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mercredi 3 avril 2013

Des "hubots" plus vrais que nature

Une sorte de fable très contemporaine, une nouvelle forme de science-fiction contemporaine. Cela se passe dans une ville moyenne de Suède d'aujourd'hui, avec ses pavillons bourgeois, ses familles banales... Pourtant, on voit dans les familles, les usines, les restaurants d'étranges créatures, à première vue des "real humans", tout juste trahies par leur regard un peu trop fixe, leurs expressions sur le visage un peu figées, les gestes un rien mécaniques. C'est une des séries les plus troublantes du moment que diffuse Arte à partir de ce jeudi soir, Real Humans (100% humain), Akta Människor en VO, pour laquelle la chaîne s'est d'ailleurs offert, fait rarissime, une vaste campagne de pub en radio, cinémas et affichage - vous n'avez pas pu rater ces étranges affiches dans le métro, avec ces personnages au regard fixe...

"Hubots" auxiliaires de vie

C'est donc l'histoire d'une société ordinaire, où il est devenu naturel que les humains cohabitent avec des "hubots", nouveau néologisme pour désigner ces "humans-robots", une nouvelle génération de robots, encore plus perfectionnés que les traditionnels robots androîdes qui peuplent les films de science-fiction classiques... Pas de fusées ni de monde futuriste dans la série suédoise ultra réaliste, écrite par Lars Lundström: tout est très contemporain, à part donc ces hubots multifonctions, qui ne sont jamais las ni fatigués, auxiliaires de vie, assistants aux personnes âgées, nurses pour enfants, aides au ménage, employés modèles en usines, serveurs dans des restaurants... Et même auxiliaires très sexuels. Dans cette fiction, ils sont devenus indispensables aux humains, et semblent presque se fondre dans cette société. Dans cette série que j'ai eu la chance de dévorer en avant-première (et que j'ai chroniquée dans le dernier numéro de Stratégies), le réalisateur s'attache à mettre en scène les diverses et étranges formes de cohabitation qui naissent entre humains et robots. Et les conflits que cela va provoquer.

Les robots de service, ils sont devenus omniprésents au cinéma (forcément), mais aussi dans des expos, livres, débats sur l'avenir de l'humanité (voire des transhumains), l'industrie de la robotique de services fait débat, ils ont un salon dédié, Innorobo... C'est intéressant de les voir mis en scène dans une série télé grand public. Le sujet fait débat, alors qu'un jour, les robots de services débarqueront inévitablement dans notre quotidien.

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Ici, donc, des androïdes très ressemblants aux humains, à l'exception de cette étrange prise USB fichée dans leur nuque, par laquelle ils peuvent se recharger sur une prise électrique - comme un simple téléphone. Mais qui permet aussi, à partir d'une tablette tactile, de vérifier leur identité, leur propriétaire, les paramétrer... Mais aussi les pirater, y installer des "mises à jour" très particulières, par exemple pour les transformer en partenaires sexuels hors pair.

Le réalisateur Lars Lundsdröm met ainsi en scène les diverses formes de cohabitation qui pourraient naître entre humains et robots. Mais aussi les formes de rejet qu'ils pourraient susciter, une fois devenus trop menaçants: car ils commencent à prendre des emplois aux humains, dans les usines par exemple, où ils séduisent les services RH avec "leur marge de 0% d'erreur". Un jeune humain attiré par la hubot domestique se voit qualifié par sa psy de "transhumainsexuel". On commence à voir en ville des hubots prostitués par des humains, avec même une maison close dédiée... La, la réalité rattrape déjà la fiction : après tout, il existe déjà des robots sexuels, tel Roxxxy...

Au point que se développe un mouvement radical, anti-hubots, intitulé "Real Humans", un "label" que certains humains radicaux placardent à l'entrée de leur maison. Un vocabulaire anti-hubots apparaît: PacMan, trucs, machines...

Les trois Lois d'Asimov ; des robots plus que des objets ?

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Surtout, la série pose des questions vertigineuses, incluant les Trois lois de la robotique édictées par le maître de la SF, Isaac Asimov.

Un robot ne peut porter atteinte à un être humain, ni, restant passif, permettre qu'un être humain soit exposé au danger.

Un robot doit obéir aux ordres que lui donne un être humain, sauf si de tels ordres entrent en conflit avec la Première loi.

Un robot doit protéger son existence tant que cette protection n'entre pas en conflit avec la Première ou la Deuxième loi.

Pour cela, la série met en scène plusieurs catégories de hubots: les hubots domestiques, vendus neufs ou d'occasion, diversement traités, dans des rapports maître/esclave ambigüs, parfois des objets sexuels. Mais aussi des hublots "affranchis", devenus autonomes suite à l'installation d'un code de programmation par un humain geek, David Eisner.

Au fil des épisodes, parfois au contact des humains, on voit ces hubots mîmer de mieux en mieux des émotions (or, l'émotion est le propre de l'homme..), voire apprendre à faire des blagues, à mentir. On voit ainsi un hubot affranchi se prendre de passion pour la Bible. Une hubot rêver de se mettre en couple avec un humain. Ou un hubot devenu compagnon très sexuel se rebeller lorsque sa propriétaire le débranche temporairement ("J'ai un interrupteur, donc tu me traites comme une machine ?").

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Sont-ils des objets, ou un peu plus ? Et si les hublots étaient dotés de libre-arbitre ? Impossible bien sûr, mais la série le suggère : les hubots apprennent au contact de l'homme, et mîment de mieux en mieux leurs sentiments... Après tout, récemment encore, dans les pages Technologies du Monde, Kate Darling, chercheuse en propriété intellectuelle et en politique de l'innovation au Massachusetts Institute of Technology (MIT) de Boston, militait pour "donner des droits aux robots", précisant : " Je parle plutôt de quelque chose comme les lois qui protègent les animaux. A eux non plus, on n'accorde pas le droit à la vie, mais on a édicté des lois pour les protéger contre la maltraitance".

Métaphore sur l'altérité

Real Humans est une métaphore sur l'alterité, la discrimination. Un reflet de notre société, où la domination de classe se poursuit en silence, avec une certaine violence sociale et politique, terriblement contemporaine Et pose des questions : un hubot, "véhicule motorisé" d’un point de vue juridique, peut-il être considéré comme victime de discriminations, ou de maltraitance ? Une avocate se voit saisie de la question par deux femmes, qui estiment avoir été discriminées - ainsi que leurs amants-hubots - car refoulées avec ceux-ci à l'entrée d'une boîte de nuit.

Je me demandais il y a quelques temps si la science-fiction n'était pas un genre en train de disparaître. Ce n'est pas sûr... En tous cas, elle renaît avec ce nouveau genre de séries télé. Aux Etats-Unis, la chaîne SciFi diffuse depuis janvier ''Continuum'', lancée par la chaîne câblée canadienne Showcase, qui met en scène Kiera, une femme flic de 2077 renvoyée malgré elle en 2012, où elle poursuit dans leur fuite temporelle un groupe de terroristes décidés à changer, depuis le passé, la face du futur. Et il y a quelques jours, Lana et Andy Wachowski annonçaient se lancer dans la réalisation d'une série, qui sera diffusée en 2014sur la plateforme Netflix, où il sera question de robots et de science-fiction.

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mardi 4 août 2009

Les robots pole dancers de Giles Walker

Quand on regarde cela, c'est troublant, ne fut-ce que parce que cela mime une sexualité (future et très hypothétique) des robots. C'est le chercheur Giles Walker qui a imaginé cette danseuse-robot, avec une musique idoine, tout aussi étrange.

Il y a actuellement des travaux de recherche qui s'ébauchent sur les aspects "émotionnels" des robots, susceptibles de les rapprocher des humains. Dont des recherches sur les robots susceptibles de mimer les émotions humaines : le projet de recherche européen Feelix Growing vise ainsi à à élaborer des robots capables d'interagir avec les êtres humains et de ressentir des émotions, comme j'en parlais dans cette enquête pour Les Echos (en accès payant pour les non-abonnés, sorry).

Il y avait aussi eu, en 2007, cette thèse universitaire assez troublante de David Levy, chercheur britannique en intelligence artificielle, sur la "Relation intime avec un partenaire artificiel", son livre, Love and Sex with Robots, et son film, "Sex life of robots", montrant des androïdes de toutes sortes s’adonner de façon débridée aux plaisirs de la machine, comme j'en parlais dans ce billet.

Giles Walker, lui, met aussi en avant l'aspect écolo-friendly de sa démarche, les robots étant fabriqués à partir de pièces détachées de récup', issues de décharges. "Les moteurs qui font bouger les pièces sont un moteur d’essuie-glace de 12V et un moteur de fenêtre électrique et ils sont contrôlés par un ordinateur avec un programme DMX", précise Vincent Albry sur son blog.

jeudi 5 avril 2007

Un projet de R&D sur des robots pvt interagir et comprendre l'homme

C'est un des projets de R&D les plus excitants du moment en robotique - mais où se mêlent aussi sciences cognitives, industrie, voire éthique . J'en avais parlé de façon un peu rapide , j'ai enquêté dessus au labo de recherche ETIS (université de Cergy-Pontoise), pour une parution dans "Les Echos" d'aujourd'hui.

Pour résumer, Feelix Growing, un projet de recherche européen, vise à développer des robots capables d'apprendre des humains et d'interagir avec eux en mimant leurs émotions. Des laboratoires français expérimentent déjà cela.

Si cela aboutit, d'ici quelques années, des robots seront peut-être capable de détecter et de mimer des émotions propres aux humains. Par cette forme d’imitation, montrant qu’ils comprennent l’homme, ils deviendront socialement plus acceptables... Ou comment la réalité pourrait rejoindre des fantasmes affichés il y a une dizaine d'années dans des films comme Blade Runner ou Terminator'' . Parmi les partenaires, outre l'université de Hertfordshire (Grande-Bretagne), qui coordonne le projet, figurent notamment l'université de Portsmouth, l'Ecole polytechnique de Lausanne (Suisse), l'Institut de communication et des systèmes informatiques (Grèce), et l'université de Cergy-Pontoise. Ainsi que deux entreprises, la société danoise Entertainment Robotics, et la française Aldebaran Robotics. Sur les robots humanoïdes d'Aldebaran Robotics, l'équipe d'ETIS va tester des procédés d'imitation, et leur apprendre à être interactifs avec l'homme. Cette start-up française va commercialiser courant 2008 son robot humanoïde grand public Nao. Programmable, il pourra " voir et reconnaître son propriétaire, et détecter son humeur à sa voix ", assure Fabien Bardinet, vice-président d'Aldebaran Robotics.

ETIS, pour sa part, planche déjà sur les sciences cognitives et la cybernétique depuis plusieurs années. A mon avis, un des volets les plus passionnants de ses travaux est qu'il travaille depuis 1994 avec l'équipe de Jacqueline Nadel, psychologue spécialiste de l'autisme, directrice d'une équipe de recherche à l'hôpital de la Salpetrière à Paris. Ses travaux sur l'autisme ont montré que chez les enfants, imiter quelqu'un est une manière de jouer, mais aussi de communiquer, d'apprendre de l'autre, et d'imiter ses buts. Et à terme d'interagir avec lui. Un modèle peut-être transposable aux robots - C'est en tous cas l'une des clés du projet Feelix Growing.... Les deux équipes ont déjà élaboré depuis 2000 un robot doté d'une face animée, qui reconnaît Philippe Gaussier, et est capable de reproduire ses mimiques, comme froncer les sourcils, grâce à un système de neurones artificiels qui lui tient lieu de cerveau. L'équipe d'ETIS tente d'enseigner au robot une forme d'imitation, qui doit permettre aux robots "d'apprendre un répertoire de tâches, sous la forme de séquences sensori-motrices. Sur le long terme, cela permettra aux humains d'enseigner des actions à des robots sans avoir à les programmer. Cet apprentissage aboutit à une interaction, où les mécanismes émotionnels étudiés dans le projet Feelix Growing jouerons un rôle important pour le contrôle du système ", décrypte Pierre Andry, de l'équipe ETIS.

 Face à face entre Philippe Gaussier et "son" robot Image ETIS

prototype Aldebaran Robotics Prototype Nao de chez Aldebaran Robotics - Image Aldebaran Robotics

tests robot Aïbo - ETIS Tests avec le robot Aïbo de Sony chez ETIS Image ETIS