Par Capucine Cousin le dimanche 23 janvier 2011, 15:33 - Marketing & conso
Un univers noir et rose, gentiment trash et étrange, sous influences
gothique, manga, de Twilight, Harry Potter, ou encore entre Edward
aux mains d'argent et Les noces funèbres de Tim Burton :
après ses gentilles Barbie et autres Polly Pocket, le mastodonte américain du
jouet Mattel frappe fort en lançant en France une nouvelle marque,
Monster High. Ici,
ses héroïnes ne sont plus des gentilles petites filles en rose ou des poneys
(souvenez-vous, "Mon petit poney", jouet du groupe Hasbro, qui cartonnait dans
les années 80), mais des demoiselles dark un rien trash, de court vêtues, et
descendantes de monstres.
Le pitch: six personnages descendants de monstres illustres (histoire de
créer une continuité), Dracula et autres Frankenstein, et leur quotidien au
collège. Les demoiselles, au look pas exactement enfantin, sont dans un univers
fantastique, qui multiplie avec humour les codes gothiques, basé sur le noir et
les couleurs sombres : fantômes, araignées, têtes de mort, cercueils=...
Avec quelques touches de couleurs vives et des nœuds roses qui renvoient à un
univers enfantin.
Toi aussi, deviens gothique
Pour lancer cet univers en France (déjà lancé aux Etats-Unis en juin 2010,
et dans quelques autres pays européens ces dernière semaines), Mattel a déployé
l'artillerie lourde: les six personnages donnent lieu à des poupées bien sûr,
dans un autre genre que la Barbie blonde peroxydée ou que Ken...
Mais aussi une kyrielle de jouets et accessoires plus... particuliers: dans
la lignée des teen movies à succès mettant en scène des vampires, le
tome 1 de Monster High (signé par Lisi Harrison sera présenté au Salon du Livre
en mars. Outre la web-série de 15 épisodes diffusée sur le site, vous n'échapperez pas au clip
déjà diffusé sur YouTube ...
Sans compter les produits dérivés classiques - T-shirts, sacs, porte-clés,
goodies.. Mais aussi des accessoires plus décalés: des nounours (accompagnés
d'accessoires de poupées vaudoues), un "carnet secret des horreurs" (agrémente
d'un hurlement enregistré à chaque fois que l'on l'ouvre - si si, j'ai testé),
une "machine à tatouer" (qui permettent aux petites filles de se faire des
décalcomanies ou tatouages éphémères de têtes de mort par exemple)... Une vraie
trousse à outils pour tout futur gothique ;)
Bref, les parents vont adorer. Je plaisante bien sûr.
Exceptés les fans de la culture underground gothique et post-punk des années
70, je serai curieuse de voir s'ils vont accrocher à cette nouvelle offre, en
pleine vogue nostalgique, où plusieurs anciennes licences (un rien cuculs
d'ailleurs) connaissent une seconde jeunesse, comme Hello Kitty ou Charlotte
aux fraises - ce qui rassure les parents. Certes, l'enfant est prescripteur en
achats, mais pas pour les poupées... incarnation par excellence d'un modèle
féminin, et d'un cadre d'éducation pour les parents.
J'ai testé auprès de ma rédac, la plupart de mes collègues (jeunes parents
surtout) m'ont semblé, au mieux, circonspects face à ces étranges jouets... On
était quelques rares à trouver ça marrant ;)
Références post-punks
Le plus surprenant est que Mattel vise les enfants de 6 - 12 ans avec cette
nouvelle offre. Peut-être qu'il n'a pas le choix, face à des concurrents tels
que le groupe Hasbro ou des nouveaux-venus chinois sur le très juteux marché
des jouets pour enfants. Mattel s'aventure donc dans un univers gothique
post-punk... prisé des ados depuis quelques années - ça tombe bien, dans une
période où les enfants aiment s'approprier un univers destinés à leurs grands
frères / grandes sœurs, et avoir pour héros des personnages plus âgés
qu'eux.
On avait d'ailleurs vu d'autres tentatives de jouets pour enfants un peu
trash , comme avec les poupées -pouffes à maquillage outrancier et lèvres
siliconées (des "poupées-salopes" dixit un ami - et papa bien informé ;).
Mattel s'y est essayé en 2008 avec une nouvelle génération de Barbie un rien
vulgos (ce
point de vue d'une maman sur un forum est révélateur).
Mais surtout, Mattel surfe ainsi sur le même créneau que Emily the Strange
et Bad Alice,
dont je parlais ici, qui se sont déjà imposées comme des icônes rock et
gothiques... auprès des ados, voire des adultes.
Et justement, je me dis que, là encore, à tous les cas, ces Monsters high
vont faire mouche auprès de certains adultes, plutôt geeks, qui ont baigné ados
dans un univers post-punk / new wave, avec pour références Kiss, Bauhaus,
Siouxsie and the Banshees, Joy Division, Birthday Party, The Cure, UK Decay...
Un univers aussi heroïc fantasy que ne renieraient pas non plus les rôlistes
des années 90.