C'est un des projets de R&D les plus excitants du moment en
robotique - mais où se mêlent aussi sciences
cognitives, industrie, voire éthique . J'en avais
parlé de façon un peu rapide là, j'ai enquêté dessus au labo de recherche ETIS (université de
Cergy-Pontoise), pour une parution dans "Les Echos" d'aujourd'hui.
Pour résumer, Feelix
Growing, un projet de recherche européen, vise à développer des robots
capables d'apprendre des humains et d'interagir avec eux en
mimant leurs émotions. Des laboratoires français expérimentent déjà cela.
Si cela aboutit, d'ici quelques années, des robots seront peut-être capable
de détecter et de mimer des émotions propres aux humains. Par cette forme
d’imitation, montrant qu’ils comprennent l’homme, ils deviendront socialement
plus acceptables... Ou comment la réalité pourrait rejoindre des fantasmes
affichés il y a une dizaine d'années dans des films comme Blade Runner
ou Terminator'' . Parmi les partenaires, outre l'université de Hertfordshire
(Grande-Bretagne), qui coordonne le projet, figurent notamment l'université de
Portsmouth, l'Ecole polytechnique de Lausanne (Suisse), l'Institut de
communication et des systèmes informatiques (Grèce), et l'université de
Cergy-Pontoise. Ainsi que deux entreprises, la société danoise Entertainment
Robotics, et la française Aldebaran Robotics. Sur les robots
humanoïdes d'Aldebaran Robotics, l'équipe d'ETIS va tester des procédés
d'imitation, et leur apprendre à être interactifs avec l'homme. Cette start-up
française va commercialiser courant 2008 son robot humanoïde grand public Nao.
Programmable, il pourra " voir et reconnaître son propriétaire, et détecter son
humeur à sa voix ", assure Fabien Bardinet, vice-président d'Aldebaran
Robotics.
ETIS, pour sa part, planche déjà sur les sciences cognitives et la
cybernétique depuis plusieurs années. A mon avis, un des
volets les plus passionnants de ses travaux est qu'il travaille depuis 1994
avec l'équipe de Jacqueline Nadel, psychologue spécialiste de l'autisme,
directrice d'une équipe de recherche à l'hôpital de la Salpetrière à Paris. Ses
travaux sur l'autisme ont montré que chez les enfants, imiter quelqu'un est une
manière de jouer, mais aussi de communiquer, d'apprendre de l'autre, et
d'imiter ses buts. Et à terme d'interagir avec lui. Un modèle peut-être
transposable aux robots - C'est en tous cas l'une des clés du projet Feelix
Growing.... Les deux équipes ont déjà élaboré depuis 2000 un robot doté d'une
face animée, qui reconnaît Philippe Gaussier, et est capable de reproduire ses
mimiques, comme froncer les sourcils, grâce à un système de neurones
artificiels qui lui tient lieu de cerveau. L'équipe d'ETIS tente d'enseigner au
robot une forme d'imitation, qui doit permettre aux robots "d'apprendre un
répertoire de tâches, sous la forme de séquences sensori-motrices. Sur le long
terme, cela permettra aux humains d'enseigner des actions à des robots sans
avoir à les programmer. Cet apprentissage aboutit à une interaction, où les
mécanismes émotionnels étudiés dans le projet Feelix Growing jouerons un rôle
important pour le contrôle du système ", décrypte Pierre Andry, de l'équipe
ETIS.
Face à face
entre Philippe Gaussier et "son" robot Image ETIS
Prototype Nao de chez Aldebaran Robotics -
Image Aldebaran Robotics
Tests avec le robot Aïbo de Sony chez ETIS Image ETIS