
Il fallait y penser. Preuve peut-être que le numérique s'ancre vraiment dans
nos vies (oui je sais c'est banal... ;), mais surtout, que certains estiment
que la vie numérique a besoin d'un cadre formel, près de trois siècles
après la
Déclaration de droits de l'homme et du citoyen, et 51 ans après la Déclaration universelle des droits de
l'homme, une Déclaration des
droits numériques vient d'être présentée par Hervé Morin, président du
Parti du Nouveau Centre et ministre de la Défense.
Preuve que la protection des données personnelles et des libertés
individuelles a besoin d'être formalisée, réaffirmée. Mais aussi que le sujet
numérique est soudain devenu un sujet porteur pour les politiques.
Cette déclaration des
"Droits fondamentaux numériques", dévoilée le 23 juin, comporte 8
articles, et a été mise en ligne pour inviter les internautes à en
débattre.
En préambule, cette déclaration précise que "la révolution numérique ouvre
des opportunités sans précédent au service de la libre communication des
pensées et des opinions, du progrès, de la connaissance, de la diversité
culturelle et linguistique, du développement économique et social, de la
réduction des inégalités et de l'épanouissement personnel et professionnel". De
fait, "le développement mondial et accéléré d'Internet implique ainsi
l'adoption de garde-fous et la reconnaissance de nouveaux droits et libertés
".
Les huit articles, (forcément...) inspirés de la Déclaration de 1789,
balaient les sujets qui font de plus en plus débat, à l'heure de la
surexposition des internautes sur les moteurs de recherche, blogs et réseaux
sociaux.
Y sont ainsi abordées la question du "libre accès au réseau
Internet, neutre et ouvert" (article 1), le droit au respect
pour chacun "de sa vie privée numérique et au secret de ses
échanges numériques (art.2), la "dignité numérique", "droit
fondamental", la "propriété numérique", chacun étant "propriétaire des
informations numériques le concernant" (art. 4), dans la lignée de la
loi Informatique et libertés
de 1978, et dans la même veine, la "transparence numérique"
("Toute personne a le droit d'être informée de l'existence des informations
numériques la concernant", art.5).
Autre point, le "droit à l'anonymat numérique gratuit"
(art.6) ainsi que le "droit à l'oubli", chacun ayant " le
droit de retrait des informations dont il est propriétaire ou le concernant
(art.7). Des propositions déjà défendues par l'avocat Alain Bensoussan ou
Jacques Attali, qui estime, dans "Une brève histoire de l'avenir", que
le droit à l'anonymat numérique et au au secret sera bientôt un luxe... qu'il
faudra monnayer. Enfin, cette Déclaration se clôture sur le "droit à
une identité numérique" pour chacun. Surprenant, alors que chacun
possède déjà, de facto, une identité numérique qu'il façonne lui-même au gré de
ses posts, billets, commentaires, articles, profils... publiés sur la Toile,
dans des forums, blogs et autres réseaux sociaux.
Bon, très bien, cela résume bien les problèmes sociologico/éthiques que
connaissent Internet et ses pratiques actuellement. Et après ? On ne sait
pas trop ce que ce texte va devenir. Un appel à commentaires a été lancé sur le
site, tout comme via le fil
Twitter dédié. Chaque article est commenté. La note de l'article premier
(Le réseau Internet) relève ainsi que "le droit à une libre utilisation du
réseau s'oppose à toute forme de filtrage par les pouvoirs publics, sauf pour
des motifs d'ordre public comme, par exemple, la lutte contre la pédophilie".
Un tel filtrage est prévu par la loi
Loppsi 2.
Le texte est rapide, un peu flou, on a l'impression qu'il reste au niveau de
l'écume par moments. Ce qui me gêne précisément, et aussi le côté "être
libre mais pas trop", avec de bien nobles propositions, limitées par
cet ajout " sous réserve de ne pas porter atteinte à l’ordre public et aux
droits d’autrui", comme le soulignent
Manhack et Astrid
Girardeau (Libé).
Il est vrai que la régulation du Net devuient une lapalissade politique, au
gré des projets de loi apparus ces dernières années
A vous de voir, de lire, et de commenter...
Préambule La révolution numérique ouvre des opportunités sans précédent au
service de la libre communication des pensées et des opinions, du progrès, de
la connaissance, de la diversité culturelle et linguistique, du développement
économique et social, de la réduction des inégalités et de l’épanouissement
personnel et professionnel.
Pour autant, l’essor des technologies de l’information et de la
communication appelle à affronter de nouveaux défis qui ignorent les frontières
géographiques et juridiques.
Le développement mondial et accéléré de l’Internet implique ainsi l’adoption
de garde-fous et la reconnaissance de nouveaux droits et libertés qui,
conciliés avec ceux déjà existants, visent à permettre le plein exercice des
droits fondamentaux définis par :
- la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de1789 ;
- la Déclaration universelle de 1948 ;
- la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme ;
- la Charte des droit fondamentaux de l’Union européenne.
Article 1er : Réseau Internet Toute personne a le droit d’accéder et
d’utiliser librement le réseau Internet, neutre et ouvert, sous réserve de ne
pas porter atteinte à l’ordre public et aux droits d’autrui.
Article 2 : Vie privée numérique Toute personne a droit au respect de
sa vie privée numérique et au secret de ses échanges numériques. Les systèmes
d’information personnels sont assimilés au domicile privé.
Article 3 : Dignité numérique La dignité numérique est un droit
fondamental.
Article 4 : Propriété numérique Toute personne est propriétaire des
informations numériques la concernant, dans le respect des droits et libertés
d’autrui. L’usage de ces informations est défini par la personne concernée.
Article 5 : Transparence numérique Toute personne a le droit d’être
informée de l’existence des informations numériques la concernant.
Article 6 : Anonymat numérique Le droit à l’anonymat numérique gratuit
est reconnu à toute personne, sous réserve de ne pas porter atteinte à l’ordre
public et aux droits et libertés d’autrui.
Article 7 : Droit à l’oubli Toute personne a le droit de retrait des
informations dont elle est propriétaire ou la concernant, sous réserve de ne
pas porter un préjudice grave aux personnes physiques ou morales détenant
lesdites informations et de ne pas nuire au devoir d’information générale et de
réalité historique.
Article 8 : Identité numérique Toute personne a droit à une identité
numérique.