époque où le moindre contact sur Facebook postait ses photos de famille ou d'enfants), de les identifier (les "tagger") dans des photos de soirées, ou envoyer des "pokes" (une de ces pratiques sociales propres à Facebook tombée en désuétude) permettait d'amplifier ce fragile "lien social" virtuel créé. Des contacts bien éphémères, de minuscules marques d'intérêt envers des "contacts" Facebook que l'on connaissait parfois à peine dans la vraie vie (IRL).

Et plus incroyable encore, il offrait enfin l'opportunité de tisser une multitude de liens, d'avoir des brassées de nouveaux "amis" virtuels jamais rencontrés dans la raie vie). Comment se résoudre à perdre cette multitude de contacts accumulés virtuellement ces années, en effaçant son profil Facebook ?

Et son "capital social"

Plus vous êtes actifs sur les réseaux sociaux, vous vous géolocalisez (dans les aéroports par exemple), ou postez des photos ou statuts flatteurs, plus votre valeur sociale (pour paraphraser Bourdieu) augmente. Vous êtes disponible, ouvert, pour un nouveau job sur Linkedin, renouer avec des amis d'enfance sur Copains d'avant. Mécaniquement, au fil des années, on a développé une dépendance à cette popularité numérique, la nécessité de façonner cette e-réputation (comme on disait il y a quelques années ;), qui dope l'estime de soi.

Certes, au fil des années et de leur apprentissage aux réseaux sociaux, chacun a appris à partager avec prudence des infos personnelles sur Facebook. La plupart ont banni les photos d'enfants ou réflexions trop personnelles. Mais il est devenu irrésistible de façonner son soi idéalisé: en affichant à quel concert ou quelle expo nous sommes allés, dans quelle destinations idyllique de vacances (avec une multitude de photos à l'appui), quelle cause nous soutenons, à quelle manifestation nous soutenons, ou quelle injustice nous révolte. De cette manière, nous "gérons" notre image numérique.

Laquelle est approuvée, notée par les autres, au fil des Likes, smileys, commentaires et partages.

Validations sociales

Car on ne peut plus passer de ces multiples signaux de notre existence - et popularité - numérique, la même popularité que l'on recherchait dans la cour de récré à l'école. C'était la grande nouveauté des réseaux sociaux et des blogs, dans la lignée des forums de discussions (rappelez-vous les Yahoo! Groups) au début des années 2000: chacun pouvait prendre la parole en direct dans d'immenses agoras virtuelles, au fil de tweets, de statuts ou d’un billet de blog détaillé, participe aux débats du moment. Au fil des années, nous sommes devenus dépendants de ces interactions virtuelles, ces petits signaux qui traduisent des validations externes - notre besoin fondamental de nous sentir aimés.

Stalking et Fear of missing out

Facebook nous a aussi confortés dans un autre comportement universel, plus pervers: l'art d'épier les autres, dissimulés derrière des rideaux numériques, l'écran de nos ordinateurs. Bienvenue dans le stalking, la possibilité d'espionner les autres (son meilleur ennemi, son ex...) en regardant les bouts de vie numérique qu'ils livrent sur leurs walls Facebook.

Ce besoin trivial, primaire, de surveiller les autres, quitte à perdre du temps en cherchant leurs traces numériques sur Google; a été savamment entretenu par les réseaux sociaux.

Ce même besoin psychologiques nous soumet au FOMO (fear of missing out), la peur de manquer quelque chose, entretenue par la réseaux sociaux, dont je parlais déjà dans ce billet en 2014 (qui m'avait alors valu d'être plagiée par Le Nouvel Obs, la gloire ;) Une nouvelle peur qui est née avec les premiers smartphones (remember, le premier iPhone a été lancé en novembre 2017), où l'on a pris l'habitude de consulter plusieurs fois par jour Twitter et Facebook - comme de véritables fils d’informations, nourris en contenu par les commentaires, photos, et autres contenus, postés au fil du temps. Il y a quelques années, un ami, Stan, me disait avec angoisse qu'il avait "peur de louper quelques chose sur Twitter". Et que, "comme allumer la radio", il y jetait un oeil durant quelques minutes, de temps en temps.

Twitter et Facebook sont devenus des sortes de fils d'infos en continu, où nous pouvons surveiller le déroulé de la vie de nos contacts, et de la vie tout court.

Alors, serions-nous prêts à renoncer à tout cela ? Nombre d'articles ont listé ces derniers jours la masse de données que Facebook a amassées sur nous en quelques années, archivage géant de notre mémoire privée et publique. Et tous ces souvenirs virtuels de notre "nouvelle vie" numérique qui risquent de s'évaporer.

dimanche 18 mars 2018

Pourquoi les médias ressuscitent les forums de discussion (sur Facebook)

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Mark Zuckerberg savait sans doute très bien ce qu'il faisait en annonçant, le 11 janvier dernier, que les contenus de la presse (articles, vidéos, Lives) apparaîtraient moins sur les murs des utilisateurs. Priorité était désormais données aux contenus "personnels", des amis et de la famille, plutôt qu'aux pages publiques. Dès lors, panique à bord: au fil des années, les marques et médias avaient capitalisé sur ces Pages Facebook pour retenir (un peu) l'attention de ces internautes versatiles, qui passent désormais le plus clair de leur "temps numérique" sur Facebook - il engrange 26,4 millions de visiteurs uniques quotidiens en France, d'après Médiamétrie. Pendant longtemps, pour une marque ou un média, le nombre de fans était un indicateur en soi.

Les médias, Facebook les a même dragués outrancièrement en les incitant à produire des contenus sur mesure pour lui, de préférence de longues vidéos, baptisées les Facebook Live. Plusieurs éditeurs de presse ont même signé des accords avec Facebook, pour toucher une généreuse rémunération, comme le détaillait cet article très fouillé du journaliste Nicolas Becquet, responsable du numérique à L'Echo. Las, la firme de Menlo Park leur brutalement coupé les vivres fin 2017. On a mieux compris pourquoi ce 11 janvier.

Facebook, un Linkedin bis

Alors, comment les médias vont-ils pouvoir continuer d'assurer leur présence sur Facebook, où ils sont devenus brutalement moins désirables? Une chose est sûre, même si zuck' veut un retour aux sources (refaire de Facebook le média social où on partage des bribes de son quotidien), il est trop tard. Le newsfeed (fil d'actualité Facebook) n'est plus l'endroit où le chaland poste ses précieux contenus personnels - ses photos, vidéos ou statuts pour relater son quotidien. Peut-être parce qu'il est devenu plus méfiant envers Facebook, au fil des scandales et polémiques sur sa perception particulière du respect de la vie privée par ce dernier. Maintenant, la vraie vie se raconte en images sur sa page Instagram, ou Snapchat pour les millenials. Désormais, Facebook a des faux airs de Linkedin-bis: on partage sur son newsfeed des articles, des vidéos d'actualité (coucou Brut), des centres d'intérêt 'publics' ou semi-professionnels.... Mais certainement plus de photos de brunchs entre amis ou de vacances en famille (qui étaient tout de même monnaie courante il y a 10 ans).

Ce dimanche en fin de journée, j'ai sur mon newsfeed, en vrac: un commentaire sportif sur un championnat de foot en Californie, une photo de monument à Riga prise par un ancien photographe avec son iPhone, quelqu'un qui promeut sa formation en vidéo mobile, les photos des nouveaux locaux d'une start-up par son fondateur, une photo de la collection de robots d'une geekette revendiquée, une photo-portrait d'il y a 4 ans repostée (sur la suggestion de Facebook ;), un partage d'article sur SpaceX, un abonné à Canal+ qui partage une expérience malheureuse... Peu d'articles de presse des médias dont j'ai liké la page Facebook (Le Monde, Challenges; Wired, etc) remontent automatiquement (je dois beaucoup scroller pour les trouver): désormais, la plupart des articles de presse "en bonne position" sont ceux partagés par mes "friends" sur Facebook.

Le Facebook group, ce nouveau club des lecteurs

Alors, les médias ont peut-être trouvé une nouvelle marotte pour rester présents - et indispensables - dans le newsfeed Facebook de leurs lecteurs: créer un groupe Facebook. Ou comment le vieux forum de discussion, en vogue au début des années 2000 (la préhistoire, l'ère d'avant les réseaux sociaux !) est ainsi ressuscité ! Comme on dit en novlangue marketing, le groupe Facebook a pour avantage de créer un engagement sans précédent de l'internaute: c'est un "club" qu'il choisit de rejoindre, où il dialogue, commente, poste des suggestions, des photos... Il interagit avec d'autres membres d'une communauté, créée et chapeautée par un média. Cette sorte de club des lecteurs numérique, c'est une audience hyper captive.

Surtout, c'est du pain-bénit pour des médias critiqués pour leur parisianisme qui cherchent à recréer un lien de proximité avec leurs lecteurs - comme le montrent les jeunes titres Ebdo, et bientôt ''Vraiment'', qui organisent des réunions "IRL" avec leurs lecteurs, ou les sollicitent pour des idées de sujets.

Mieux, chaque nouvelle publication, ou commentaire qui la "rafraichit", remonte automatiquement en haut du fil d'actualité et peut être doublée d'une notification (qui apparaît par exemple en pop-up sur le mur Facebook de l'internaute). Parfait pour contourner les derniers impératifs de l'algorithme de Facebook.

Facebook groups Nice Matin, BFM...

Dans l’Hexagone, plusieurs médias ont bien vu l'aubaine. Mais comme pour une rubrique, il faut trouver un angle, une thématique propre à leur groupe. Mention spéciale pour le quotidien régional ''Nice Matin'', qui a créé des premiers groupes autour de services: l'un, Nice-Matin des solutions, près de 1 500 membres, est dédié au journalisme de solutions: il invite certes à voir "les coulisses de reportages" (classique), mais surtout, se veut "dédié aux initiatives positives qui émergent chaque jour dans nos départements, aux gens qui se bougent et proposent des solutions". Un autre groupe, Kids-Matin, encore naissant (il compte 300 membres) veut proposer des solutions et services autour des enfants dans la région de Nice.

D'autres médias ont aussi sauté le pas. BFM Business avec BFM Stratégie (1 848 membres 1 mois après sa création) propose "un cours de 40 épisodes donné par Xavier Fontanet, ancien président d'Essilor, éditorialiste et professeur affilié à HEC". Des cours d'éco-management, mis en ligne après leur diffusion TV. Au menu, "La stratégie, c'est l'art de bien vivre avec son concurrent", "Valeur part de marché : le cas de forte croissance"... Dans un autre genre, le média en ligne Les Jours (créé par des anciens de Libération) propose sur "Obsession Migrant" les coulisses de l'enquête de ses journalistes sur la trace des migrants morts en Méditerranée.

Outre-Atlantique, plusieurs médias ont anticipé ce virage de Facebook dès l’année dernière. Le Washington Post a ouvert "PostThis" (4 300 membres), spécialisé dans le fact-checking. Vox avec The Weeds (15 000 membres), il y a 10 mois, tout juste présenté comme un "espace collaboratif". Citons aussi, comme le relate Les Echos, Bloomberg avec Money Talks (4 200 membres) pour parler de finances personnelles, le Financial Times a lancé en janvier le FT Books Café (2 100 membres) un "book club" avec à la clé des sessions live avec des écrivains...

Reste à voir si la parade sera suffisante pour combler le trou dans les audiences provoqué par la nouvelle politique de Facebook. Pour l'instant, les groupes que je cite comptent à peine quelques milliers de membres. Bien loin des millions de membres qui avaient liké la page Facebook d'un média. Et si cette nouvelle audience ramènera des lecteurs sur les sites des médias. Voire suscitera l'intérêt des annonceurs.

jeudi 26 novembre 2015

Quand Facebook, Google & co deviennent fournisseurs d'accès à internet

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Facebook est-il en train de devenir un fournisseur d'accès à internet (et/ou un opérateurs télécom, au choix) ? L'info, tombée cette semaine, est passée inaperçue en ces temps pour le moins troubles. Et pourtant, loin d'être anecdotique, elle traduit très bien cet idéal un brin messianique, commun à plusieurs des GAFA, et géants de l'industrie tech américaine.

Il y a cette initiative ambitieuse de Facebook, Internet.org, de fournir des services d'accès à internet gratuits aux pays en développement. Elle est maintenant disponible pour l'ensemble des Indiens avec le Free Basics app du réseau Reliance Communication. Reliance Communications est donc accessible à l'ENSEMBLE des Indiens, "1 milliard de personnes sans accès à internet" selon Facebook - sachant que l'Inde compte 1,2 milliard d'habitants! Reliance Communications est ainsi devenu le quatrième plus gros opérateur d'Inde: il comptait déjà 110 millions d'abonnés en juin, raconte Techcrunch.

Concrètement, Free Basics permettra aux Indiens d'accéder - oh surprise - à Facebook et Facebook Messenger (ce service de messagerie instantanée est essentiel, j'y reviens), et une multitude de sites tels que Wikipedia, BBC News, Bing, et des services locaux.

Alors oui, bien sûr, Mark Zuckerberg nous raconte sur la page (Facebook) dédiée, dans un post daté du 23 novembre, cette belle histoire de Ganesh Nimbalkar et son épouse Bharati, "qui subviennent aux besoins de leur famille en cultivant une terre de 5 acres depuis des générations à Maharashtra". Et comment grâce à Free Basics et internet, il a découvert des services tels que AcuWeather, pour mieux gérer la saison de la mousson, qui lui ont (un peu ) changé la vie.

Philanthropie supposée

Mais est-ce là vraiment le rôle de Facebook, à l'origine d'un réseau social devenu mondial, de devenir FAI ? Peut-on vraiment croire en la philanthropie supposée d'une des plus puissantes entreprises tech mondiales ? Ses détracteurs lui reprochent de ne proposer via Internet.org qu'une sélection de services, privilégiant ses partenaires (certains médias, etc), et rompant ainsi allègrement la neutralité du Net.

Qu'une société aussi puissante que Facebook contrôle ainsi des millions de nouveaux utilisateurs d'internet pose question. Free Basics a déjà étendu sa toile, outre l'Inde, à 30 pays à travers l'Afrique, l'Asie du Sud et du sud-est, et l'Amérique Latine. Ce projet, lancé en août 2013, vise tout simplement à élargir l'accès à Internet à 5 milliards de personnes de plus dans le monde. Encore en octobre dernier, Facebook annonçait avec Eutelsat le lancement d'un projet d'accès à internet (carrément) en haut débit par satellite pour l'Afrique, grâce à ses satellites géostationnaires.

D'autant que, en leur proposant un accès internet et, dans les services par défaut, la messagerie instantanée Facebook Messenger, Facebook se substitue à un opérateur. Comme nous l'avons déjà découvert en Europe, FB Messenger permet - ô surprise - de téléphoner gratos, au nez et à la barbe des opérateurs classiques, comme j'en parlais dans cet article..

Qu'est-ce qui motive Mark Zuckerberg ? Comme je l'écrivais en 2013, cette initiative venait à point nommé pour les partenaires industriels de Facebook (Nokia, Samsung, Ericsson, Qualcomm...): les marchés matures étant saturés, les zones pauvres comme l'Afrique, l'Amérique latine et certains pays d'Asie sont des réservoirs de nouveaux clients.

Messianisme des Gafa

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Couv' de The Economist, janvier 2010

Cela répond à un certain idéal messianique à l'américaine pour Facebook. Oui, c'est sûr, les technologies, le Réseau, vont changer la vie des gens, l'humanité. Tout comme Apple a toujours estimé fabriquer des produits qui vont changer la vie des gens (voir cette profession de foi de Tim Cook dans cet extrait de Inside Apple de Adam Lashinsky, "Nous pensons que nous sommes sur Terre pour fabriquer de grands produits. (...) Nous sommes constamment focalisés sur l'innovation. Nous croyons à la simplicité, on à la complexité") , Google prétend rendre le savoir accessible à l'Humanité via son moteur de recherche, et même changer le monde ("Notre ambition est de créer le meilleur des mondes", conclut Eric Schmidt dans The new digital age - coucou Aldous Huxley), Amazon faire des livres des biens de consommation courante...

Messianisme, mégalomanie ? En août 2013, Zuckerberg revendiquait ainsi un certain droit commun à la connexion, déclarant: "Tout ce que Facebook a fait jusqu'à présent est de donner aux gens à travers le monde l'opportunité de se connecter". Certes. Mais Facebook dépasse ainsi allègrement son rôle d'éditeur du plus grand réseau social au monde.

Opérateurs telcos

Il n'est plus le seul à s'improviser opérateur telco mondialiste. Dès 2010, Google annonçait le déploiement de Google Fiber, un service de fibre optique (ultra haut débit donc). Début 2014, il publiait déjà une liste de 34 villes américaines susceptibles d'être raccordées en 2015! En avril 2015, la firme de Mountain View provoquait frontalement les "vieux" opérateurs avec son premier service de téléphonie mobile (s'associant, quand même, à Sprint et T-Mobile US pour l'occasion), Project Fi, accessible uniquement sur invitation. Il permet aux utilisateurs de se connecter au réseau le plus rapide. Proposé 20 dollars par mois, surprise, il n'est utilisable avec un seul smartphone, le Nexus 6, développé... par Google, avec Motorola.

Même Apple envisagerait de se lancer comme opérateur mobile virtuel. Après tout, il dispose déjà d'une carte maîtresse, l'Apple SIM, une carte SIM "universelle", déjà fournie avec l'iPad Air 2 cellulaire aux États-Unis et en Grande-Bretagne (nooon, pas en France, les opérateurs ne le tolèreraient nullement).

mercredi 10 décembre 2014

"Men, women & children", liaisons dangereuses par écrans interposés

Cela commence par ces plans de foules, dans le métro, dans la rue, dans un centre commercial, dans une cantine de lycée, où se superposent des images d'écrans - des extraits de tweets, de chats, puis plus tard, de pages Facebook. Ces enchevêtrements de mots parfois très intimes des personnages du film qui tweetent, textotent, hésitent en écrivant des des messages sur Facebook. C'est le cœur du film, une de ses originalités. Ces images frappent déjà dans la bande annonce, il faut y voir une manière nouvelle, qui casse les codes du cinéma classique, de mettre en scène notre société numérique. Au passage, on notera cette mode, sur les affiches de films - dont du nôtre, évidemment - de citer des tweets en lieu et place des extraits de critiques de films classiques.

Dans Men, women & children, sorti en salles mercredi 10 décembre, Jason Reifman esquisse un état de lieu désenchanté des effets de la culture Internet sur la société d'aujourd'hui. On y voit des extraits de la vie - trop - numérique sur des habitants d'une banlieue pavillonnaire américaine. Un brin moralisateur, Jason Reifman est tenté de laisser entendre que ses personnages sont en partie malheureux à cause de cette vie numérique. Un peu facile, certes. Le pitch donc: un ado accro au porno en ligne, ce que son père (lui aussi adepte des Youporn cheap ;), découvre en se connectant à son ordinateur dans sa chambre, un autre ado accro aux MMORPG, ces jeux vidéo multijoueurs en ligne, une jeune fille qui suit de trop près les conseils de sites "pro-ana", une mère parano adepte du cyber-espionnage de sa fille, une autre mère qui, elle, met en ligne des images aguichantes de sa fille adolescente...

Le réalisateur illustre ces faits de manière très concrète: la mère qui flique littéralement sa fille (avec son consentement) en la géolocalisant sur son smartphone, en parcourant régulièrement sa page Facebook et son profil MySpace, et même les tréfonds de son ordinateur, l'ado anorexique qui se fait conseiller sur un forum pro-ana lorsqu'elle est tentée de manger...

Ultra moderne solitude "sociale"

De manière assez classique au cinéma (un peu à la manière de l'excellent Short cuts de Robert Altmann), on y voit donc une multitude de vies, d'histoires, qui s'entrecroisent. Avec un point commun, le sujet du moment, le Zeitgeist dont Jason Reifman tente de s'emparer: les conséquences du tout-numérique, où comment les réseaux sociaux multiples (Twitter, Facebook, les réseaux de gamers adeptes des MMORPG, les sites de rencontres...) son devenus omniprésents dans nos vies. Au point de créer de nouvelles formes d'ultra moderne solitude que dénonçait Alain Souchon, et nos difficultés à communiquer avec ces réseaux sociaux qui nous isolent autant qu'ils nous connectent partout dans le monde.

On avait déjà vu Jason Reifman faire dans la satire féroce (super Thank you for smoking) ou l'analyse sociologique un peu gnangnan (l’ambigu Juno, ou le désir de maternité d'un adolescente), il fait de nouveau dans l'analyse sociétale. Un peu simpliste et cliché. Avec, pèle-mêle, l'ado en proie à se fantasmes à la sauce Youporn, un autre ado isolé par son jeu vidéo... Sans compter les parents quadras las qui trouvent de nouveaux moyens - sur ce maudit Web, toujours ;) - pour contourner leurs frustrations de couple, soit ces nouveaux sites de rencontres extraconjugales - on note au passage le placement de produit sur mesure qu'offre Jason Reifman au site Ashley Madison, qui a tenté son lancement en France avec un coup de pub provoc'.

Si l'ironie des débuts du film cède ensuite le pas à une romance plus sage, ce qui m'intéresse ici est la manière innovante dont Reifman tente de narrer les affres de notre nouvelle société numérique, rythmée par les Twitter, Instagram, Facebook, YouPorn, et autres Tinder. De rares fictions ont mis en scène jusqu'à présent ce tournant : cela a surtout été le cas de films d'anticipation, comme le remarquable Her de Spike Jonze (que je chroniquais ici), ou, dans une certaine mesure, la série Real Humans.

Texto sur grand écran

Alors, comment représenter en images ces nouvelles manières qu'ont les êtres humains de communiquer entre eux?__ Que faire du texto à l’écran ? Comment l'intégrer le texto dans une fiction ? Après tout, rien qu'en France, on envoie en moyenne 8 sms ou mms par jour, et même jusque 80 pour un adolescent. Le classique champ-contrechamp ne suffit plus. Pour représenter cette société où l'on a nos regards fixés sur les écrans de nos téléphones, tablettes et ordinateurs, Reifman ouvre donc Men, Women & Children avec cette superbe scène de foule avec en "nuage" ces mini-écrans de textos et messages sur Facebook que s'envoient les personnages. Un gadget visuel qu'il abandonne au bout d'une bonne demi-heure, mais qu'il a donc été un des premiers à tenter dans une fiction.

Le texto en surimpression, on l'a déjà vu, notamment, dans le film politique L’exercice de l’Etat (Pierre Schoeller, 2011), ou encore la série politique Les hommes de l'ombre (France 2, 2013/2014). On le vit ensuite dans la série House of cards de Netflix, ainsi que la série britannique Sherlock (2010) de la BBC. Au passage, une fois de plus, la surimpression du texto permet de faire du placement de produit: non plus simplement la pomme d’Apple, mais une interface, celle de l'iPhone, désormais familier à tous, décidément entré dans notre quotidien.

lundi 21 juillet 2014

Bientôt une clause "réseaux sociaux" dans les contrats de mariage ?

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Imaginez, une clause "réseaux sociaux" stipulée noir sur blanc dans votre contrat de mariage, qui nous rappelle que oui, la vie numérique fait désormais bien partie de notre vie tout court. Donc, nos usages des réseaux sociaux pourraient bientôt être encadrés juridiquement - et votre cher(e) et tendre pourrait bientôt avoir son mot à dire en la matière. Ce qui donne, au passage, un joli coup de vieux au mythique film Quatre mariages et un enterrement (20 ans, déjà...), qui se devait pourtant d'illustrer ce billet nuptial.

Même durant les moments les plus romantiques ou personnels, les smartphones sont devenus omniprésents, pour capter, filmer, photographier, puis partager en temps réel des "moments" (c'est ainsi que l'iPhone qualifie désormais, par défaut, vos albums photos). On rit, on se moque, on s'indigne, en quelques clics et effleurements d'écran. Rien de plus facile. Au risque de partager un peu trop vite des moments intimes sur la Toile. Ou de les utiliser à mauvais escient, dans la douleur d'une rupture.

"Social media prenuptial agreement"

Même dans ce domaine, la judiciarisation se développe. Aux Etats-Unis, on voit ainsi apparaître les premières clauses "réseau social" dans les contrats de mariages, soulignait récemment ABCNews. Une clause très carrée, juridique, destinée à encadrer les différents aléas liés au divorce, aux côtés des volets séparation des biens, infidélité, ou garde partagée des enfants. Le “social media prenup” , un document écrit ou une simple conversation, fixe donc ce qui est acceptable de partager en ligne à propos de l'un et l'autre. Ann-Margaret Carrozza, une avocate new-yorkaise citée par ABC News, a ainsi vu ce type de clause apparaître ces derniers mois, et affirme en rédiger cinq par semaine.

L’ambiguïté étant que ces clauses prévoient à priori tout ce qui est susceptible de nuire à la réputation professionnelle du conjoint, de l'embarrasser, de salir son e-réputation, et donc faire l'objet de poursuites. Une sorte de principe de précaution appliqué aux réseaux sociaux, alors même qu'une séparation n'est nullement envisagée.

Après tout, la judiciarisation commence à toucher aussi le "revenge porn" ces photos compromettantes pour se venger, aux US, et même en France, où la première condamnation a eu lieu.

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Didido, théorie des jeux amoureux sur Facebook

L'idée ? Protéger la e-réputation des conjoints : photos peu avantageuses, détails croustillants sur la vie commune passée, post vengeur ou même simples manifestations de désespoir et autres émotions ne pourront être partagées sur Facebook et Tswitter. Seul le "No comment" sera autorisé. Une notion politiquement correcte très américaine, à l'image du très marketé neutre statut de «conscious uncoupling» partagé en ligne par l'actrice Gwyneth Paltrow et Chris Martin lors de leur divorce, ce printemps.

Lors du divorce, «chaque partie accepte de ne pas poster, tweeter ou d’aucune manière partager sur les réseaux sociaux des images ou tout contenu positif, négatif, insultant, embarrassant ou flatteur sur l’autre» . Bref, les photos, posts et vidéos des enfants et d'une vie familiale idéalisée quand tout va bien sont autorisés (quand bien même ils sont parfois bien impudiques...), mais pas question de régler ses comptes par des insultes et photos compromettantes en public. Car les réseaux sociaux (Facebook en premier lieu, qui compte au moins 26 millions d'utilisateurs actifs en France, mais aussi Twitter, Instagram, voire les blogs, etc) sont devenus le nouvel espace public virtuel, la nouvelle place du village.

Si l'un des deux craque, l’amende prévue peut aller jusqu’à «50 000 dollars (par post ou par tweet) si l’on poste une photo peu flatteuse de son épouse», précise Ann-Margaret Carrozza. Alors que des études démontrent - ça tombe bien - un lien entre procédures de divorce et utilisation de Facebook. Une étude britannique démontrait ainsi récemment que 33% des procédures comportaient le terme "Facebook". Du grain à moudre à venir pour les avocats spécialisés en divorce.

samedi 21 décembre 2013

The Circle, dystopie horrifique où "Privacy is theft"

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Lorsqu'elle arrive sur le campus, à la vue de la fontaine, des courts de tennis et de volley, de la boutique intégrée, des cris d'enfants qui jaillissent de la crèche, "'Mon Dieu', pensa Mae. C'est le paradis". C'est la première ligne du livre, qui raconte le premier jour de travail de Mae Holland, une jeune femme lors de son arrivée dans une société appelée The Circle ("Le cercle"). On entrevoit ainsi, dès le début, que ledit paradis de The Circle, décrit dans le nouveau roman de Dave Eggers (ed. McSweeney's, 2013, disponible uniquement en V.O. pour l'instant) sera un enfer.

Dave Eggers, fondateur du magazine littéraire The Believer, de Might Magazine, et de la maison édition McSweeney's.qui a commis cette fiction, a publié entre autres A Hologram for the King en 2012, l'histoire d'un looser qui incarne la classe moyenne américaine qui combat pour réaliser ses rêves dans un monde globalisé et en récession.

Sur 450 pages, Dave Eggers nous raconte donc, sous le regard d'une jeune et naïve recrue, la toile que tisse la start-up The Circle dans la société - et plus que la vie numérique, comme on va le voir. Une sorte de meta-réseau social qui compile Facebook, Twitter, Google et Paypal, avec un réseau social d'échelle planétaire, Zing. Dans un futur proche, la start-up est devenue une des plus puissantes grâce à son système TruYou, qui a unifié tous les services sur Internet et aboli l'anonymat. Ses membres ont une seule identité et y rassemblent l'ensemble de leurs données - même personnelles. Une manière d'organiser la "big data" de tout individu... Le récit, qui se déroule dans un futur proche, n'est pas vraiment de la science-fiction: le quotidien des personnages nous semble très proche. Les trois Wise Men cofondateurs de The Circle nous rappellent tout créateur de start-up contemporain.

Dystopie

Mais le récrit est bien une dystopie, sous-genre de science-fiction qui est une sorte de contre-utopie, où l'auteur prend pour point de départ des fragilités de notre société contemporaine pour les tordre, les exagérer, dans un récit qui devient peu à peu horrifique, dans un Cercle vicieux. Comme tout ouvrage d'anticipation, il a donc une dimension d'avertissement. Son univers nous semble un peu familier: les blogs, Twitter, Facebook posent déjà des questions telles que la tyrannie de la transparence, la privacy en ligne perçue comme inutile (Vinton Cerf, vice-président et Chief Internet Evangelist de Google, déclarait récemment que "la vie privée peut être considérée comme une anomalie"), notre état d'esprit reflété par notre présence perpétuelle sur les réseaux sociaux, nos vies perpétuellement sous surveillance du gouvernement (effet NSA), la voracité de Google pour s'intégrer dans le monde de l'information...

The Circle apporte sa part à ces débats naissants. Eggers l'aborde par une fable, une sorte de conte destiné à être pédagogique, avec des personnages tels que la naïve héroïne qui va être dévorée par son ambition, les trois Wise Men, un Transparent Man, le mystérieux Kalden, qui émerge de l'ombre (seul personnage, dans cette ère de la transparence, à ne pas être traçable dans The Circle)... Le risque de tomber dans le pur récit de SF horrifique est contrebalancé par des anecdotes légères et distrayantes.

Secrets are lies, Sharing is caring, Privacy is theft

L'idée : on découvre au fil du récit que la merveilleuse start-up The Circle a formalisé une certaine idéologie : elle exige la transparence en tous domaines, ses slogans étant SECRETS ARE LIES ("Les secrets sont des mensonges"), SHARING IS CARING ("Partager est prendre soin"), et PRIVACY IS THEFT ("La vie privée c'est le vol", lointain détournement du mantra d'un certain Proudhon...). L'anonymat est banni, le passé de chacun est révélé, le présent de toute personne doit être enregistré et diffusé dans une vidéo en direct. Ce qui est enregistré et diffusé ne sera jamais effacé. Ces directives s'appliquent à l'ensemble des salariés de The Circle, mais au fil du livre, le grand public commence à les appliquer... L'objectif de The Circle est ainsi de couvrir tous les aspects de l'existence humaine, du vote aux histoires d'amour, sous forme de flot d'informations qui se déversent sur son portail en ligne.

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Le futur siège social de Facebook

D'ailleurs, The Circle s'avère plus que paternaliste envers ses salariés : dans ce phalanstère du futur, un peu à la manière du Googleplex que nous connaissons (reflété il y a quelques mois dans cet étrange film publicitaire dont je parlais ici, Les stagiaires), ils y ont accès à une multitude de services - restaurants, courts et salles de sports, magasin, agence de voyage intégrée qui leur organise leurs vacances dès qu'ils rentrent leurs dates de congés, chambres à disposition... Ce qui sonne étrangement contemporain : le futur siège social de Facebook, situé loin de toute ville, prévoit bien des logements juste à côté pour ses salariés. Au passage, ils sont fortement incités à participer à des multiples soirées afterwork à thèmes, dans un agenda partagé - leur vie ne doit-elle pas se dérouler au sein de The Circle ?

Monitoring de soi

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Au fil des pages, on assiste donc à la plongée aux enfers de Mae. Elle est recrutée à The Circle via sa colocataire Annie. Au début simple chargée de relation client, où elle répond en ligne aux questions et plaintes de clients, ses performances en ligne s'affichent au vu de tous sur l'Intranet de The Circle, où remontent ses notes après chaque interaction. Acharnée, Mae obtient un score record dès son premier jour de travail. Elle devient vite une championne de The Circle, approchant le cercle des fondateurs de la société.

Au passage, très corporate, elle devient de plus en plus "transparente" acceptant tout ce que la société lui demande : fusionner les données personnelles de son propre PC et son téléphone avec les appareils fournis par la société, puis partager en temps réel tout ce qu'elle fait sur le feed de The Circle, s'équiper d'un bracelet connecté qui relève ses données de santé (nous sommes bien dans le quantified self) - données dont son employeur a connaissance... Si elle est silencieuse trop longtemps, ses followers lui envoient des messages urgent pour lui demander si tout va bien. Très vite, l'entreprise exige - comme de tout salarié - sa participation active à la communauté en ligne : impossible de refuser de nouveaux "friends", ou de prendre part à de nouveaux cercles. Ceux qui s'écartent de ce "réseau social" sont de facto des parias.

L'individu doit s'effacer face à cette communauté, nouvelle humanité à l'ère virtuelle. Dans le récit, salariés de The Circle, puis personnalités politiques commencent à s'équiper de petites caméras (sortes de GoPro du futur): tout ce qu'ils font doit pouvoir être capté et partagé pour la mémoire commune, au nom de la "transparence". Une forme de nouveau totalitarisme. D'ailleurs, puisque rien ne peut être effacé, The Circle retire le bouton "supprimer". Les études, questionnaires et pétitions sont diffusés sans interruption, on vote d'un simple clic.

Peu à peu, c'est le cercle vicieux. Mae travaille de plus en plus sur les réseaux sociaux pour la prochaine récompense : augmenter ses "rates" (notations) et le nombre de millions de followers. Elle trouve chaque nouvelle demande "délicieuse" et "exaltante". Une quête éperdue de notoriété et de reconnaissance numérique, qui se mesure en données chiffrées - une sorte de monitoring de soi qui nous paraît étrangement contemporain.

Mae est plutôt la méchante que la victime de l'histoire. Elle cherche à évincer Annie du Circle vers la fin du récit. Ses motivations sont celles d'une teenager à l'ère d'Internet: décrocher les notes les plus élevées, se rapprocher des cercles de pouvoir du Circle, être populaire. C'est plus une bonne élève qu'une opposante qui voudrait prendre le pouvoir.

mercredi 7 novembre 2012

Twitter / Barack: les médias traditionnels dépassés

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Très exactement 327 453 tweets liés à l'élection présidentielle par minute, a décompté Twitter, lors de l'annonce de la victoire de Barack Obama, à 23h19 (5h19 à Paris). Un record. Le réseau social avait précisé, avant même l'annonce des résultats, que la présidentielle était devenue dans la soirée l'événement politique le plus tweeté de l'histoire américaine.

Et, fait sans précédent, c'est directement sur Twitter et sur Facebook que le président des Etats-Unis a annoncé sa réélection, en postant cette simple photo où il enlace sa femme, intitulée "Four more years". Et non plus sur une tribune, dans une déclaration diffusée par les chaînes de télé. Preuve que les médias sociaux se sont imposés comme les médias de l'immédiateté, et même de l'instantanéité, devant la télévision et la radio.

Un tweet qui restera probablement dans l'histoire, envoyé par Obama avant même de monter sur scène pour son discours, et bien avant de prononcer son premier discours.

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Quelques minutes auparavant, Obama indiquait déjà "This happened because of you. Thank you.", puis signait lui-même, de ses initiales, un deuxième tweet: "We're all in this together. That's how we campaigned, and that's who we are. Thank you. -bo (Nous sommes tous ensemble. C'est comme ça que nous avons fait campagne et c'est ce que nous sommes. Merci)".

La photo date du 17 août 2012, et a été prise lors d'un meeting dans dans le village d'East Davenport (Iowa). Pas grave, elle incarne à la perfection cette émotion par l'image (avec un pathos très américain) que le président veut faire passer. Son tweet de réélection aura été retweeté à près de 460 000 reprises - un record, qui en fait le "tweet" le plus populaire de tous les temps (pour l'instant !) d’après Buzzfeed, un site américain spécialisé. Barack Obama prend ainsi la place d’un message du chanteur Justin Bieber. En tout, plus de 31 millions de tweets concernant l’élection ont été postés. De même, sur Facebook, quelques heures après le post du président, plus de deux millions de personnes l'avaient "liké", en faisant la photo la plus aimée de l'histoire selon Facebook.

Il est vrai que déjà en 2008, la couverture médiatique de la campagne qui vit l’ascension de Barack Obama fut déjà marquée par l’avènement des réseaux sociaux, notamment Twitter, alors jeume média social à peine connu en France. Quatre ans plus tard, il s'est imposé au fil de la campagne, comme caisse de résonnance pour les partisans républicains et démocrates, notamment lors des trois débats télévisés entre les deux rivaux.

Mobilisation sur Reddit, appels à retweets

Les réseaux sociaux seraient-ils en train de supplanter les médias traditionnels comme relais ? Quelques jours auparavant, mardi après-midi, Barack Obama avait choisi le site Internet Reddit, réseau social très en vogue aux États-Unis, pour mobiliser les jeunes pour voter. Et il a appelé ses supporteurs tout au long de la soirée à se mobiliser - sur Twitter, les enjoignant à appeler leurs amis résidant dans des États clés (les fameux swing states) à retweeter son message s’ils font "partie de la @TeamObama".

Voire. Evidemment, les partisans républicains étaient également très actifs sur Twitter. Pourtant, les tendances sur le média social préfiguraient déjà de la victoire de Barack Obama avant même la fermeture des bureaux de vote. Sur les plus de 7 millions de tweets liés à l’élection que Twitter a comptabilisés mardi en milieu d’après-midi, 40 % évoquent Barack Obama, contre seulement 24 % pour Mitt Romney, relevait l'AFP. L’indexation mise en place par Twitter pour jauger la tonalité des messages donne 71 % de tweets positifs au président sortant depuis l’ouverture des bureaux de vote, contre 59 % pour le républicain Mitt Rowney.

Twitter, premier relais pour féliciter Barack Obama

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Forme de mise en abyme, même pour les traditionnelles et très officielles félicitations au président réélu, plusieurs personnalités politiques ont choisir eux aussi Twitter comme premier relais. Et par la même occasion, plusieurs se permettaient d'emprunter un ton très décontracté, bien plus que dans un classique communiqué compassé.

"Congratulations !", écrivait simplement e premier ministre russe Dmitri Medvedev sur son compte. "Chaleureuses félicitations à mon ami @BarackObama. Impatient de continuer à travailler ensemble", tweetait, très à l'aise, mercredi matin le premier ministre britannique David Cameron. "Heureux de l’élection du président Obama", écrivait en néerlandais puis en français le président du Conseil de l’Union européenne Herman Van Rompuy. Même le secrétaire général de l’Otan, Anders Fogh Rasmussen, s'est fendu de "chaleureuses félicitations" au président Obama via Twitter.

mardi 23 octobre 2012

Memoto: Big Brother is watching you (toutes les 30 secondes)

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Un appareil photo de la taille d'un pendentif que l'on peut arborer au cou, et qui prend une photo toutes les 30 secondes. Et génère une sorte de flux visuel continu de votre vie de tous les jours.

L'info est sortie hier dans The Verge, Techcrunch, Tuaw... hier. La crème des sites technos. Avec un ton presque extatique.

C'est une start-up basée à Stockholm, Memoto, qui a développé cet étrange produit. Une sorte de compagnon - Tamagoshi des temps modernes, qui va vous permettre de cataloguer, "ranger", tous les instants de votre vie, image par image.

Elle a lancé une campagne sur la plateforme de crowdsourcing Kickstarter, avec cette injonction, "Remember every moment".

L'appareil, de 5 megapixels, comporte aussi une puce GPS , qui permet de localiser l'endroit où sont prises les photos, et xx horodatages. Dotée d'une batterie rechargeable, elle a 2 jours d'autonomie. Donc, muni de votre caméra, vous serez même traçables en permanence.

Ce mini-appareil photo devrait être vendu à partir de 2013 pour 279 dollars, accompagné d'un abonnement à un service Web pour 199 dollars. Lequel permettra, une fois les images téléchargées, de les classer par ordre chronologique et lieux. Le soir, en branchant son Memento Lifelogging Camera à un ordinateur, les photos sont en effet traitées sur les serveurs de Memoto. Les photos sont regroupées en plusieurs "moments" quotidiens : on peut cliquer sur un moment pour le revivre, ou le partager sur Facebook. Une forme de mémoire photographique, en somme, censée être constituée au fil d'une vie.

Le moteur de recherche de Memoto permet de chercher une date ou un lieu, et de revoir les "moments" associés. L'app mobile iOS ou Android permet aussi d'accéder à ces "moments". Et rassurez-vous, si seule une toute petite partie des photos est organisée en "moments", aucune photo n'est effacée : elles sont toutes stockées et accessibles sur les serveurs de Memoto. Toutes les données sont chiffrées et privées.

Quantified self et "lifelogging"

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Elle surfe ainsi en plein sur la tendance du quantified self, qui consiste à collecter des données personnelles liées à la santé et à les partager, grâce à des appareils électroniques basés sur des capteurs, couplés à des applications mobiles ou services en ligne, comme j'en parlais dans ce billet.

Mais surtout, sur cette habitude que l'on a prise ce dernières années sur les réseaux sociaux, de manière presque additive: partager à tout instant ce que l'on fait, où l'on est, de plus en plus à travers la photo. La tendance du lifelogging, qui consiste à enregistrer et archiver le maximum d'informations autour de votre vie — textes, images, vidéos, interactions sociales

C'est bien pour cela que Facebook, par exemple, a mis l'accent sur l'image, la photo, dans son univers (allant jusqu'à créer une appui mobile idoine). Encore la semaine dernière, la start-up Lightt se lançait avec une promesse similaire : son app mobile "sociale" permet de capturer des instants de vie, par séries de 10 photos, puis de les partager avec ses amis.

Alors que les individus n'ont jamais autant pris en photo - et partagé sur les réseaux sociaux - les instants les plus anodins de leur quotidien. Un sondage Ipsos, commandé à l'occasion du Salon de la photo, révélait aujourd'hui que 55% des Français déclarent posséder au sein de leur foyer au moins un appareil photo numérique. Et parmi les photographes amateurs, 89% possèdent un appareil numérique et 77% un téléphone portable avec prise de vue intégrée.

Ainsi, avec ces étranges appareils, chacun pourra être filmé, même à son insu. Même dans des situations voyeuristes. Car l'appareil de Memoto ne peut jamais s'arrêter, à moins de le masquer.

Le co-fondateur de Memoto, Martin Källström, est conscient comment les médias sociaux ont changé nos comportements. Sa première start-up, Twingly, "faisait une veille sur les blogs, tweets et autres pour traquer ce que les clients disaient de produits de certaines marques", précise Techcrunch.

C'est parce qu'il voulait enregistrer des moments inattendus de sa vie, ces moments où l'on oublie précisément de dégainer son appareil photo, comme les premiers pas de ses enfants, qu'il a eu l'idée de lancer ce nouveau service. Ces moments qui peuvent sembler sans grande importance deviennent bien plus profonds à posteriori... Memoto permet ainsi de retrouver ces moments. Toute l’ambiguïté étant que Memoto ne laisse ainsi plus de place à l'improvisation, ni à l'oubli, ni au secret. Tout sera gravé en images.

dimanche 7 octobre 2012

Facebook, 1 milliard d'utilisateurs, lance son premier spot

"Les chaises. Les chaises sont faites pour que les gens s'y assoient et fassent une pause. Chacun peut s'asseoir sur une chaise, et une chaise est assez large pour que l'on s'y assoie à plusieurs. Et échanger des blagues, des histoires. Les chaises sont pour les personnes, et c'est pourquoi les chaises sont comme Facebook. Des sonnettes, des avions, des ponts... Ce sont des choses que les gens utilisent pour être ensemble, s'ouvrir et se connecter. (...)".

"Un formidable pays est quelque chose que les gens fabriquent ensemble, pouvant ainsi avoir un endroit dont ils font partie. L'univers. C'est rapide, et sombre, et nous fait nous demander si nous sommes seuls. Peut-être que la raison pour laquelle nous faisons toutes ce choses est de nous rappeler que nous ne le sommes pas seuls. Facebook".

Ce spot publicitaire dure 1 minute 30 (durée rare pour une pub). Les premières secondes, avec ces images très universelles de personnes de pays différents, (forcément) souriantes et trop contentes d'être là, de chaises, on pense dans un premier temps à une pub Ikea. Une métaphore pour designer un objet, un service censé créer le lien entre des personnes, suivie d'autres (une sonnette d'entrée, un pont), puis de personnes, de groupes qui ont l'air de s'éclater. Le nom de l'annonceur de cette pub tombe à la fin, sans slogan ni commentaire : Facebook.

Le media social s'est donc offert le premier spot publicitaire de son histoire, dévoilé sur YouTube vendredi 5 octobre. Conçu par l'agence américaine Wieden & Kennedy, il sera diffusé en télé dans 13 pays dans le monde (les Etats-Unis, le Royaume-Uni, la France, l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, le Mexique, le Brésil, l'Inde, les Philippines, l'Indonésie, le Japon et la Russie) ces prochains jours, et s'affiche en page d'accueil de Facebook depuis samedi.

Un spot qui arrive dans un contexte particulier : Facebook vient d'annoncer avoir franchi le milliard d'utilisateurs actifs. Mais connaît aussi une phase mouvementée, épinglé la semaine dernière pour son - possible - bug, et alors qu'il est en pleine opération séduction auprès des annonceurs.

Il utilise donc l'image, forcément universelle et à priori rassurante, un peu philosophique, d'une "chose" qui nous unit, qui se concrétise par une chaise, un avion, un pont... Premier essai publicitaire donc pour la start-up devenue méta-réseau social depuis sa création en 2004. Un essai périlleux - comment communiquer sur quelque chose de très abstrait - en se posant comme incontournable ?

On a vu Google nous montrer dans ses spots TV que oui, Chrome fonctionne très bien, et qu'il permet même de circuler de par le monde en voiture électrique, avec Xavier et Antonin, les deux ingénieurs qui font le tour du monde en voiture électrique avec l’Odyssée Electrique. Mais chez Facebook, le voir se représenter comme un pays virtuel, voire l'univers, a plutôt quelque chose... d'effrayant.

Mise à jour du 10 octobre: ce spot est destiné uniquement à une diffusion sur le Web, pas de plan média télé prévu, me précise Facebook France. Il sera donc diffusé à partir de cette semaine sur les pages Facebook dans les langues des pays concernés. Il n'empêche, Facebook s'est offert une pointure du cinéma, le réalisateur Alejandro González Iñárritu (réalisateur de 21 grammes, Babel...) pour réaliser cette pub. Pas anodin.

mercredi 18 avril 2012

Bulle "sociale": media sociaux, mobiles, communauté d'utilisateurs, (sur)valorisation

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Cela ne vous aura pas échappé: le 9 avril, Instagram, start-up de 14 salariés, connue pour son application mobile qui permet de partager sur Twitter et Facebook des photos vintage style Polaroïd, a été rachetée par Facebook pour quelque 1 milliard de dollars - son fondateur, Kevin Systrom, en voulait même le double, 2 milliards. Elle avait effectué quelques jours avant une levée de fonds de 50 millions de dollars qui débouchait sur une valorisation boursière de 500 millions de dollars.

Spectre d'une nouvelle bulle de la "neteconomie" version 2012, 12 ans après la première, folie autour de ces boîtes gonflées artificiellement par des survalorisations boursières... Et volonté pour Facebook de s'ancrer davantage dans l'image, la photo, en acquérant ce service simple, et surtout dans l'univers mobile - puisque c'est désormais là que tout se passe. Je ne vais pas entrer dans les détails de ce rachat, déjà commenté ici et - et qui fait l'objet d'une analyse (par ma pomme) dans Stratégies en kiosques demain.

Mais ce fait est le dernier révélateur de plusieurs mouvements de fond que l'on observe dans ce nouvel écosystème de startups "sociales" - souvent des médias sociaux, avec des fonctions de création et de partage de contenus autour de "cercles" d'amis, où les pépites sont désormais non plus simplement le nombre de visiteurs uniques ou d'acheteurs, mais le nombre d'utilisateurs - et donc la puissance de leur communauté d'internautes abonnés.

Aujourd'hui, les stars médiatiques sont ainsi Zynga (éditeur de "jeux sociaux" qui cartonnent sur Facebook, tel Farville) , Pinterest (qui permet de "pinter" ses jolies images sur son tableau virtuel, comme j'en parle dans ce papier), Twitter (le site de microblogging bien connu...), Tumblr (autre plateforme de microblogging), Klout (outil d'analyse des media sociaux, censé délivrer le "degré d'influence" des internautes), Path (réseau social limité à 150 amis, uniquement sur téléphones mobiles), Pair (un réseau social pour vous et votre moitié ;), Foursquare (où l'on se géolocalise, de préférence depuis son mobile) et autres Storify (l'outil de "curation")...

On voit aussi apparaître de plus en plus de micro-réseaux sociaux, de niches, tels Path, FamilyLeaf, et Pair.

Levées de fonds records et (sur)valorisations

Mais ce qui est nouveau est que nombre de ces start-ups ont, ces derniers jours, souvent levé des fonds qui donnent le tournis - un nouvel indicateur de valorisation ? Ce qui s'est accompagné pour plusieurs d'entre elles d'une (sur?)valorisation boursière surprenante - d'autant plus pour celles valorisées de manière "grise", alors qu'elles ne sont même pas (encore) cotées en Bourse ! L'an dernier, Tumblr levait 85 millions de dollars. Ces derniers jours, Path a ainsi levé 40 millions de dollars, l'appli "talkie walkie" Voxer 30 millions de dollars.

Mercredi, Le Figaro reprenait ainsi une information de l'agence Bloomberg, selon laquelle Zynga, après avoir acquis 23 sociétés pour 350 millions de dollars en 2 ans, Zynga dispose de 1,8 milliard pour des achats d'autres sociétés. La valorisation boursière est à l'avenant: 200 millions de dollars pour Pinterest et pour Klout, 250 millions pour Path, 8 milliards pour Zynga, près de 10 milliards pour Twitter et Linkedin… sans compter Facebook lui-même, qui devrait être valorisé 100 milliards de dollars sur le Nasdaq lors de son introduction courant mai. Et l'on apprenait ce soir que Square, lancée par Jack Dorsey, fondateur de Twitter, s'apprêtait à atteindre une valorisation de 4 milliards de dollars.

Meta - réseaux sociaux

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Autre fait, plusieurs ont été rachetées par les media sociaux"leaders", à tel point qu'un nouvel écosystème est en train de se façonner, où plusieurs meta-réseaux sociaux (Twitter, Facebook, Groupon...) se dotent ainsi de services supplémentaires. Dans ce nouvel écosystème "social", on distingue les petits réseaux sociaux, destinés à un cercle limité, les méta-réseaux sociaux, tels que Facebook et Linkedin, et les plateformes de géolocalisation mobile. Le cas d'Instagram est bien sûr emblématique. Ce mercredi, Twitter révélait l'acquisition du service de social media analytics Hotspots.io.

Quelques jours avant, Facebook s'offrait la start-up US Tagtile, qui a développé un système de fidélisation client sur mobile (elle permet de réunir dans un même espace les coupons de réductions et promotions après avoir effectué une visite ou un achat en ligne), compatible avec la norme NFC (on se souvient de l'échec, l'an dernier, du service Facebook Places), et Groupon acquérait l'app de recommandation "sociale" Ditto.me, qui édite depuis mars 2011 une application mobile de recommandation sociale de lieux et d'activités.

jeudi 12 mai 2011

La couv' de la semaine: Capital, storytelling et pipolisation économique

Capital

Il était temps que je reprenne cette rubrique, avec ce titre que vous connaissez forcément, qui incarne une certaine idée du journalisme économique. Couv' (sur)chargée aux couleurs vives, titraille et mise en page accrocheuse, et bien sûr l'inimitable ton popu qui lui donne parfois un côté café du commerce : pas de doute, vous avez bien entre les mains Capital, le titre de presse économique le plus vendu, avec une diffusion payante de plus de 320 000 exemplaires par mois (chiffres OJD). Eh oui, car l'un des fleurons du groupe Prisma Presse fête ses 20 ans ! Né à la fin des années 80, "années-fric" incarnées par Bernard Tapie, le culte de la compétition et de la gagne pour des jeunes cadres sup' qui se rêvaient en yuppies.

La naissance de ce titre n'a rien d'anecdotique. Mine de rien, tout comme son lointain cousin en télé sur M6, Capital a créé une ligne éditoriale, un ton journalistique (souvent crispant, il faut le dire). L'économie, une science ennuyeuse ? Qu'à cela ne tienne, les concepteurs de Capital ont eu l'idée, dès le début, de raconter des histoires aux lecteurs, force anecdotes : les prémices du storytelling... Quitte à y ajouter ce ton crispant à la Capital, qu'il a inventé (et repris par beaucoup), avec formules accrocheuses, formules-clichés (je vous laisse savourer ce délicieux billet de mon confrère Erwann Gaucher sur les tics de langage de Capital en télé - toi aussi fais ton reportage Capital...), et tournures de phrases trèès familières qui assurent le lecteur. Et situent Capital à la lisière du mag de divertissement.

C'était l'occasion rêvée de revenir sur ce titre ici, où je m'était déjà adonnée au plaisir du feuilletage des pouffe-mags (ici et ), alors que le mensuel économique s'est offert un sérieux lifiting pour son bithday, avec une nouvelle formule lancée en avril, accompagnée dans la foulée de sa première appli iPad payante, et le lancent imminent d'une appli mobile, dédiée aux conseils boursiers de Capital.fr.

Le nouveau Capital, donc. On remarquera déjà la couverture parfaitement adaptée à la vente en kiosques (où il ne pourra échapper à votre regard): élégante couleur de fond rose vif, titres de Une divers et variés mis en avant, avec une légère tendance alarmiste ("les acteurs trop bien payés", "pourquoi votre facture santé s'envole", le "nouveau Big Brother" Facebook..).

Le feuilletage réserve quelques surprises. Déjà, visiblement, la nouvelle formule a plu aux annonceurs, avec 39 pages de pub (ainsi que 6 pages de publi- flotte d'entreprise - un classique dans la presse éco) sur une pagination totale de 154 pages.

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Dès l'édito, François Genthial nous promet "de nouvelles rubriques plus proches de l'actualité". Et de fait: après l'interview d'ouverturedu DG d'Air France - KLM (bon, une page de photo, une page de texte...), on enchaîne sur cette maagnifique infographie "big business du Festival de Cannes"

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S'ensuit cette non moins magnifique double info-people, que l'on pourrait volontiers imaginer dans d'autres magazines ("soirées business", tout de même).

On retrouve ensuite les traditionnelles rubriques de Capital: Hommes et affaires, avec la touche hommes d'affaires peopolisés propre à Capital, tel François-Henry Pinault ("people malgré lui" depuis son mariage à l'actrice Salma Hayek, sa "coûteuse passion écolo" y sont abordés entre autres indiscrétions)

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Puis la rubrique Succès et dérapages d'entreprises. Là, agréable surprise, Capital donne de la place à l'enquête. 13 pages sur Facebook, alors que le journaliste Gilles Tanguy s'est rendu au siège de la société, à Palo Alto en Californie (un reportage que je rêve de faire...): il raconte l'ambiance de travail dans cette ruche, le management interne (il "règne sur une bande de copains", eh oui), ses rapports étroits avec les annonceurs...

Quelques prémices de format bi-média s'esquissent, avec ce prolongement vidéo ("exclusif" bien sûr) bien vu, où il a suivi Mark Zuckerberg.

S'ensuivent un long dossier sur le coût de la santé et le traditionnel comparatif des cliniques... tiens, un marronnier classique que l'on retrouve régulièrement dans certains hebdos généralistes), un portfolio ("l'économie en images"), la rubrique "révélations" (dont ces vilains comédiens cloués au pilori car "peu rentables")...

Et ensuite, une partie "Votre Capital pratique" enrichie, désormais dans un cahier entier: ces fameuses rubriques services - infos pratiques dont la presse mag raffole... C'est bien connu, les lecteurs adooorent ce côté boîte à outils. Infos carrière, droit, argent et placements, ou encore vie privée (où l'on mêle cours de cuisine et high-tech...) y sont abordés.

Bilan ? Capital reprend cette recette qui a fait son succès : quelques enquêtes et documents prestigieux (intéressante enquête sur les dérives du trading assisté par ordinateur, traduction de Wired), un peu de paillettes, et beaucoup de sujets d'actus tirés sous un angle très vendeur, voire polémique.

vendredi 11 février 2011

Même pas mort dans ma deuxième vie numérique !

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Avez-vous déjà songé à ce que pourront devenir vos mails, vos tweets, votre page Facebook ou votre blog une fois passé à trépas ? Le fantôme de votre double numérique continuera-t-il à hanter le cyberespace à coup de posts automatiques et de "c'est votre anniversaire" sur le "Social Network"? Votre compte Twitter continuera-t-il à vivre alimenté par des posts en 140 signes robotisés ou sera-t-il usurpé par un proche ou un inconnu entretenant l'illusion pour vos 4000 followers ? Sans y penser, vous semez chaque jour, à chaque heure, parfois à chaque minute les traces de votre existence et de vos pensées sur les dizaines de milliers de serveurs qui font battre le cœur du Réseau. Et vous assurez ainsi une postérité numérique, une forme d'immortalité sans précédent dans l'histoire de l'humanité. Demain, à partir de cet ADN digital, vos descendants pourront peut-être recréer votre personnalité sous la forme d'un avatar "3D" doté d'une intelligence artificielle avec qui ils pourront conserver: "C'était comment mon Aïeul au début du XXIème siècle ? Et qui était cette femme que tu as tant aimé ?".

Encore plus fou, n'avez-vous jamais rêvé (ou cauchemardé) de renaître à la vie par la grâce d'une manipulation de votre ADN biologique cette fois, cloné par quelque savant fou qui donnerait naissance à un Golem de chair qui serait un deuxième vous-même ? Et si d'aventure il était possible un jour de "sauvegarder" votre conscience, ce pur esprit que les croyants appellent l'âme, pour la télécharger sur un disque dur et ressusciter des morts tel Lazare sous la forme d'un homme-machine que l'on appelle Cyborg ?

Le sujet est troublant, dérangeant. Pourtant, il faudra bien se pencher dessus, alors qu’un business commence à émerger autour de la gestion de votre vie numérique, de l’archivage de votre vie numérique, avec notamment le projet Total Recall ourdi par un Docteur de Mabuse de Microsoft. Votre vie numérisée pour l'éternité, l’immortalité digitale, la transcendance de l'humanité et son "augmentation" par la machine...Justement, il en était question au cours de la soirée #jesuismort , organisée mardi à La Cantine par nos amis de L'Atelier des Médias de RFI, Silicon Maniacs et Owni. Une soirée-débat particulière, avec des invités étranges (entre autres un président de l'Association Française Transhumaniste, un membre de la Singularity University...) où l’on a beaucoup causé immortalité et transhumanisme, cette mouvance culturelle qui prône l'usage des sciences et des techniques pour améliorer les caractéristiques physiques et mentales des êtres humains.

Un truc de doux dingues ? Pas si sûr quand Eric Schmidt de Google s'y met: "Ce que nous essayons de faire c'est de construire une humanité augmentée, nous construisons des machines pour aider les gens à faire mieux les choses qu'ils n'arrivent pas à faire bien"...

Cela faisait donc longtemps que nous voulions nous pencher sur ce sujet existentiel et vertigineux avec mon confrère blogueur et journaliste Jean-Christophe Féraud. A la faveur de l'évènement #Jesuismort, nous avons donc décidé d'écrire ce billet en commun et de l'accueillir sur nos blogs respectifs (vive les billets co-brandés ;)

Cimetière post-mortem

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Nos traces numériques esquissent déjà des prémices à notre postérité digitale. Vous êtes peut-être déjà tombés, au gré de vos pérégrinations sur Facebook, sur des pages de personnes décédées. J'ai déjà atterri par hasard sur la page Facebook du frère d'un ami, disparu en mer. Son wall était resté ouvert, en accès libre, ses amis et sa famille continuaient à y déposer des messages d’hommage post-mortem. Jean-Christophe a connu la même expérience suite à la mort soudaine d'un vieil ami journaliste...Troublant : Facebook devient alors un cimetière, où les gens développent des rituels funéraires virtuels.

Justement, mardi soir à #Jesuismort, Tristan-Mendès France, un temps assistant parlementaire, maintenant blogueur, documentariste et chargé de cours au Celsa, nous a longuement parlé de cela – ces rites funéraires qui commencent à se développer dans des mondes virtuels. La première fois, que cela s’est produit c'était dans le jeu en réseau "Word of Warcraft" en 2005 : suite au décès d’une gameuse, un véritable rituel funéraire a été organisé dans le monde de Warcraft pour lui rendre hommage…

Pour Tristan, c’est sûr, on est face à un véritable « cimetière virtuel » sur Facebook, qui compterait 5 millions de morts (ou plutôt de profils de personnes décédées), laissés ouverts, volontairement ou pas, par les familles. Et de fait : c’est un peu affolant, mais rien n’a été prévu par les Facebook, Twitter, LinkedIn et autres réseaux sociaux pour supprimer le profil d’une personne décédée ! Idem pour les plateformes de blogs, les moteurs de recherche… Au niveau juridique, c’est la jungle. Au point que quelques sociétés imaginent sûrement des solutions de marchandisation post-mortem. Imaginez : bientôt, à défaut d’être immortel physiquement, vous pourrez sans doute vous acheter une immortalité digitale, garder une présence en ligne, sous la forme d'une concession virtuelle éternelle ou réduite à 20, 30 ou 50 ans...

Parallèlement, des futurologues, gourous du transhumanisme, tels Raymond Kuzweil, Aubrey de Grey, et autres doux dingues le jurent: la mort est un phénomène dont on peut guérir. Certains prédisent l’immortalité dans 15 ou 20 ans grâce au séquençage du génome humain, entre autres évolutions technologiques. Lisez plutôt le Manifeste des Extropiens, une nouvelle religion conceptualisée par le bon docteur Max More :

"Nous mettons en question le caractère inévitable du vieillissement de la mort, nous cherchons à améliorer progressivement nos capacités intellectuelles et physiques, et à nous développer émotionnellement. Nous voyons l'humanité comme une phase de transition dans le développement évolutionnaire de l'intelligence. Nous défendons l'usage de la science pour accélérer notre passage d'une condition humaine à une condition transhumaine, ou posthumaine. Comme l'a dit le physicien Freeman Dyson, 'l'humanité me semble un magnifique commencement, mais pas le dernier mot" (Introduction à "Principes extropiens" 3.0).

Un délire de l’humain parfait flirtant dangereusement avec l'eugénisme et l'homme nouveau national socialiste qui a été abondamment inspiré la Science-Fiction d'avant et d'après guerre, du "Big Brother" d'Orwell au Meilleur des Mondes d'Aldous Huxley. Et que l'on a vu recyclé dans plusieurs films, notamment « Bienvenue à Gattaca » où des jeunes gens au patrimoine génétique parfaits étaient programmés pour partir à la conquête de l’espace…Pour mémoire, voyez plutôt ce petit extrait:

Etranges concepts

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C’est là, que défilent d’étranges concepts survolés lors de la soirée #Jesuismort. On a brièvement parlé de cryogénisation (vous savez, cette théorie – très en vogue il y a une dizaine d’années – consiste à se faire congeler pour ressusciter dans un futur proche ;) : déjà has been. Il fut aussi question d’ "uploading de l’esprit" ou comment transférer le contenu d'un cerveau sur disque dur, en l'ayant préalablement numérisé. Un ordinateur pourrait alors reconstituer l’esprit par la simulation de son fonctionnement, sans que l'on ne puisse distinguer un cerveau biologique « réél » d'un cerveau simulé...Totalement naïf et délirant vous diront tous les neurologues vu la Terra Incognita que reste notre cortex pour la science. Le concept apparaît pourtant dans "Matrix" et ses suites, mais aussi dans La Possibilité d’une Ile de Michel Houellebecq, où le "mind uploading" est évoqué comme un composant de la technique permettant de vivre, jeune, plusieurs vies successives avec un corps et un esprit identiques. De vaincre enfin l'obsolescence de l'humanité...

Les tenants du transhumanisme y croient dru comme fer: en plein débat sur la réforme de la loi sur la bioéthique (le texte est en débat au Parlement en ce moment), ils ne jurent que par les propositions « technoprogressistes ». Comme par exemple, « autoriser le libre choix de la gestion pour autrui, notamment dans le cas des mères porteuses », expliquait mardi soir Marc Roux, étrange président de l’Association Française Transhumaniste. Pour lui, c’est simple, « le législateur est très en retard sur ces sujets ».

Ces délires scientistes autour du transhumanisme connaissent déjà quelques prémisses. Vous voulez savoir si d'aventure vous n’avez pas quelques prédispositions pour avoir un cancer ou la maladie Alzheimer ? Une kyrielle de start-ups pullulent sur le Net, et vous proposent déjà d’analyser votre ADN, telle 23AndMe (oh tiens donc, fondée par l’épouse de Sergey Brin, un des fondateurs de Google…on y reviendra), d’explorer votre patrimoine génétique, ou plus prosaïquement de faire un test de paternité. Quitte à conserver dans leurs bases de données ces précieuses données très intimes vous concernant… au risque de les revendre dans quelques années.

"J'ai vu tant de choses que vous humains ne pourrez pas croire. De grands navires en feu surgissant de l'épaule d'orion. J'ai vu des rayons fabuleux, des rayons C, briller dans l'ombre de la porte de Tannahauser.Tous ces moments se perdront dans l'oubli. comme les larmes dans la pluie...", déclamait Roy, le répliquant de "Blade Runner" qui, comme nous pauvres humains, ne voulait pas mourir. Il s'est trompé peut-être...

Pour conclure, voici un extrait de ce bouleversant monologue de Fin:

Capucine Cousin et Jean-Christophe Féraud

samedi 29 janvier 2011

Anonymous; Science-fiction still relevant?; Malbouffe; Twitter Connections; Facebook Phone; Zélium; LCI Radio...

Eh oui, j'ai quelque peu délaissé me revue de liens hebdos ici dernièrement... Donc, petite moisson non exhaustive de liens récoltés sur le web, des blogs, Twitter et d'autres médias sociaux, à propos de ce qui a fait l'actu médias, tech, innovation, culture, people (eh oui, faut bien..). Et pour mémoire, vous pouvez me retrouver sur Twitter donc.

  • En pleine révolution tunisienne, alors que d'autres pays du croissant du Moyen-Orient commencent eux aussi à s'embraser, cette déclaration de principe des Anonymous, décrypté par le RWW, prend un certain sens. On a beaucoup parlé d'eux, alors que l'un de leurs membres (jeune crack techno âgé de 15 ans) vient d'être arrêté...
  • Le bouquin s'est déjà vendu à 30 000 exemplaires, et est en cours de réédition: le brûlot de Jonathan Safran Foer, Faut-il manger les animaux ? (Stock), dont Les Inrocks a été l'un des premiers à évoquer, enquête et réquisitoire contre l'élevage industriel, cristallise sous les débats sur l'alimentation, l'environnement, la malbouffe, et pourrait tous nous faire virer veggies...
  • Suite à mon billet où je me demandais si la science-fiction est en voie de disparition (dont la reprise chez Owni a suscité une bonne dose de commentaires... et un joli débat), Wired se pose à son tour la question ("Is Science-Fiction still relevant ?"), relayant ainsi un programme de l'Australian Radio National et son émission Future Tense, dédiée à l'avenir de la SF. Ça tombe bien.
  • Une des grosses infos media sociaux de la semaine: Twitter lance "Connections", sa propre version de l'outil "Mutual Friends" de Facebook. Lequel Facebook suscite de nouveaux des frayeurs chez les défenseurs de la privacy, en lançant un nouveau service pour les annonceurs, qui leur permettra d'exploiter dans leurs pubs les "likes" et commentaires des membres de leurs fan pages.
  • Facebook encore, à l'origine d'un petit bubuzz côté produits: il aurait missionné HTC pour lancer un (deux ?) téléphone mobile "Facebook" lors du Mobile World Congress de Barcelone, qui se déroulera du 14 au 18 février.
  • Cela ne vous aura pas échappé, Orange s'invite au capital de Dailymotion, à hauteur de 49%, pour un montant de 58,8 millions d'euros. Et se veut désormais "agrégateur et diffuseur de contenus".
  • Good news côté médias: alors que Bakchich s'éteint, le premier numéro de Zélium, un mensuel satirique, sera lancé le 11 février et tiré à 70 000 exemplaires en France et Belgique sur 24 pages et dans un format identique à celui du Canard enchaîné.
  • RIP Daniel Vermeille, co-fondateur contesté, en tous cas un des premiers collaborateurs à Rock & Folk, journaliste spécialisé dans le rock californien et le punk, compagnon de route des Rolling Stones lors de l'enregistrement de leur mythique Exile on Main Streets en 1972... Il est parti cette semaine, SDF presque anonyme.
  • Plus d'1,7 million de pages vues pour la reprise très rock et un rien destroy de Smooth Criminal de Michael Jackson... au violoncelle. J'adore. Joli coup de pub pour Stjepan Hauser et Luka Sulic.
  • RIP la French Connection. LCI Radio va fermer ses portes, faute de fréquence radio décrochée par TF1. Contente d'avoir parfosi contribué à cette émission. La dernière, enregistrée vendredi dernier, c'est par ici.

samedi 8 janvier 2011

Facebook en Bourse; Quora; Les Soirées de Paris; Bakchich; La Tribune; "Crevure néolibérale"; Branding; Wikileaks + "Le Monde"...

C'est la rentrée, alors on reprend les bonnes habitudes... Après quelques incartades musicales et en culture SF, petite sélection de liens hebdos en technologies, sciences, marketing, conso, médias, people etc.

  • C'était l'un des bubuzz de la semaine : Facebook pourrait entrer en bourse en 2012, d'après le ''WSJ''. Au point que sa valorisation monterait à 50 milliards de dollars, alors qu'il vient de boucler un nouveau tour de table de 500 millions de dollars. Ce qui a un petit goût de surévaluation, alors que Goldman Sachs étudie ses comptes, accessibles depuis peu…
  • Alors que le buzz monte aussi à propos d'un petit nouveau, Quora: les premiers testeurs ne sont pas forcement fans....
  • So chic: Philippe Bonnet ressuscite sur la Toile Les soirées de Paris d'Apollinaire, revue culturelle "fondée en 1912".
  • Bad news du côté des médias: Presse News l'annonçait vendredi, Mediapart semblait le confirmer samedi: Bakchich n'a plus les fonds pour continuer. Alors que la couperet était tombé la veille pour La Tribune, placée en procédure de sauvegarde, qui a 6 mois pour trouver des fonds.
  • Outre les nombreuses nouveautés (la tablette en guest star attendue) présentées au CES de Las Vegas, beaucoup ont glosé autour de la Keanu d'Orange ("riposte à la Kinect de Microsoft" pour certains): simple nouvelle nouvelle version de cette caméra 3D déjà présentée par Orange Valley en... janvier 2009 - et toujours pas commercialisée depuis.
  • La lettre ouverte - polémique "d'une crevure néolibérale aux jeunes chômeurs" publiée cette semaine sur Rue89 : objectif atteint en termes de VU, avec près de 150 000 visiteurs...
  • Free vient de lancer sa nouvelle campagne pour la Freebox v6, avec 4 nouveaux spots TV: orchestrée par Ogilvy, et une campagne d'affichage gérée en interne. Pas encore reçu la mienne, d'ailleurs...
  • Dans les coulisses du partenariat Wikileaks-Le Monde - Un joli coup pour fin 2010, qui lui a permis d'être associé à un des sites les plus secrets - et les plus en vue. En octobre 2010, Le Monde devient le cinquième média partenaire de Wikileaks, site spécialisé ... Enquête (accès payant sorry) dans Stratégies de la semaine, qui m'a valu quelques coups de fils dudit quotidien...

dimanche 14 novembre 2010

Taxation VoD; Strokes + Sofia coppola; Potiche; Facebook et droits d'auteur...

Une fois n'est pas coutume, ma sélection hebdo de liens liens d'articles, billets, photos... lus ailleurs, en innovation, marketing, médias et culture numérique, people.

  • Au JO du jour, le décret encadrant les services de médias audiovisuels à la demande (VoD, Catch-up TV). Une nouvelle taxe s'annonce donc, j'y reviendrai sûrement...
  • Médias: nouveaux modèles économiques et questions de déontologie : demandez le rapport , co-écrit par Philippe Couve (journaliste, ex-RFI) et Nicolas kayser-Bril (Owni), à quelques jours des Assises du journalisme de Strasbourg.
  • J'en parlais cette semaine, de même qu'elle a contribué à promouvoir de nouveaux formats (cassette VHS, DVD) à leurs débuts, l'industrie du porno pourrait bien populariser la 3D sur les écrans télé...
  • Pour le plaisir des yeux et des oreilles, ce très joli single des Strokes (où l'on reconnaît un de leurs premiers titres), à entendre dans le prochain film de Sofia Coppola.
  • Courez voir "Potiche" au cinéma, comédie grand public et tout à la fois satire sociale bien menée, 70s mais tellement dans l 'air du temps... D'ailleurs, Catherine Deneuve fait la couv' de ''Têtu'' ce mois-ci comme cougar (c'est pas moi qui le dit).

dimanche 31 octobre 2010

Course à l'attention sur le net, prix ONA, Facebook + storytelling, Obsweb, journalistes frondeurs au Québec...

Et hop, comme de coutume, une petite sélection hebdo de liens d'articles, billets, photos... lus ailleurs, en tech, innovation, marketing, médias et culture numérique. Oui oui j'ai quelque peu délaissé ce blog ces derniers jours, because nouveau boulot dans une nouvelle rédac...

  • Papier correct du Fig Mag de ce weekend sur les nouvelles stars du Net, entre stars de Twitter et de la blogosphère, tels Vincent Glad, @papilles, @jeanlucr, @Korben...
  • ... Mais ruez-vous plutôt sur cet excellent billet de @Cyceron sur la course à l'attention et la société de l'ego, où il cause personal branding et perpétuelle quête de reconnaissance et de notoriété via les réseaux sociaux, dans une société où l'on nous demande d'être toujours très occupés, hyperactifs et (forcément) LOL.
  • Facebook se met à son tour au storytelling: il va désormais vous raconter l’histoire que vous partagez avec un autre membre, d'après Mashable, avec une nouvelle fonction, FriendShip Pages.
  • La palme revient au jeune et prometteur média expérimental Owni (dont j'ai déjà causé ici), qui vient de décrocher le prestigieux prix ONA de l'association américaine de journalistes multimédia Online News Association. Pas peu fière d'y avoir participé de temps en temps...
  • Preuve que, en matière de futur du journalisme online, les initiatives intéressantes se multiplient, avec la création d'un Observatoire du webjournalisme.
  • Samsung vient de dévoiler un écran transparent OLED : bluffant, à voir la vidéo.

dimanche 24 octobre 2010

Burger King, tutoriel Twitter, "XXI", Wikileaks chez Owni, hebdo érotique "Jasad"...

Une fois n'est pas coutume, mon butinage hebdo de liens sur la Toile : une revue de presse non-exhaustive autour de ce qui a fait l'actu techno / innovation / marketing & conso / médias cette semaine...

  • Le virtuel qui "s'ouvre dans le réel", avec par exemple la réalité augmentée sur les téléphones, la connexion et la géolocalisation en permanence, la puissance des réseaux sociaux, l'individu qui exprime sa personnalité "All about me"), la co-création.. Voilà les principales tendances de 2011 sur Internet qu'a dégagé l'agence de com' digitale Isobar.
  • Aller à Londres pour manger chez Burger King ? Si si, Eurostar a osé cet argumentaire publicitaire, alors que la Toile glosait sur le retour de Burger King en France...
  • Un tutoriel complet sur Twitter pour les pros : applications-clés, chiffres, usages en marketing, en recrutement... Dossier très complet chez FrenchWeb.fr.
  • Retour bienvenu chez @Couve sur la success-story de la revue trimestrielle XXI, revue exigeante qui mêle BD-reportage, photojournalisme et retour au journalisme de récit. Je m'y étais déjà intéressée il y a un an.
  • Boulets, vie de famille virtuelle, mise en scène du quotidien... Ce que Facebook a changé dans nos vies en dix points.
  • Dossier prospectif et optimiste bien intéressant chez Capital sur La France en 2020: pas d'accord sur tous leurs choix à propos des créateurs de start-ups prometteuses, à vous de vous faire votre opinion...
  • Ikea teste une forme de publicité innovante, des sortes de liens invisibles dans des vidéos YouTube: Owni a repris mon billet à ce sujet.
  • Allez lire ce portrait de Joumana Haddad écrivaine féministe et fondatrice de l'hebdo féminin et érotique Jasad, dont je parlais ici et .

dimanche 17 octobre 2010

Nielsen espionne sur les forums, The Social Network, reportages à la demande, Hadopi cherche attaché(e) de presse...

journaux

Week-end oblige, nouveau butinage de liens sur la Toile, sur Twitter et ailleurs, plusieurs choses qui ont fait l'actu médias / tech / pub / polémique, et qui ont retenu mon attention...

  • TF1 va toujours plus loin dans télé-réalité: on échappe à peine à "Secret story" (3 mois de diffusion infligés...), vous allez avoir droit à ça à partir du 29 octobre.
  • C'est le Wall Street Journal qui a levé le lièvre, Nielsen Co -institut connu pour sa recherche sur les médias), "grappille" les conversations médicales des internautes sur des forums de discussion tels que PatientsLikeMe.com... et revend les "données" aux labos big pharma. Flippant.
  • Ça ne vous aura pas échappé, The Social Network, la story de LA start-up de cette dernière décennie, Facebook revue par le brillant David Finsher, est sortie en salles cette semaine. Sur cette tragédie homerienne 2.0, portrait cruel du fondateur Mark Zuckerberg, allez dévorer ce passionnant papier de Wired, The inside story of the Facebook movie.

...Lequel Mark Zuckerberg a d'ailleurs précisé sa stratégie pour la Chine (où Facebook est censuré)... et commenté sa garde-robe, via Techcrunch http://tcrn.ch/bSUWXy by @jasonkincaid via @TechCrunch

  • Le papier d'Emmanuel Paquette, un brin cruel, n'a pas dû faire plaisir aux Rue89, Mediapart et autres Slate... Le papier a autant d'intérêt que les commentaires en-dessous.
  • La même semaine, le fondateur de Spot.US présentait pour la première fois à une poignée de journalistes français son concept de reportages à la demande, alors qu'il fait des petits en France (Glifpix ,et Jaimelinfo.fr): mon analyse chez Owni.
  • Mind the logo, Gap! Le #fail de Gap s'est confirmé cette semaine dans sa tentative de crowdsourcing marketé à donf, dont je parlais déjà il y a quelques jours dans ce papier.
  • Inaglobal, une sorte de média dédié à la culture numérique et aux médias, était lancé lors d'un joli raout lundi soir. Il sera alimenté par "400 contributeurs issus de 30 pays, et d'extraits des revues InaStats et Mediamorphoses", nous annonçait Matthieu Gallet, tout nouveau patron de l'Ina. Pour Frédéric Mitterrand, c'est sûr, ce sera "un Wired a la française". Wow, j'attends de voir...

dimanche 10 octobre 2010

David Bowie forever, bébés facebookés, niche fiscale, crowdsourcing...

journaux

Quels liens pour cette semaine ? Repérages high-tech, actu musicale, réseaux sociaux, pratiques journalistiques...

  • D'abord, côté musique, ce billet de Jean-Christophe Féraud, à cause duquel je suis toujours amoureuse de David Bowie (well, Mr David Robert Jones). Tiens, et toujours côté musique, même si ça n'a rien à voir, mais Pascal Nègre débarque sur Twitter, il compte déjà 718 followers...
  • Un profil Facebook pour votre nouveau-né ? Près de 5 % des bébés de moins de deux ans auraient leur propre profil social, d'après cet article. Flippant... Alors que Télérama consacrait (enfin) sa couv' au droit à l'oubli sur le Net.
  • Cela en fait rire certains, mais Archos s'apprête à lancer 5 tablettes, et rêve toujours de rivaliser avec Apple.
  • Sur le sujet pour le moins polémique de l'abattement fiscal des journalistes, dont je parlais , @cyceron s'en empare à son tour.
  • "Ami", "partager", "liker" "j'aime"... Toute une nouvelle terminologie autour des univers de Facebook et Twitter sur laquelle revient ce papier publié chez Owni.
  • Chez Owni toujours, d'ailleurs je suis revenue dans ce papier sur la notion de crowdsourcing dans le marketing. Je me souviens avoir écrit sur cela pour la première fois pour Les Echos en octobre 2007.

lundi 9 août 2010

Vers la reconnaissance des visages sur les photos Facebook ?

Ça y est, ce blog quelque peu délaissé - changements professionnels, remise à jour de mon bouquin (j'y reviendrai), trêve estivale looooin oblige - reprend du service.

Et c'est potentiellement une petite bombe qu'a annoncée Facebook qui m'a fait tiquer. Certes, l'annonce a été faite il y a un mois, mais étonnement, est passée inaperçue. C'est (presque) officiel, le réseau social prévoit d'introduire un système de reconnaissance automatique des visages sur les photos publiées par ses membres.

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C'est dans un billet publié sur le blog officiel de Facebook que Sam Odio, directeur produit de la division photos de Facebook, en a fait l'annonce: cette fonctionnalité est actuellement en tests.

Techniquement, Facebook se baserait pour cela sur une technologie similaire à celle que proposent les appareils photo numériques. Il a fait appel pour cela à Divvyshot, une start-up spécialisée dans la reconnaissance faciale des images, qu'il vient justement de racheter.

Officiellement, elle permettrait de rendre l'étiquetage des photos (les fameux tags) plus simple. A chaque nouvelle photo ajoutée, le système ajoutera le nom de la personne présente sur le cliché, en fonction des photos déjà étiquetées sur le réseau. Il y aura deux étapes: d’abord en indiquant à Facebook qu’un ou plusieurs visages se trouvaient sur une photo. Ensuite en indiquant le nom de la personne ainsi repérée (ou "taguée").

Vie privée

Reste que ce marquage automatique des visages sur Facebook risque de poser une nouvelle fois la question de la protection de la vie privée des utilisateurs. Certes, la société précise que chaque marquage automatique passera par l'approbation manuelle de l'utilisateur. Mais on le sait, "détagger" ses photos sur Facebook relève du parcours du combattant est loin d'être simple (c'est toujours délicat de demander à l'auteur d'un album photos indélicat de nous détagger dans celui-ci...).

Et quand Sam Odio explique que "la possibilité de taguer ses photos n'est qu'un début", je flippe un peu. Puisqu'il veut "faire gagner du temps" aux abonnés, pourquoi n'irait-il pas jusqu'à concevoir une reconnaissance automatique des visages sans intervention humaine ?

Prudence chez Google

Google teste aussi aussi ce service - très prudemment, et en toute discrétion, sur son service de classement et de retouche de photos Picasa. La firme de Mountain View propose en effet ce service avec la V3 de Picasa - tout comme iPhoto d’Apple.

Je l'ai testé, le service est plutôt efficace: une large majorité des visages présents sur des photos sont automatiquement reconnus par le logiciel. Picasa apprend vite qui est qui dès que l’utilisateur lui indique qui se trouve sur une dizaine de photos. Le logiciel suggère des noms en fonction des visages repérés. Et très souvent, ce sont les bonnes personnes qui sont identifiées.

Certes, Google le promet, il n'utilise pas pour l'instant pas la reconnaissance faciale de manière plus importante dans ses produits, et si tel était le cas, il le ferait "de manière transparente". Mais techniquement, il peut l'intégrer à d'autres services. Comme l’application "Goggles", qui permet la recherche sur le Web via des photos prises avec son téléphone.

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