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mardi 9 octobre 2012

Comment les médias peuvent-ils aspirer l'innovation ?

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Il s'appelle Teleportd. C'est un agrégateur de photos qui scanne toutes les photos géolocalisées sur des applications mobiles "sociales" et les médias sociaux (Tumblr, Twitter, Twitpic, etc), et peut faire remonter, à partir d'un mot-clé, des photos indexées par rapport à leurs métadonnées. Pratique, pour des médias qui veulent enrichir leurs articles de photos, ou qui ont besoin de photos, même prises par des amateurs, pour des articles d'actualité immédiate... Bientôt, un système permettra d'identifier automatiquement l'auteur de la photo.

Teleportd a décroché le prix Startup for News, attribué par le Global Editor network, association qui regroupe des rédacteurs en chefs, et s'était penchée sur une présélection de 13 start-ups.

Il incarne parfaitement cette nouvelle génération de start-ups qui pourraient être complémentaires et indispensables aux médias demain, en leur apportant un service très spécifique, qu'ils n'auraient pas forcément eu l'inventivité de développer en interne. Cela résume toute la question du rapport des médias à l'innovation, et aux start-ups, qui était au cœur d'un (très bon) débat organisé lundi 8 octobre au soir par le Social Media Network, le Social Media Club France, Xperience et Satellinet à La Cantine.

Comment les médias peuvent-ils innover ? Incubateur intégré, simples collaborations avec des jeunes pousses, carrément rachat de start-ups, embauches de nouveaux profils hybrides ?... On en est qu'aux débuts, les grands médias classiques, audiovisuels ou groupes de presse, tâtonnent.

"Incubateur" au Groupe Express Roularta

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Débat StartUpNews à La Cantine - photo Laurent dupin

Il y a eu cette petite bombe, lancée mi-septembre. Le Groupe Express Roularta a annoncé le lancement de L'Express Ventures, "accompagnateur" plutôt qu'incubateur de start-ups, co-fondé avec 4 entrepreneurs issus du Net, dont Stéphane Boukris (Faismesdevoirs.com, Rentabiliweb) et Simon Istolainen (MyMajorCompany). J'en parlais en avant-première en juillet dans Stratégies, cette société, dont le groupe Express détient 58% des parts, accompagnera une dizaine de projets par an. L'horizon est large: start-ups spécialisées dans le marketing digital, le e-commerce, les apps mobiles, les nouveaux médias... "Nous aurons le 'final cut' sur les projets qui seront retenus. Nous assurerons leur promotion, et les entrepreneurs l'accompagnement et l'encadrement. Pour nous, cela permet de faire de la veille, et d'acquérir des compétences", résume Corinne Denis, directeur général adjointe et directrice multimédia du groupe.

Tout est là: si le groupe Express y va avec prudence (il n'investira pas ou très peu dans ces start-ups, prenant au maximum 10% du capital), cela lui permet avant tout de s'offrir une veille technologique sans précédent, et d'aspirer de l'innovation.

Premier "hackathon", appels d'offres auprès de start-ups chez France Télévisions

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Tous les "vieux" médias cherchent de nouvelles recettes dans cette course à l'innovation. Chez France Télévisions aussi. "C'est le défi de toutes les entreprises de médias traditionnelles. La nouveauté d'aujourd'hui, ce n'est pas le lancement de D8, mais l'arrivée de 13 chaînes thématiques YouTube. Or les groupes ne sont pas toujours prêts à intégrer de manière efficace l'innovation", lâche Eric Scherer. Directeur de la prospective et de la stratégie numérique à France Télévisions, il est arrivé précisément il y a deux ans avec cette équipe en charge de l'innovation au sein du mastodonte audiovisuel.

Parmi ces chantiers, il y a eu le lancement du site d'information continue FranceTV.info, une trentaine de recrutements à la clé, dont des nouveaux profils: développeurs, front page editors... Mais pour demain, "des acteurs issus de start-ups vont nous aider", annonce-t-il. "Ce matin, nous examinions les résultats de l'appel d'offres que nous avons lancé, qui porte sur les nouvelles mesures d'audience dans la social TV. Nous avions des start-ups parmi les candidats".

Car des problématiques toutes nouvelles apparaissent pour le groupe audiovisuel. "Nous avons des sujets nouveaux: la social TV, inexistante il y a 18 mois, la programmation de flux... On voit des start-ups nous proposer des services comme enrichir un programme sur un smartphone, ou reconnaître un programme sur un autre terminal", poursuit Eric Scherer.

Pour aspirer des nouvelles idées, le groupe a ainsi opté pour l'organisation de son premier "hackathon" les 19 et 21 octobre, ce marathon de la programmation initialement prisé par les hackers, repris par des grosses start-ups comme Facebook ou Criteo. La R&D de France Télévisions espère ainsi repérer et attirer des développeurs et designers porteurs de projets d'apps TV innovantes.

Collaborations avec des start-ups au Monde.fr

LeMonde.fr, quant à lui, a choisi de travailler au coup par coup avec des start-ups, "par exemple pour des coproductions de webdocumentaires ou d'interfaces ludiques", précise Alexis Delcambre, son rédacteur en chef. Et de citer le jeu Primaires à gauche, développé en 2011 par KTM Advance et Florent Maurin. On pense aussi aux collaborations du Monde.fr avec Upian, depuis plusieurs années, sur des webdocumentaires depuis le magnifique Le corps incarcéré en novembre 2009, comme j'en parlais alors.

Pour autant, les médias doivent-ils aller jusqu'à ce doter de Media labs, ces équipes dédiées aux projets innovants ? Au Monde, certes, une équipe, le pôle Nouveaux écrans, dirigé par Edouard Andrieu, planche sur les projets d'applis mobiles et les nouveaux supports (dont Windows 8). Pour autant, si le trio webdesigner + webdevelopper + journaliste, initié par Owni, commence à s'imposer dans certaines rédactions, "avoir un labo dédié implique un risque de déconnexion de l'équipe par rapport aux besoins réels de la rédaction. Nous préférons monter une équipe isolée au sein de la rédaction juste le temps de produire un nouveau format ou projet", explique Alexis Delcambre.

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Le Véritomètre Owni/iTélé

La question est moins complexe au sein des nouveaux médias. C'est évident pour Owni, qui a créé ce modèle de collaboration entre développeurs et journalistes, avec ses expérimentations d'avant-garde en data journalism. Les médias traditionnels font même appel à lui, comme une sorte de start-up, sur certains projets: "par exemple, nous avons fourni notre Veritomètre à iTélé. Et nous menons une veille en datajournalism et innovation avec notre rubrique Les data en forme", précise Jean-Marc Manach, journaliste à Owni.

De même pour Rue89 : il a ses développeurs en interne, qui travaillent en binôme avec des journalistes. "Nous servons de labo d'innovation pour le Nouvel Obs (depuis son rachat par le groupe ndlr)", admet Yann Guégan, rédacteur en chef adjoint à Rue89.

Aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, plusieurs groupes de médias se sont déjà dotés de leurs incubateurs et media labs : Philadelphia Media Network, éditeur de The Inquirer, avec son incubateur Project Liberty, Turner Broadcasting, maison mère de la chaîne CNN, avec son incubateur le Media Camp, ou encore, l'Irish Times, qui vient d'ouvrir le sien.

A lire aussi:

Les grands groupes médias peuvent-ils encore innover ? Chez Cyrille Franck

Innovation et information : quelles synergies entre startups & groupes médias ? Storify de Mael Inizian

Organisation : ce que les start-up enseignent aux groupes média par Gilles Donada

mardi 25 novembre 2008

Les clips des salariés de France 3 contre le choc annoncé de la fin de la pub

Plutôt que d'ouvrir un blog collectif pour dénoncer la fragilité que risque de connaître France Télévisions lorsqu'elle ne pourra plus diffuser de publicité, à partir de début 2009, des journalistes de France 3 ont préféré monter des petits clips vidéos, mis en avant par Rue89 dans ce billet

D'où ce clip vidéo, "7 familles maçon télé publique", diffusé sur Dailymotion. Ou encore ces vidéos, où l'humour et l'ironie sont leurs armes pour dénoncer un "service public en danger". Avec toujours ce slogan, à la fin, "Et vous, vous étiez où quand le service public était en danger?" "Sauvez France 2, 3, 4, 5, Ô et la démocratie".

Comme celle-ci...

Ou celle-là, avec Carla...

mercredi 13 février 2008

L'audiovisuel public et Les Echos en grève aujourd'hui

Journée un peu particulière pour les médias français, puisque les journalistes de l'audiovisuel public (soit du groupe Radio France et de France Télévisions) soit en grève aujourd'hui, en réaction aux annonces de Nicolas Sarkozy devant la presse le 8 janvier dernier, sur la fin de la publicité sur France Télévisions, bouleversant ainsi tout le monde économique sur lequel reposait la télévision publique française jusqu'à présent... Alors que le même jour, fait assez cocasse, la Direction des médias négociait avec les radios du groupe Radio France... l'introduction de publicités sur leurs antennes - sic.

Pour avoir une vue globale sur ce vaste sujet, qui concerne rien de moins que l'avenir du paysage audiovisuel français, je vous renvoie à cette analyse dans Les Echos, et à cette enquête parue dans Le Monde d'aujourd'hui, qui retrace comment Nicolas Sarkozy a brutalement décidé d'annoncer cela le 8 janvier. Une phrase, révélatrice, aide à mettre en lumière toute la "logique" un peu folle de cette annonce: "Nicolas Sarkozy va s'envoler pour l'Egypte, en compagnie de sa future femme, Carla Bruni. Il a promis de tenir, le 8 janvier, sa première conférence de presse. Faire face aux journalistes, c'est sa façon de réaffirmer sa "rupture" avec un Jacques Chirac souvent retranché dans son palais élyséen. Autour de lui, pourtant, les plus proches ont compris son problème : il n'a aucune annonce choc - aucun "fumigène", comme disent ses amis - à livrer à l'opinion qui commence à douter"...

Parallèlement, la rédaction des Echos (journal auquel je collabore) s'est aussi mise en grève aujourd'hui, en réaction au départ de son directeur de la rédaction, Erik Izraelewicz, pour La Tribune, dont il deviendra dans les prochains jours directeur des rédactions et directeur général adjoint. Visiblement, le passage des Echos aux mains du groupe LVMH, déjà très mouvementé l'année dernière (cf mes billets précédents à ce sujet), ne se passe pas très bien. Erik Izraelewicz a dénoncé hier les "interventions" du nouveau président du groupe Nicolas Beytout, selon des participants. Il a notamment dépeint "une situation difficile liée à des vexations, humiliations, interventions de Nicolas Beytout et du nouvel actionnaire", LVMH. Le directeur de la rédaction a estimé que M. Beytout n'aurait "jamais accepté de tels agissements de la part de son directeur général", quand il était lui-même directeur de la rédaction des Echos puis du Figaro, a indiqué un autre participant. M. Beytout s'est ensuite exprimé devant les salariés, sans parvenir à les convaincre", d'après le communiqué émis par les délégués syndicaux et la société des journalistes que j'ai reçu. Réunis en assemblée générale hier, les salariés ont décidé de ne pas faire paraître le journal ce mercredi afin de manifester leur "défiance" envers la direction, à la suite de cette annonce. A voir donc, les évolutions éventuelles aujourd'hui.